- 18 - L'Ascension du Lierre

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La vie avait repris son rythme quotidien au quartier général d'Eel depuis une bonne dizaine de jours maintenant et tous se portaient pour le mieux. Les Absynthes savaient à présent qu'il pouvait y avoir pire qu'un chef tyrannique, sadique et machiavélique. Il pouvait y avoir une Elfe sur les nerfs, intransigeante et tortionnaire. Bon, d'accord, les deux s'équivalaient, mais les minions étaient déjà habitués au sadique, alors pourquoi chercher à changer les habitudes ?

Par ailleurs, Ezarel était tellement soulagé d'avoir repris sa place, qu'il lâchait du leste lorsqu'il était question de martyriser ses subalternes. Y penser le faisait rire, mais au moment de mettre son plan à exécution, il trouvait cela de suite nettement moins drôle. Il lui manquait quelque chose. Peut-être son petit grain de folie s'était envolé en même temps que les cotés extrêmes de sa phobie ?

En attendant que sa chambre soit à nouveau opérationnelle, Miiko l'avait même autorisé à s'aménager un coin derrière les étagères du laboratoire pour s'installer sommairement.

Cette après-midi-là, Ezarel travaillait à son laboratoire. Il planchait depuis quelques heures déjà sur l'élaboration d'un cataplasme pour soigner les éruptions cutanées de Jamon. Eweleïn n'avait pas voulu en entendre parler. Apparemment que c'était la même histoire tous les ans, à l'approche de l'automne.

La mixture pâteuse tiédissait lentement dans un bécher tandis qu'une odeur nauséabonde s'envolait par volute à chaque fois qu'une bulle épaisse éclatait à sa surface. L'Elfe comprit en les observant pourquoi Eweleïn ne voulait plus s'occuper de cette tâche. Étrangement, il ne put s'empêcher d'associer l'éclatement de ces bulles putrides aux boutons d'acné extrême de l'Ogre. Un haut-le-cœur le força à se défaire de sa contemplation et il dut se concentrer et penser au lilas du jardin pour ne pas rendre son déjeuner.

C'est alors qu'il remarqua qu'il n'était pas seul dans la pièce. Pourtant il n'avait pas entendu la porte s'ouvrir. Il s'interrompit et en oublia même de respirer, pris au dépourvu.

- Salut, sourit Erika. Comment vas-tu ?

- Qu'est-ce que ça peut te faire ? cracha Ezarel, expulsant enfin son air. T'as pas du travail ? Comme aller faire le plein d'engrais avec les défécations des Rawist ? Tu devrais te sentir dans ton élément, non ?

La jeune humaine battit des paupières pour ne pas se laisser démonter. On pouvait au moins lui attribuer le mérite de ne pas se laisser intimider par l'Elfe. Elle inspira un grand coup et se jeta à l'eau :

- Je tenais seulement à m'excuser pour tout le tort que je t'ai fait. J'ai bien essayé de faire comprendre à Miiko que j'étais responsable mais elle...

- Je m'en tamponne la boîte de pétri, Erika ! la coupa Ezarel, qui faisait déjà mine de se remettre au travail. Pour ce que ça aurait changé de toute façon !

La demoiselle le fixa de ses grands yeux mauves avant de baisser le regard, vaincue. Elle hocha la tête comme pour admettre sa défaite et tourna les talons. Ezarel put l'entendre s'éloigner de lui et poser la main sur la poignée de la grande porte. Lorsque le ressort du mécanisme grinça à l'intérieur de la chambre de laiton quand elle appuya sur la tige d'acier, l'Elfe grinça des dents. Mais qu'était-il en train de faire ?

- Attends... Erika, parvint-il à articuler.

Le grincement s'arrêta et le temps d'un instant, Ezarel se demanda si la jeune fille n'était pas déjà partie. Quand il fit volte face, il put constater qu'il n'en était rien. La brunette se tenait là, les bras ballants le long de son corps, les yeux ronds et sans expression, la bouche entrouverte dans l'attente d'une suite.

Respire-Moi [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant