Chap 20

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Point de vue Sarah.

Vendredi.

Nous venons de passer une soirée au hit Club, une boite vers Avignon, avec Vincent, mon petit ami et un couple d'amis. Nous sortons de boite. La soirée a été bien arrosée pour l'anniversaire d'un ami. J'insiste pour conduire, mais Vincent refuse. Je ne bois pas. Il me dit toujours que les femmes au volant, c'est la mort assurée. Si j'ai le malheur de répondre à cela, une dispute éclate surtout quand monsieur a bu. Notre couple d'amis est également soûl. Je décide de ne rien répondre et de prier pour que notre route ne croise pas celle des gendarmes ou d'un taré.

J'ai juste le temps d'apercevoir la voiture nous griller le stop que les deux véhicules se percutent. Le choc est assez brutal. Le grincement des pneus sur le goudron. Les éclats de carrosserie volent en éclats. La voiture de Vincent fait des tours sur elle-même. Ma tête percute le tableau de bord. Je me tiens au siège, mes doigts se crispent sur le tissu en cuir. Nous finissons notre trajectoire contre un poteau en bois qui,  malgré mon bref souvenir quand nous nous rapprochons de ce dernier, est déjà un peu bancale. Nous n'avons pas le temps de reprendre notre souffle que le poids du poteau s'écrase sur nous. Je n'entends que le bruit du moteur qui siffle, les cris autour de moi. Mes yeux sont fermés. Je suis dans un état second. Je ne sens plus mes jambes. Les sons autour de moi s'estompent jusqu'à ce que je n'entende plus rien. Je me sens partir. Vais-je mourir ?

J'avais une vie normale avant. Sortie entre amis, un petit ami, un travail qui me plaît. Des amis super, une famille aimante. J'avais sûrement fait un faux pas et avais été puni d'une certaine façon.

Samedi

Je reconnais la voix de ma mère. On dirait qu'elle parle au téléphone, sa voix est en sanglots. Elle parle sur moi. Je n'arrive pas à comprendre ce qu'elle dit, le son de sa voix est un peu modifié, je dois être dans les vapes. Je retombe dans un sommeil. Maintenant tout est calme autour de moi seul le bipe d'une machine me tient compagnie. J'essaie de bouger mes membres. Mes paupières sont encore lourdes pour que je les ouvres. Ou bien la peur de me prendre en pleine gueule ce qui vient de se passer me bloque l'envie de les ouvrir. Je replonge. J'entends les pas d'une personne dans la chambre. Je reconnais soudain la voix de ma meilleure amie Jessy. il y a aussi ma mère, mon père... Je n'ai pas entendu depuis que je suis ici la voix de Vincent. J'espère que rien ne lui est arrivé. Je replonge. Je bouge doucement chaque partie de moi, j'essaie d'ouvrir un oeil. J'arrive à distinguer des ombres devant moi. Deux ou trois... Je me réveille, ouvre les yeux pour de bon cette fois. Le temps de m'habituer à l'intensité de la lumière. Je suis dans une chambre blanche d'hôpital, je regarde autour de moi. Une perfusion est plantée dans mon avant bras gauche. En face se trouve une télévision suspendue au mur que l'on a laissé allumer en coupant le son. À côté de moi, ma mère est assise dans le fauteuil prés de mon lit et lit un bouquin. Je ne sens toujours pas mes jambes. Tous mes membres bougent sauf ma jambe gauche...Je me tourne vers ma mère et lui tends mon bras. Ma mère se lève doucement et me prends dans ses bras en m'embrassant. Ma mère est la personne qui malgré son apparence d'être une personne froide au premier abord et une personne avec un grande coeur. Son regard est souligné de grosses cernes qu'elle a essayé de camoufler avec du maquillage. Elle a un carré blond qui tombe sur ses épaules. Elle est un peu ronde, mais c'est ce qui fait d'elle une maman ours. Elle a des yeux bleus contrairement à ceux de mon père qui sont noirs et que j'ai hérités. Elle est toujours bien habillée, n'importe la situation qu'elle doit affronter. Je remarque qu'elle a mis son tailleur bordeaux avec sa chemise rose pâle. Je lui demande ce qui s'est passé. Je me souviens de cet accident, du bruit du poteau s'écrasant sur la voiture ou plutôt sur nous. Puis plus rien.

Le vide, le précipice, je ne sais que donner comme nom à ce que je sens s'ouvrir sous mes pieds en écoutant ma mère. Le poteau s'est bien écrasé sur nous cependant il n'y a que moi qui en est possédé les frais. Vincent a le bras dans le platre et des égratignures. Cindy, la copine de Nicolas, le meilleur ami de Vincent, à l'épaule déboitée et quelques hématomes. Lui n'a que des égratignures. Elle s'interrompt de temps à chaque mot pour ne pas fondre en larmes. Elle hésite avant de me dire ce que j'ai eu. Cela devient insoutenable, je lui demande pourquoi je ne sens plus ma jambe gauche qu'est-ce qui se passe qu'est-ce que j'ai eu. Je commence à lever sans vraiment le vouloir la voir avec quelques sanglots. Je n'ai pas vraiment pensé à toucher ma jambe avant, mais c'est ce que je fais dès que ma mère m'apprend ce qui m'est arrivé. Je ne peux m'arrêter de pleurer, les larmes coulent toutes seules. Ma mère m'accompagne mais essai temps bien que mal de rester calme et de me consoler malgré l'horrible nouvelle qui sort de sa bouche. Ma jambe n'a pas aimé le poids du poteau en bois ainsi que la carrosserie de la voiture. J'ai été amputé de la jambe gauche. Je sens des bouts des doigts le moignon entouré de pansements. La sensation du toucher sur ce pansement est désagréable. Je n'ai plus rien plus que ma cuisse. J'ai envie de vomir. Ma gorge se noue. Je ne sers plus à rien. Je regarde ma mère et lui prononce les mots que je n'aurais jamais pensé dire un jour.

- J'aurais préféré y rester. Maman, je suis plus bonne à rien. Regarde-moi... Elle m'attrape soudain par les épaules en me secouant. Son regard se fronce.

- Tu vas te battre, tu as compris. Tu vas remarcher. Les docteurs vont t'apporter ta prothèse. Je l'ai choisi pour toi. C'est une prothèse en carbone avec un revêtement en silicone afin que cela soit comme une vraie jambe. Je ne te laisserai pas baisser les bras. Son ton est assez autoritaire. Mais cela me fait du bien.Elle soulève mon visage vers le sien et me sourit.

Malgré ces mots, je n'ai plus goût à rien. Je vais finir seule. Je suis seule face à cette nouvelle vie qui s'est incrusté en virant celle que j'avais. Celle où tout aller à peu près bien. Où j'avais surtout deux jambes. Vincent me laissera et pourra profiter de son côté. Je demande à ma mère de me laisser seule. Je ne veux plus  voir personne, je veux rester là, seule, à encaisser le sort qui vient de s'abattre sur moi. Je ne sais même pas quel jour, nous sommes; sûrement samedi où peut être dimanche. Ma mère m'embrasse, rassemble ses affaires et me fait signe que l'on s'appelle. J'essaie de lui sourire, mais dès qu'elle ferme la porte derrière elle, je me remets à pleurer.

Je tape le matelas de se lit ignoble tout blanc et pas vraiment confortable. Mon regard s'arrête sur les draps où est inscrit le nom de l'hôpital.

Hôpital Nord-Avignon.

GRRRRRRRR.



DestinéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant