Leçon n°1, ne jamais emmerder les Chapman. Au grand jamais.

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Je me réveillai doucement, le soleil de ce matin était si lumineux et rayonnant que je dus plisser les yeux afin de mieux percevoir l'environnement qui m'entourait. Les yeux dans le vide, fixant un meuble de ma chambre, j'essayais de me rappeler des derniers évènements, au départ alors que je fouillais furieusement dans ma mémoire, je ne trouvai qu'un trou béant. Puis dès que mon regard se posa sur ma robe pourpre étendue sur ma chaise roulante, un flash me submergea et la soirée d'hier me sauta à la figure. Des images ancrées à jamais dans ma mémoire défilèrent sans que je ne puisse les commander ou bien les arrêter. Je la revoyais bloquée entre cette maudite voiture et ce muret, ces yeux suppliants qui me regardaient avec peur, sa moue apeurée sur ses lèvres. Elle était partie. Les larmes remontèrent instantanément avec une furieuse envie de me larmoyer sur mon sort avachie sous la couette mais celles-ci furent vite stoppées, Julien débarqua dans ma chambre toujours avec la mauvaise habitude de ne jamais toquer.

Contrairement à d'ordinaire, il n'était pas habillé d'une chemise au style chic et bourgeois, de son pantalon noir ou beige, cela varie, et de ses chaussures en cuir. Tout l'inverse, ses cheveux étaient en pagaille, il portait uniquement un t-shirt large et un bas de pyjama. Il me regardait de ses yeux rougis par la tristesse, ses énormes cernes violettes révélaient sa nuit difficile.

<< Ton train est dans trois heures, il faudrait commencer à te préparer m'ordonna-t-il plus calmement et gentiment que d'habitude >>

J'hochai la tête, je ne pouvais pas insister sur le fait que je ne voulais pas partir, mais je savais que je n'avais pas le choix. Je n'avais nul part où aller, mis à part chez ce fameux oncle dont je ne connais l'existence que maintenant. Je jetai un coup d'œil à la fenêtre, le ciel était d'un bleu perçant et aucun nuage ne l'entachait. Rien qu'à cette vue, la journée semblait merveilleuse pour sortir dehors entre amies et profiter de la plage afin de se dorer la pilule.

Mais je n'étais pas d'humeur. Pas du tout. Je voulais juste me morfondre sous ma couette devant Game of Thrones avec des chips et mon pot de Nutella. Le temps devrait être pluvieux et le ciel nuageux, c'était la règle des lendemains de soirées plutôt arrosées. Ou plutôt morbides dans mon cas. Mais c'était tout l'inverse, on aurait dit que le soleil m'appelait à sortir pour profiter de cette belle journée. Mais je ne pouvais pas. Ma mère était morte. J'allais devoir partir à Paris. J'allais quitter Helena.

Mon monde s'écroulait.

J'avais l'impression que ma vie n'avait plus rien de positif, je ne savais plus quoi faire. Je ne savais pas ce que j'allais faire dans cinq minutes, ni dans une heure, ni dans dix ans. J'étais en Terminale et je ne savais toujours pas quoi faire. J'avais pensé à mannequin, j'ai plusieurs contacts grâce à mes parents et on m'a toujours dit que j'ai un visage fait pour. Mais je ne sais pas si je m'épanouirais dans ce métier, même si j'ai toujours vécu parmi le cercle si fermé que sont les "bourgeois", je ne me suis jamais reconnue parmi eux. Je m'en fichai que mes ongles ne soient pas accordés avec mon maquillage ou si ma paire de Jimmy Choo allait arriver à temps pour le bal d'hiver. J'avais de plus gros problèmes. Beaucoup plus gros.

Je me relevai brusquement, j'avais trois heures pour faire mes adieux à tous mes amis, et principalement Helena, préparer mes valises et prendre le train. Cela me semblait impossible. J'attrapai mon téléphone à ma droite et remarquai avec stupeur que ma chère meilleure amie m'avait harcelée. Ça sentait très mauvais pour moi. Je le déverrouillai et pris la décision de l'appeler. Il fallait que je lui dise.

La sonnerie résonnait à une lenteur phénoménale dans mes tympans, mon ventre se tordait au fil des secondes. Comment avouer à sa meilleure amie d'enfance que votre mère est morte et que vous allez devoir partir de l'autre côté de la France ? C'était impossible à dire.

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