9.

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"You're always on my mind"


Pourquoi ? se demanda constamment Alyx. Pourquoi avait-elle développé une certaine obssession sortie de nulle part pour lui ? Il ne comprenait pas. Il ne la comprenait pas. Il aimerait pourtant. Essayer de déchiffrer ce qu'elle a derrière la tête. Cela paraissait être une mission impossible. Lana... Son prénom lui procurait des frissons. C'était plus des frissons d'angoisse qu'autre chose. Il sentait quelque chose de malsain luire en elle. Quelque chose qui n'était pas net. Même son frère l'avait senti. Et en général celui-ci ne se trompait que rarement. 

Il essaya de chasser cette jeune femme de ses pensées. Il était persuadé que c'était ce qu'elle recherchait. Qu'elle occupe ses pensées.
A la pause du midi, il sortit dehors. Il commença à faire un peu plus chaud ; le soleil était de retour et le ciel était à nouveau bleu. Cela le mettait de bonne humeur. Il décida de s'asseoir dans le peu d'herbe qu'il y avait dans la cour et de s'allonger sur le dos. Il avait toujours adoré l'été. Il y avait tellement de souvenirs qui lui remontaient. Des souvenirs de quand il n'était pas encore ici. Des souvenirs de quand tout était encore bien et de quand il était encore heureux. Il se souvint du rire de Maria et de Florent, de leurs moments ensemble. Il se souvint de leurs disputes, leurs chamaillades pour rien, de leurs soirées et de leurs conneries. Cela lui manquait plus que tout. Maria lui manquait. Florent lui manquait. Le passé lui manquait. Si seulement il pouvait retourner en arrière et les retrouver, faire comme si rien n'était. Mais cela était désormais impossible. Enfin, il se convainquait que cela était impossible, même si au fond de lui, il savait que ça ne l'était pas.
Il sentit une présence à ses côtés. Il n'eut même pas besoin de tourner la tête pour qu'il sache qui c'était.

-Qu'est-ce que tu me veux encore, Lana ?

Il y eut un silence et il se demanda s'il n'avait pas rêvé de cette présence à ses côtés. Il tourna la tête sur le côté et aperçut la jeune femme, allongée à ses côtés, ses cheveux éparpillés dans l'herbe, ses yeux fixant le ciel. Il détailla les traits de son visage avec attention avant de reposer le regard sur le ciel.

-Tu sais, commença-t-elle.

Pendant un instant il a cru qu'il entendrait des excuses sortir de ses lèvres, mais cela aurait été trop beau pour être vrai.

-Mon prénom, Lana, vient du grec « hélê », qui peut se traduire par « éclat de soleil ». On me dit souvent que cela me correspond bien, parce que, je cite, je suis « vraiment un éclat de soleil ». On me dit que cela correspond parfaitement à ma bonne humeur et ma gentillesse.

-Je trouve que c'est plus ironique qu'autre chose.

-N'est-ce pas ?

-Ils auraient dû te nommer avec un prénom dérivé du latin hypocrita ou un truc du style. Ça te correspondrait mille fois mieux.

Il jetait un coup d'œil vers Lana et s'aperçut qu'elle souriait. Elle ne l'avait pas mal pris et étrangement cela le fit sourire lui aussi.

-Mon prénom, d'après ce qu'on m'a dit, est d'origine un prénom de fille, qui vient de Alix, avec un i. Cela vient du germain qui signifierait « noble et combattant ».

-C'est marrant je trouve, comment parfois nos prénoms nous représentent énormément, ou justement pas du tout.

Alyx fronça les sourcils.

-En quoi le mien me représente ?

-Je ne te connais pas assez pour en être persuadé, mais tu m'as l'air d'être un combattant.

Alyx souriait d'un air moqueur, bien qu'elle ne puisse le voir et s'allongea lui aussi dans l'herbe.

-Qu'est-ce que j'ai au juste d'un combattant ?

-Je ne sais pas, une impression.

Il tourna la tête sur le côté pour la regarder. Quelques secondes après elle en fit de même et leurs nez se frôlaient presque. Il vit les joues de Lana rougir davantage. Cela élargissait un peu son sourire. Il réfléchit un instant avant de lui poser la question qui lui brûlait les lèvres.

-Pourquoi t'es venue chez moi ?

Lana tourna brusquement la tête à nouveau vers le ciel, comme gênée.

-J'en avais envie. Je te l'ai dit non ? Chaque semaine je fais quelque chose que je n'ai jamais faite avant.

La réponse ne lui suffit pas, mais il avait comme une impression qu'elle-même ne savait pas exactement pourquoi elle avait fait cela. Que c'était sur un coup de tête, qu'elle n'avait pas réfléchit avant de le faire.

-Autre chose alors, pourquoi tu as fait du pied à mon frère ?

-De quoi tu parles ? dit-elle d'un air confus.

Il soupira longuement. C'était plus difficile qu'il ne l'aurait pensé, d'en apprendre des choses sur cette fille.

-Et, enchaîna-t-il, pourquoi m'avoir évité et arrêté de faire ton jeu à deux balles ?

-Je trouve que tu te poses trop de questions, Alyx. Arrête un peu de réfléchir un instant. Et puis j'estime que c'est à mon tour de te poser une question.

Il hésita un instant. Il ne voulait pas répondre aux questions de son passé. Il était persuadé que cela allait être sur ça. Décidément chaque tentative d'approche de sa part n'est qu'une manipulation pour en savoir plus sur les horreurs qu'il a vécu. Il en était dégoûté mais tâcha de ne pas le montrer et ne répondit rien.

-Pourquoi tu ne veux pas de mon amitié ?

Il fronça les sourcils de surprise. Il ne s'attendait pas à cela. Peut-être qu'au final cela ne l'intéressait pas tant que ça, ce qu'il avait vécu. Cela le rassurait.

-Quoi ?

-Tu dis que c'est moi qui t'évites mais en attendant tu le fais aussi. Tu prends chacune de mes tentatives d'approche pour une agression.

Alyx pouffa de rire.

-Rappelons que l'une des premières choses que tu m'as dites était quand même un truc du genre « tu as assassiné tes parents blabla t'es un monstre blablabla ». Si ce n'est pas une agression ça.

Lana ria. Et il trouva cela beau.

-Je suis désolée pour cela. Mais regarde, mes tentatives maladroites et agressives ont marché non ?

Elle se redressa et se leva et il en fit de même. Elle le regarda droit dans les yeux avec un sourire, qui pour une fois ne lui semblait pas hypocrite ou malsain. C'était un véritable sourire. Elle s'éloigna dans la cour et il la regarda partir, un sourire trônant sur ses lèvres. Et voilà. Sans même l'avoir réalisé, de la façon la plus naturelle possible, ils s'étaient rapprochés. Il avait réussi à apprécier la personne qu'elle était pendant ce court temps. Il lui avait dévoilé des choses à propos de lui-même. Enfin ce n'était pas grand-chose, mais c'était déjà plus qu'il avait révélé à n'importe quel élève depuis qu'il était là. Il avait réussi à apprécier quelque chose chez Lana. Il y avait quelque chose qui parmi ces quelques phrases d'échangés lui avait plu. Elle était vraiment bizarre, et il ne saurait dire quelles étaient ses vraies intentions. Mais désormais, ça ne le gênerait plus de lui parler.

Et c'est ainsi que tout commença réellement. 

Et puis on tire sa révérenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant