10.

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"Lo esencial es invisible para los ojos."


Depuis sa naissance, Tom était un frère de et un fils de. S'il n'était pas qualifié de cela, il était qualifié par un nom, Stevens. Tom n'a jamais eu l'occasion d'être lui, de montrer qu'il était vraiment, sans tous ces étiquettes qu'on lui collait sans cesse. Quand on le voyait, les gens ne disaient pas « Oh regardez c'est Tom. ». Ils disaient « Oh regardez c'est le frère de Lana » ou encore « C'est le fils des Stevens ». A partir de cet instant, des attentes s'imposaient à son égard. On attendait de lui qu'il soit gentil comme sa sœur, poli comme ses parents, généreux et aimable comme étaient les Stevens.
Petit, il ne comprenait pas pourquoi ses parents ne voulaient pas l'amener aux dîners entre amis. Il ne comprenait pas quand ils disaient qu'il ne savait pas « se tenir ». A cet époque, il ne comprenait pas. Qu'est-ce vraiment « se tenir » ? Qu'est-ce qu'il ne faisait pas bien ? Etait-ce parce qu'il le disait immédiatement quand il n'aimait pas les plats que leurs amis faisaient ? Parce qu'il ne prenait pas cet air hypocrite que sa sœur avait constamment lorsqu'elle s'adressait à des gens ? Parce qu'il essayait tout simplement d'être le plus honnête possible avec autrui ?
Aujourd'hui il avait compris qu'il n'appartenait tout simplement pas à cette famille. Il ne voulait pas faire partie de leur jeu d'hypocrisie constant, prétendre d'être une famille qu'ils étaient loin d'être. Il ne voulait juste pas. Il serait donc toujours le vilain petit canard de cette famille, la tâche d'encre sur le tableau.
Leur famille était brisée, mais ils essayaient tous tant bien que mal de le masquer.
Il ne l'avait jamais autant remarqué que lorsque Lana partit. Il savait que l'un d'entre eux finira par craquer. Il se doutait bien que cela serait Lana. Il le savait. Mais il ne savait juste pas à quel point. Maintenant, sachant la vérité, il était terrifié. Qui aurait cru qu'elle avait ça en elle ?

Il savait qu'elle aussi elle souffrait de cette hypocrisie, de cette famille, de sa réputation, de toujours devoir faire tout comme il le faut. Sauf qu'elle, elle rentrait dans le jeu. Et il n'a jamais compris pourquoi. Il se demandait pourquoi elle ne faisait pas comme lui, pourquoi elle ne se détachait pas. Mais Lana avait trop peur de la différence, d'être détestée et méprisée, d'être mal vue. Lana était perdue et ne savait plus faire la différence entre ce qu'elle pensait, ce qu'elle voulait et ce qu'elle pouvait. Son frère ne l'a jamais compris, mais il l'a toujours soutenu. Il l'aimait fortement tout de même. Parfois, le soir, il l'entendait rentrer très tard discrètement. Il allait des fois dans sa chambre alors pour lui parler. Elle l'accueillait toujours avec un grand sourire, l'invitant à s'asseoir sur son lit. Et ils parlaient. Elle lui racontait comment elle se sentait réellement, vis-à-vis du lycée, des parents, des rallyes, auxquels lui n'a jamais pris part. Elle lui parlait d'Alyx. Elle lui parlait souvent de lui. De comment ils s'étaient rencontrés, comment ses sentiments ont grandi, à quel point il était attentionné, à quel point elle l'aimait.

Ils avaient une belle relation tout de même. Une relation fraternelle qu'est plutôt rare. Ils feraient tout l'un pour l'autre. Il l'aimait. Et il savait qu'elle l'aimait aussi. C'est pour ça que quand elle s'était enfuie, il se sentit terriblement abandonné. Il voulut hurler, lui demander pourquoi elle ne l'a pas pris avec lui, pourquoi elle l'a laissé tout seul avec ses parents. Ça le rendait fou. Il lui en voulait terriblement de ne pas avoir pensé à lui. Il pensait qu'elle savait qu'il étouffait ici, qu'il devenait fou. Il aurait tout fait pour partir. Mais elle l'avait profondément déçu. Non seulement elle avait commis l'irréparable, et de plus elle était partie sans lui. Lana était son palier. Elle était le palier de la famille.

Et sans elle, tout s'était effondré.

Ses parents se disputaient constamment, s'accusant l'un et l'autre de l'éducation de leur fille. La nuit il entendant des claquements de portes et des cris. Et le lendemain quand il se réveillait, en passant dans le salon, il voyait sa mère, et parfois son père, dormir sur le canapé.
Ça lui faisait mal. Il n'arrivait pas à croire que Lana puisse être aussi égoïste, de les laisser, de les détruire comme ça.

Au lycée, des élèves venaient le voir, pour lui poser des questions sur sa sœur, si elle avait toujours été comme ça à la maison. Ils lui parlaient un moment, faisant semblant de s'intéresser à lui, avant de terminer la discussion par un « Tu t'appelles comment déjà ? ». A chaque fois, il ne répondait pas. Il ne voulait pas sympathiser avec des gens qui ne s'intéressent pas réellement à lui.

Maintenant plus que jamais, Tom était devenu le frère de.

Et il en avait plus qu'assez.

Tom devait savoir ce qu'il s'était passé exactement, réellement. Il devait partir de là.

Un soir, il prit son téléphone et essaya d'appeler Lana. Elle ne répondit pas. Il essaya d'appeler Alyx, il ne répondit pas. Il fut pris d'une rage et balança son portable contre son mur, en lâchant un cri de rage. Des larmes vinrent à ses yeux tandis qu'il se demandait comment il allait bien pouvoir la retrouver. Comment ?

Il parvint à se calmer et se persuada qu'il se devait de les trouver avant que la police le fasse.

Il réunit des affaires nécessaires, avant d'aller discrètement prendre tout l'argent liquide qu'il pouvait trouver dans le portefeuille de ses parents et dans leur chambre. Ce n'est pas comme s'ils étaient dans le besoin de toute manière.

Il prit son sac et s'en alla. 

Et puis on tire sa révérenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant