Les anges d'Héliomande (Terminé)

Chapitre 17 : Mission

Afaël grimpa dans l'arbre, dédaignant l'échelle de corde accotée sur le tronc trapu. L'écorce rugueuse aux nombreux interstices et branches lui suffisaient. Elle se hissa agilement dans la ramure jusqu'à la plateforme construite autour du tronc. Elle attrapa les lattes de ses mains et se tracta jusqu'à ce que le bois s'enfonce dans son bassin. Elle balança ses jambes par-dessus la plateforme et rejoignit Altaïr qui sondait la forêt. Les runes taillées dans l'écorce s'illuminaient doucement lorsqu'un animal s'en approchait. Elles tenaient également les intrus aussi loin que possible du camp, les détournant des routes qui les mèneraient jusqu'ici. Elle prit un morceau de pain maintenu dans son dos par une bande de tissu passée en bandoulière et le lança à Altaïr. Il l'attrapa à la hauteur de son visage sans même détourner le regard.

Elle extirpa une autre miche de pain de l'étreinte de l'écharpe et mordit la croute sans attendre, dévoilant la mie tendre. Elle s'assit ensuite le dos contre l'arbre.

Au début, elle ne venait que si elle était de garde. Aujourd'hui, elle tenait quelquefois compagnie à Altaïr même si elle n'était pas affectée à la surveillance des environs.

Le silence s'installa, enveloppant. Il glissait dans les courants d'air sans jamais se poser lourdement. Le silence n'était plus habité par aucune gêne, il était seulement une présence lorsqu'il n'y avait rien à dire.

Elle le chassa des ondes de sa voix :

-Wellan nous demande à la première heure demain, l'informa-t-elle entre deux bouchées de pain.

Altaïr hocha la tête tout en mastiquant. Il avala et répondit :

-Je me demande bien ce qu'elle nous veut.

*****

Afaël enfila son débardeur de cuir épais qu'elle ajusta sur sa chemise de lin et elle attrapa la lame qui reposait sur le mur aux côtés d'une deuxième plus courte dont elle s'empara également. Même si elle avait changé de préférence quant à son style de combat, une deuxième lame plaquée contre sa cuisse la rassurait.

Elle se drapa de sa cape et quitta la cabane aux lits vides. Une bise fraiche souleva les pans de celle-ci qu'elle apprécia dès qu'elle eut attaché l'agrafe qui les maintint serrés autour de sa poitrine. Quelques minutes plus tard, elle franchit les portes de la salle du conseil. Altaïr et Liam attendaient déjà. Les deux se tenaient le plus éloignés possible. Liam menaçait de creuser une tranchée dans le plancher en faisant les cent pas à droite de la table qui trônait dans la pièce. Sa toge valsait dans son sillage. De l'autre côté, Altaïr était adossé au mur, les bras croisés, et le regard perdu dans les vagues.

Afaël sourit à Liam lorsqu'il leva les yeux de ses pieds mouvants. Il étira à peine les lèvres avant de retourner à son manège. Afaël soupira intérieurement. Depuis qu'il suivait son enseignement auprès d'Igrim, ils se côtoyaient rarement et il semblait lui tenir rigueur de se tenir avec les autres jeunes du camp. Elle était attristée de le voir aussi reclus, elle était certaine que s'il faisait un petit effort pour se mélanger aux autres, il trouverait en eux des amis.

Wellan entra à son tour et tous les trois la saluèrent d'un mouvement de tête. Elle s'approcha de la table et ses doigts effleurèrent le papier aux multiples traits de fusains qui, ensemble, formaient la ville d'Héliomande et ses alentours. Ils la rejoignirent et elle croisa les bras derrière son dos, rehaussant légèrement les épaules, toute chef qu'elle était.

-J'ai une mission à vous confier.

Altaïr roula des épaules et Wellan le mis au défi de contester sa décision du regard. Ce dernier baissa la tête et Wellan continua :

-Bien, notre fournisseur d'encre d'albal s'est désisté et je pense en avoir trouvé un nouveau qui acceptera de nous en vendre. Seulement, je veux m'assurer qu'elle soit de bonne qualité et c'est pourquoi Liam fera partie de votre petite délégation si je puis me permettre. Afaël, tu pourras lui donner un second avis étant donné ta formation de forgeronne.