Partie 34 : Les blessures de l'âme

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"Je suis tout sauf heureux. Comme si le soleil s'était couché depuis cinq jours et n'était jamais revenu, Ana. Je suis dans une nuit perpétuelle." E.L James

                       NABIL

Il y a des années deja, mes parents m'ont appris à me tenir à table, à ne parler que lorsqu'on me le demande, à être diplomate et tout le tintouin. Ces valeurs, sont, je le conçois indispensables pour survivre dans le monde dans lequel j'évolue. Et surtout à y trouver sa place.
Enfin vous savez quand je dis mes parents, je pense plutôt aux employés de mes parents. Force est de constater que l'éducation que j'ai reçu a fait de moi l'homme que je suis aujourd'hui, mais que mon passé condamne mon futur et que je semble pris dans un cercle de noirceur infernale comme le serait une biche par des phares de voitures.
Je me suis toujours identifié à ce gosse en manque d'affection qu'on remarque tout particulièrement dans les films de sciences fictions et dans les séries à tendance dramatiques. Effectivement eux et moi avons beaucoup plus de points en commun que la plupart des gens le soupçonne. Je n'ai pas toujours été le petit héritier que je suis aujourd'hui, je ne suis pas né avec une cuillère en argent dans la bouche comme tout le monde le pense, bien au contraire.
Ma vie n'a pas toujours été rose. Je suis d'ailleurs tombé sur plus d'épines que de pétales.
Pour moi tout a commencé un ténébreux soir de décembre. La descente aux enfers a été fulgurante. Ma mère, ma véritable mère prostituée de métier et droguée de passion avait décider d'aller chercher sa dose. Elle est rentrée quelques heures plus tard que prévu, comme à son habitude. Et ce soir-là, je n'avais rien mangé de plus qu'une barre de céréale que j'avais déniché au fin fond des placards. Je criais famine mais maman finissait toujours pas se rattraper, je ne pouvais pas La blâmer.. Seulement son dealer est venu à la maison, il avait décidé de nous rendre une petite visite, ce qui en soit n'avait rien d'inhabituel. En une fraction de seconde, ma vie a basculé. Je parle comme une gonzesse là non ? C'est parce que je n'ai jamais parlé de ça, de peur que l'on ai pitié de moi. Mes parents adoptifs m'ont traîné chez des dizaines de psychologues, les meilleurs dans leurs domaines, mais je restais assis à les regarder dans le blanc des yeux incapable de verbaliser ce que j'avais vu et ce que je voulais effacer de ma mémoire à tout jamais. Personne n'a jamais su ce qu'il y avait dans ma tête, je suppose que je dois y voir un signe de faiblesse.
Revenons à nos moutons. Ce connard voulait qu'elle le paye, j'ai compris plus tard que c'était également un des plus grands proxénète de la région. Elle a refusé et lui a claqué la porte au nez. Elle m'a emmené dans un petit cagibi situé entre sa chambre et la salle de bain. Il était insalubre et dégoûtant autrement dit il était à l'image du taudis dans lequel nous habitions. Elle avait la promptitude de me laisser là lorsqu'elle se piquait où qu'elle recevait des clients.
Il est revenu quelques minutes plus tard, il tambourinait à la porte comme s'il voulait la casser. Je m'amusais même à compter le nombre de secondes qu'il faudrait pour qu'elle se brise sous ses poings. Elle l'a fait entré et tout ce que j'ai entendu par la suite ce sont des cris étouffés. J'ai attendu que maman vienne m'ouvrir, ou m'ordonne de sortir. Seulement pendant toute une journée elle ne m'a rien dit.
J'ai alors décidé de sortir discrètement et là j'ai trouvé ce qui me marquera à tout jamais : le corps de ma mère qui gisait au sol. Elle etait en sous vêtement, ce porc l'avait violé et poignardé à plusieurs reprises puis l'a laissé pour morte sur le sol. Elle était dans un état digne de Saw 6, les lèvres bleues, le corps gelé, le regard vitreux et jaunâtre, ses cheveux de jais d'ordinaire si brillant étaient ternes et ce qui semblaient les rassembler était une énorme flaque de sang, surement du au choc brutal de sa boîte crânienne contre le sol.
Je suis resté à ses pieds pendant des jours. J'ai nettoyé ses plaies ; puis j'ai débarrassé son corps de la crasse qui le surplombait. J'attendais qu'elle se réveille, qu'elle me dise que tout irait bien et qu'elle me serve un verre de jus de fruit, mais c'était sans savoir qu'elle ne se réveillerais jamais.
Un de nos voisins à cogné à la porte, sûrement à cause de l'odeur nauséabonde de l'urine, de la mort, du sang, de l'injustice et de la brutalité qui flottait dans ce minuscule appartement.
Ces jours-là m'ont tout pris : mon seul parent, mon innocence, ma confiance en moi, ma confiance en les autres, mon respect pour les femmes, TOUT.
Il a appelé les flics, les assistantes sociales, tout ses gens qui si ils l'avaient voulu auraient pu aider ma junkie de mère. Ils auraient pu la sauver, ils auraient pu me sauver moi. Ils auraient pu m'éviter de devenir cet être froid, orgueilleux et sans coeur que je suis devenu.
Pendant environs 2 ans je n'ai prononcé mot. Je ne parlais plus, sûrement un effet post-traumatique. Un gamin de 5 ans se retrouve à côté du cadavre de sa mère tu m'étonnes ça doit être traumatisant. J'ai été placé dans un orphelinat et c'est là que mes parents actuels sont venus me chercher. Ils n'arrivaient pas à avoir d'enfant j'étais leur dernier espoir, et mon Dieu quel espoir ! Ils ont vite déchanté je suppose. Ils ont placé beaucoup d'espoir en moi, ils m'ont envoyés dans les meilleures écoles, m'ont acheté tout ce dont j'avais besoin. Mais j'avais des difficultés d'apprentissage, il y a certaines choses que je n'arrive pas à mémoriser, j'ai un temps de concentration très limité voir nul. Les médecins ont émis l'hypothèse selon laquelle ma mère biologique se serait droguée pendant La grossesse ce qui m'aurait causé des troubles neurologiques. Je n'avais que très peu d'ami quand j'ai rencontré ma Mia. Elle était une chance d'être moi-même, de m'épanouir, de changer, elle est arrivée comme une étoile filante dans la nuit noire.
Mon seul vœu était d'être enfin aimé et désiré mais j'ai tout fait à l'envers. Je la considérais comme une femme trophée, à vouloir trop bien faire j'ai cru que je pouvais acheter son amour et La traîner à toute mes petites soirées comme un simple accessoire.
Quand elle m'a quitté j'ai eu des remords, puis je me suis vite ressaisis. J'ai tout pour moi, elle a quoi elle ? Je me suis vengé et c'est tout ce dont j'avais besoin.

La vie de MiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant