J'avais oublié ce que c'était que d'être aimée (TERMINÉ)

Un scones ?

          

Aujourd'hui, je suis arrivée cinq minutes plus tôt car j'ai remarqué qu'IL venait avant moi, pour marquer son territoire sûrement. Mon sourire s'illumine. Il est là, assis à notre table, je suis sûre qu'il est loin de se douter de ma mauvaise action, je dépose avec un certain cérémonial les scones sur la table et j'apprécie l'air intrigué qu'il affiche.

— Qu'est-ce que c'est ?

— Une sorte de calumet de la paix. C'est aux myrtilles

— Pourquoi est-ce que j'ai du mal à y croire ?

— Hé Mac, un peu plus de civisme ! Je fais un pas vers toi.

— Alors laisse-moi ma table Cake.

Il m'appelle comme ça parce que je trempe toujours un cake dans mon chocolat. Je sais que ça l'agace que je le fasse tomber une fois sur trois dans mon chocolat en m'éclaboussant copieusement au passage et moi je l'appelle Mac à cause du Macciatto qu'il réclame : ni trop sucré, ni trop amer,  ni trop chaud, ni trop froid. Il ne peut s'empêcher de sourire comme un gosse devant le petit dessin que lui fait David le patron dans son café.

Il a ce sourire imparfait qui m'amuse à cause de sa cicatrice. On dirait le mec, écorché par la vie, qui a tenté de refouler toutes émotions positives mais ne peut s'empêcher de sourire devant son café du matin. Ses lèvres remontent alors légèrement et on pourrait aisément passer à côté des fossettes qui se creusent sur sa joue droite si on n'est pas assez attentif.

J'enroule une de mes mèches blondes tirant sur le roux autour de mes doigts et je feins un air innocent.

— Je te jure que c'est de bon cœur. Pour te le prouver je vais commencer.

Délicatement, j'attrape un scone en signe de bonne volonté. Je sais exactement lequel prendre. Les sourcils froncés, il se saisit d'un petit pour commencer et se lèche les lèvres, il a l'air d'apprécier.

— Tu sais cuisiner ?

— Quand je m'en donne les moyens. Pourquoi cet air étonné ?

Il relève les yeux et je remarque les pépites d'or moqueuses qui brillent dedans.

— Quoi ?

— Non rien, je me disais juste que, puisque tu sais cuisiner, tu devrais arrêter d'acheter toutes tes merdes.

Un point pour lui. Mais dans la journée, il risque de se rendre compte que je me donne les moyens de cuisiner uniquement par perfidie. J'ai mis du bleu de méthylène dans les scones, la myrtille est un leurre. Mon sourire s'étend quasiment jusqu'aux oreilles.

David a repéré mon manège et attend que Mac s'en aille pour me demander l'autorisation de manger un scone. Comme je l'aime bien, je lui avoue le traquenard et il reste sans voix avant de me prendre la boite « pour le livreur qu'il n'aime pas »
Au passage il me félicite d'oser emmerder comme ça un mec de Scottland Yard. Sa remarque me laisse perplexe, ça me ferait bizarre de le croiser au boulot... surtout après toutes les vacheries qu'on se fait.

J'arrive au travail avec quelques minutes de retard, Cal me saute dessus pour savoir comment ça s'est passé. Il m'a aidé à cuisiner hier soir.

—Je pense que c'est demain que je vais avoir le retour de bâton.

— Bon sang je n'imagine pas sa tête quand il va aller aux pissotières, la honte.

La remarque de Cal m'arrache un sourire alors que j'ouvre un dossier qui a été déposé sur mon bureau.

Tout à coup, il me prend le visage par le menton. J'entends Furbisher qui suffoque, personne d'autre n'est sorti indemne après avoir posé sa main sur moi.

— Oly ! Tu t'es maquillée ? Ce type te plait ma parole.

— Non, pas du tout !

Mais j'ai protesté avec trop de virulence, ce n'est pas crédible. C'est vrai que Mac, dont je ne connais même pas le prénom, me plaît. Il me plait même beaucoup. Mais je proteste et je m'éloigne alors que le rire de Cal résonne dans l'open-space.

Je pense que je suis plutôt jolie si on fait abstraction de ma mâchoire un peu carrée et de la couleur de mes yeux, d'un gris très pâle. Ça peut avoir l'air canon comme ça, mais moi je trouve que ça me donne un regard de psychopathe.
Cal m'a dit une fois qu'on dirait la fiancée de Dracula.