Keith, Calum et ... Stuart

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Nous avons garé la voiture devant le manoir depuis cinq bonnes minutes mais j'admire le paysage et la beauté de la bâtisse.

— Mais Cal, je pensais que c'était une petite fermette à t'entendre. C'est immense !

— Attends un peu que je t'emmène visiter un vrai château et tu vas comprendre ce qu'immense veut dire.

— En tout cas, c'est le genre de maison hantée où doit vivre Adam Bell.

— J'n'aurais jamais dû t'offrir ce livre de fantômes, tu racontes n'importe quoi depuis.

— Si tu veux être crédible, il va falloir que tu aies l'air plus indulgent et attentionné envers moi.

On a beau avoir répété nos rôles, on donne plutôt mal le change, il voulait que j'ai l'air plus « sophistiqué » et que je sois polie et je voulais qu'il soit moins moqueur.

—Tu te souviens des prénoms ?

—Ta mère s'appelle Cécile, ton père Murray, ton grand frère ...

— Keith, tu n'es pas obligé de trop lui parler depuis qu'il s'est fait plaquer, il est chiant.

— Belle entente fraternelle ! Et ta sœur, je vais l'apprécier ?

— Elle n'est pas très intelligente... Mais peut-être.

— Pourquoi es-tu si dur avec eux ?

— ... ça ne te regarde pas.

— On dirait que tu leur reproches à l'avance la réaction qu'ils pourraient avoir quand tu leur annonceras ?

J'ai dû toucher dans le mille car je le vois s'assombrir. Toute cette colère le paralyse et le dévore de l'intérieur. J'ai mal pour mon ami, je lui prends la main et nous restons quelques minutes de plus, silencieux.

— J'aurais dû te parler de quelque chose. J'avais un autre frère, Stuart, il s'est tué quand j'étais adolescent.

Je ne cherche pas à en savoir plus, il semble déjà m'avoir dit plus qu'il ne le pouvait parce que ses yeux sont embués. Jamais Cal n'a flanché avant aujourd'hui devant moi, je ne veux pas qu'il souffre plus que nécessaire, je penche ma tête sur son épaule. Quand soudain un grand coup sur sa vitre nous fait sursauter. Je lève les yeux et découvre sa mère en train de sourire.

— Allez les amoureux, on rentrait de balade justement.

Je sors de la voiture pour me présenter mais je tombe nez à torse contre un homme beaucoup plus grand que moi. Son odeur m'est familière, mon regard croise les yeux vert foncés que j'aime épier tous les matins depuis plusieurs semaines. Je bug complètement, je ne m'attendais pas à le retrouver là, LUI, c'est comme mélanger deux univers radicalement différents. C'est très déroutant et surtout gênant vu l'imbroglio de mensonge que je m'apprête à débiter pour Cal.

Ses lèvres sont pincées, Mac qui n'est pas que mon Mac me dévisage avec colère. Il me semble encore plus grand que d'habitude et je remarque que ses cheveux bruns sont ébouriffés par le vent froid. Ce matin, il n'est pas rasé de près. Il est charmant quand il est fâché. Mon cœur se serre, je n'imaginais pas qu'il soit touché par nos mensonges, cela n'aurait pas dû se savoir.
  

Cal n'a aucune idée de ce qui se passe et est en train de parler à sa mère.

— Maman je te présente ma chérie, Olivia !

Je sursaute et me retourne vers cette très belle femme qui est en train de chuchoter à son fils en français. Je me rappelle de la nationalité de la mère de Mac et je m'étonne que Cal ne m'ait jamais parlé lui, j'aurais peut être eu des doutes plus tôt.

— Elle est très jolie en tout cas.

J'aime entendre ma langue maternelle si loin même si je dois feindre de ne pas la reconnaitre.

— Je suis ravie de tous vous rencontrer.

Je tends la main à Mac en face de moi mais il me dévisage et se détourne aussitôt, ce qui créé une certaine gêne. Je remarque ce que je n'avais encore jamais vu : il y a un air de famille. C'est l'essence même de mon métier d'être observatrice. Qu'est-ce qui a péché ces derniers temps ?

— Excusez Keith, je ne sais pas ce qui lui a pris ! Il était d'excellente humeur ce matin. Il a rencontré une fille qui lui plait récemment.

Keith -ou Mac- n'est pas encore assez loin pour ne pas entendre, marque une pause pendant laquelle je vois ses épaules se contracter. Il shoote dans une pierre et repart en jurant.

Calum s'est rendu à mes côtés, il semble intrigué jusqu'à ce que je lui glisse à l'oreille :

— Keith c'est le mec du café...

— TON mec du café ? Non !!!

Mais qu'est ce qu'il est lent à la compréhension parfois ! Je hoche la tête et vois avec horreur un grand sourire de satisfaction se peindre sur son beau visage après un long moment d'étonnement. Il jubile, cet homme est infernal.

— Trop drôle, il faut que je raconte ça à Charles murmure-t-il.

Cécile nous entraine à sa suite et nous conduit dans la chambre de Calum, elle nous dit qu'elle nous laisse nous installer et qu'elle nous attend pour une pause gourmande dans la cuisine dès qu'on a fini.

Je me jette sur l'immense lit dès que la porte se referme.

— J'adore ta maison !

— Tu crois que tu vas t'en tirer comme ça ? Je veux tout savoir sur vos cafés matinaux !

— Non. Et si tu essayes de m'enliser avec ça, je balance à tout le monde que tu me forces à mentir.

— Tu me menaces ?

Je laisse parler mon expression sadique à ma place et il décroise les bras en grommelant. J'ai l'assurance qu'il ne va pas chercher à me taquiner publiquement là-dessus.

Ça me fait de la peine que mon compagnon de café soit pris dans ces mensonges. Je sentais qu'il se passait quelque chose entre nous et voilà que tout vient de voler en éclats. C'est probablement mieux comme ça... Je n'ai pas trop d'avenir sentimental de toute façon et nous nous dirigions inexorablement vers cela.

J'avais oublié ce que c'était que d'être aimée (TERMINÉ)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant