Le vampire de Highgate

6.1K 715 18
                                    

J'ai appris que Belle et Tom avaient étés enterrés discrètement dans le cimetière de Highgate, je ne comprends pas bien le principe d'enterrer discrètement quelqu'un là d'ailleurs. C'est le cimetière le plus populaire de Londres ou presque, on y voit des touristes souvent et des amoureux de l'époque victorienne qui aiment se faire peur. A bien dès endroits la nature a repris le dessus et on voit les tombes disparaitre sous les racines d'arbres séculaires. C'est assez flippant je trouve pour ma part. Moi j'ai surtout secrètement peur d'y rencontrer le vampire de Highgate !

Je les trouve après une bonne heure de recherche mais je ne suis pas la seule. Sir John discute devant leur tombe avec un homme avant de s'éclipser. L'homme semble avoir perçu ma présence et j'ai même l'impression qu'il m'attend, je sors discrètement de l'ombre et m'avance à sa hauteur. La haute silhouette de Sir John Belley a disparu dans la verdure d'Highgate tandis que celle de son visiteur surplombe la tombe avec une certaine nonchalance.

— Vous !

Cet homme qui m'a hanté dès années durant me dévisage de son regard bleu glacial.

— Honnêtement j'espérais aussi ne jamais vous revoir.

Mon tueur à gage mélomane sifflote et pose des fleurs sur la tombe de Belle. Une feuille s'échappe du bouquet.

— On est quitte maintenant jeune femme, me dit-il de sa voix torve.

J'ai beau rassembler tous mes neurones, je ne comprends pas ce qu'il raconte et je me penche pour ramasser la feuille, il y a un petit article de journal sur une mort mystérieuse survenue la veille d'un homme d'affaire crapuleux et de deux de ses collaborateurs.

— Qui est-ce... ?

Je ne finis pas complément la phrase, je comprends et j'ai le souffle coupé. Ce sont les détraqueurs de Tom et de Belle. Les assassins de la mère de mon amie qui auraient pu continuer à vivre insouciants toute une vie puisque j'avais fini le boulot à leur place.
Si seulement Tom avait mis autant d'ardeur à se venger de la bonne personne plutôt qu'à me poursuivre !

La nature humaine est étrange.

— Je croyais que vous n'étiez plus du métier ?

— Non, mais je vous devais une faveur.

— Je n'ai rien demandé et encore moins qu'on tue pour moi !

_ Vous, non.

Je jette un coup d'œil dans la direction où John est parti. Ainsi, il a enfreint les règles.

A côté de moi, l'homme réarrange les fleurs délicatement.

— Vous ... vous faites quoi dans la vie à part tuer des gens pour rendre service sinon ?

Il me prend le bras comme si on était deux vieux amis et m'entraine vers la sortie du cimetière.

— Paysagiste... Je préférerais à l'avenir réarranger votre jardin ou quelque chose de moins envahissant, me dit-il sans rire.

Et mi-figue, mi-raisin je le suis vers le pub un peu glauque.

Charles me récupère à l'heure dite pour me servir de chauffeur, je suis encore toute retournée, il essaie de me changer les idées en parlant de Cassidy et Killian qui ont repeint une parti du salon avec des bandes bariolés qui lui font l'effet de vivre dans un local dédié à la Gaypride.
Je souris et le laisse me parler de tout et de rien jusqu'au trajet de mon travail. J'ai beau être en arrêt, j'ai besoin d'aller voir un peu ce qui s'y passe.

Et surtout aujourd'hui tout le monde semblait être occupé à quelque chose. Je suis un peu soulagée parce que c'est mon anniversaire, mon vrai anniversaire que je n'ai pas fêté depuis mes quinze ans et que j'avais peur qu'on en fasse un patacaisse alors que je n'ai plus l'habitude d'être le centre de l'attention.

Heureusement ils ont oublié et c'est tant mieux. Je pense que je vais déjà assez me faire remarquer dans un mois quand je vais débarquer au mariage de Maura, ronde comme une baleine, ça me rend malade !

Charles sort en véritable gentleman me tenir la porte de la voiture.

— Je te récupère d'ici une heure ? J'ai des papiers à prendre au bureau pour ma prochaine plaidoirie.

— Parfait.

Mon bureau est en vrac, quelqu'un a mis la pagaille dans mes dossiers, je passe au moins une demi-heure à tout ranger pendant laquelle j'entends les collègues chuchoter sur mon passage mais personne n'ose me parler à part John qui vient déposer quelques dossiers avant de repartir.

— Oly jolie !

— John... Déjà rentré de Highgate ?

— Comment tu sais ?

— Je t'y ai vu.

Il me fait signe de parler moins fort.

— Pourquoi tu as fais ça John ?

Il a un temps d'arrêt et dis un seul mot « partenaire » et je comprends ce qu'il tente de dire, il a fait ce que je n'aurais jamais été capable de faire pour que nous soyons tranquille.

Furbisher est revenu visiblement, il me prend à part.

— John vous a dit qu'à votre retour je vous avais définitivement assignés en tant que coéquipiers ? Ça me fatigue trop d'essayer de vous trouver quelqu'un qui veuille bien travailler avec vous alors qu'il y en a un qui vous supporte.

— Donc vous supposez que je revienne ?

— Vous êtes douée pour ça, pourquoi changer !

— On va faire comme si rien ne s'était passé et ne pas parler de Tom ?

— Oui, c'est à peu près l'idée.

Je fais une moue dubitative et j'hoche la tête en signe d'assentiment. Je lui désigne mon ventre.

— Et ça, on n'en parle pas non plus ?

— Disons que je n'ai pas trop le choix ! Et que ça vous adoucira peut-être le caractère.

Je vois à son regard qui m'évite qu'il a quelque chose à dire qui ne va pas me plaire, j'attends patiemment, j'affiche mon sourire carnassier pour le faire un peu plus flipper.

Il me tend un passeport.

— C'est un faux, je préfère vous prévenir, un faux très bien fait mais qui n'est pas réellement rattaché à une identité.

Je l'ouvre, c'est mon passeport français, au prénom de Lili.

— Nous ne pouvons pas vous ressusciter administrativement parlant, ça soulèverait trop de problème mais ...

— ... Je comprends. Merci.

Je veux qu'il se taise, j'ai toujours su que je ne redeviendrai pas légalement Lili mais ce bout de document m'en donne l'impression et ça me suffit pour le moment. On y a rajouté un prénom, je ne suis plus Lili, Anne, Marie mais Lili, Olivia, Anne, Marie.

Je me lève et lui serre la main avec mon bras valide.

— A bientôt capitaine. Merci de m'avoir sauvé.

— Bon anniversaire Lili.

Il me montre le passeport et je lui souris. Je crois bien que c'est le premier sourire de ma vie que je lui adresse.

J'avais oublié ce que c'était que d'être aimée (TERMINÉ)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant