Je passe la visite à côté de Maura et Murray qui sont réellement passionnés par l'histoire du château. Je remarque que lorsque Murray prononce le nom du château, il le dit d'une autre façon : Ellendonan. Je me demande pourquoi, sans doute est-ce la manière écossaise de le dire ?
Je le trouve presque trop restauré à mon goût mais ce serait vraiment faire la difficile. Je crois que c'est l'un des plus beaux endroits que j'ai jamais vu. Il me semble que je pourrais le visiter comme eux une dizaine de fois sans m'en lasser.
Maura me parle de son fiancé quand nous sortons, elle me raconte qu'il a déjà deux filles avec lesquelles Maura a du mal à créer des liens, surtout avec l'aînée préadolescente. Ça me fait de la peine pour elle car c'est une fille vraiment douce, elle fait à la fois sage et pétillante, je crois que c'était à peu près la façon que j'avais à l'époque de décrire ma petite sœur, Marie. Je suis sûre qu'elles s'entendraient bien.
J'achète juste un porte-clés et une carte postale parce que Calum me presse de sortir. Il en a marre et ce depuis qu'on est arrivé.
Une fois dehors Murray crie pour couvrir le vent.
- Bon, allez, avoue, Sasannach, tu n'es pas photographe ? Ou alors tu es nulle !
Interloquée, je me tourne vers lui, il brandit mon téléphone que j'ai dû faire tomber sans m'en rendre compte, on y voit ma dernière prise de vue, floue et étêtée. J'hésite un quart de seconde à dire que c'est un style en le prenant de haut mais ce serait vraiment le prendre pour un con.
- Non, j'avoue, Cal a menti je ne suis pas photographe, il a dû penser que ça vous plairait plus que mon vrai métier.
Ils me regardent tous, attendant la suite mais je ne dis rien, je me contente de sourire.
- Vous pouvez toujours tenter de deviner !
- Calum ! Pourquoi tu nous as menti ? Tu as mis ta chérie dans l'embarras.
Ça, c'est Cécile qui n'apprécie pas tellement le mensonge de son fils. Keith qui ne manque pas une occasion de prendre son frère à parti ajoute, laconiquement.
- Parce qu'il ment comme un arracheur de dents maman. Même petit, Stuart le disait tout le temps.
Outch ! Utiliser le petit frère mort pour s'en prendre à Cal, je ne cautionne guère et Cécile non plus visiblement.
- Keith ! siffle-t-elle trop tard.
- Espèce de connard, je vais te refaire la face !
Déjà Cal a sauté sur son frère pour lui coller une droite. Je les observe quelques secondes se battre avant de me décider à intervenir. Je prends la bouteille d'eau de Maura et jette le contenu sur eux.
Calum recule et s'apprête à recommencer mais je me mets devant lui.
- Pousses-toi Oly, sinon tu vas en prendre une à sa place.
-Tu sais que j'aurais le dessus Cal !
- C'est ce qu'on va voir.
Son beau visage est déformé par la rage, je ne le reconnais plus mais je n'ai pas vraiment le temps de m'attarder la-dessus car je vois son poing partir en direction de mon visage. Il n'a pas le temps d'arriver que je l'ai déjà mis à terre. Il se tient le nez et jure.
Je me retourne et regarde les Alister au complet qui nous dévisagent. Murray s'esclaffe.
- Je veux bien être pendu si tu es photographe, petite. Cal relève-toi et cesse de faire la mauviette, tu étais prêt à frapper une femme ? Je pourrais te renier pour moins que ça.
- C'est tout sauf une femme normale, papa.
Cal est rendu à mes côtés, il me jette un regard noir et voyant que ça n'a pas d'impact sur moi, il se déride et me sourit.
- Épique, non ? Ta première visite dans la belle-famille !
C'est à mon tour de rire, je lui donne un coup de coude dans les côtes.
Un peu plus loin, Keith se frotte le menton et lui lance.
- Tu as un vrai problème de comportement, tu le sais ? Il faudrait que tu consultes.
- Si tu arrêtais de m'emmerder Keith, ça irait beaucoup mieux.
Les deux frères semblent faire une sorte de trêve mais Murray reste choqué par le geste que son fils a eu envers moi. Je remarque alors tout le reste de la journée que Cal n'a pas menti, Murray est très dur avec lui, il ne lui lâche rien. Ça me déroute, je me sens devenir protectrice envers mon ami.
Quand nous sommes seuls le soir, je l'observe alors qu'il téléphone à Charles. Il a vraiment l'air d'avoir besoin de réconfort. Je vois pour une des premières fois que leur amour est réciproque mais je comprends en même temps que Calum risque de n'être jamais prêt à s'avouer à sa famille, il y a trop de non-dits ici.
- Je t'aime aussi, mon amour.
Il raccroche et se couche, roulé en boule, je traîne encore un peu puis je le rejoins et pose ma tête contre son dos en passant mes deux bras autour de lui.
- Cal, tu as trop de colère en toi, ça te ronge, tu devrais faire la paix avec ton frère.
- Qu'est-ce que tu lui trouves franchement ? Parmi tous les hommes que tu peux choisir, ta préférence va au pire.
- C'est drôle, c'est presque mot pour mot ce qu'il m'a dit ce matin, vous n'êtes pas frères pour rien.
- Tu ne réponds pas à ma question.
Ma gorge se noue.
- Déjà physiquement, il me plaît beaucoup, j'adore sa fossette quand il rit, sa cicatrice lui donne beaucoup de charme et je crois que je n'ai jamais vu d'aussi beaux yeux que les siens. C'est un homme qui a beaucoup d'humour quand tu le connais...
- Parce que boire un café tous les matins avec lui te donne l'impression de le connaitre ?
- Tu as posé une question, si la réponse te déplaît tu peux me le dire gentiment.
- Non vas-y, poursuit-il, boudeur.
- J'ai l'impression, en tout cas, qu'il me connait et que c'est réciproque. Et Keith est quelqu'un d'attentionné il me semble, il m'a offert une boite de macarons, l'autre jour.
Cal rit doucement. Je sais ce qu'il pense, que c'est mièvre alors je me tais. Il n'a pas besoin de comprendre. Mais au lieu de se moquer, il se lève et va récupérer un sac dans un coin.
-Je crois qu'il t'apprécie également. Il est venu s'excuser tout à l'heure, il m'a donné ça pour toi en disant que je pouvais m'en attribuer le mérite.
- Qu'est-ce que c'est ?
-Je ne sais pas, il m'a tellement énervé au château que je n'ai pas cherché à épiloguer.
J'ouvre délicatement le sac qui vient de la boutique d'Eilean Donan Castle et attrape un C.D. de musique écossaise. Je retourne le disque et souris bêtement.
- Je retire ce que j'ai dit, visiblement rien qu'en prenant le café ensemble, il te connait bien.
Cal m'attire contre lui et me frotte la tête avec son poing. C'est, je crois, le geste le plus attentionné qu'il ait eu pour moi depuis longtemps.
-Fais attention à ne pas te brûler les ailes avec lui, tu pourrais tomber amoureuse.
Il n'en dit pas plus car nous savons tous les deux que je n'ai pas d'avenir sentimental.
- Ne t'inquiète pas, je ne ferai pas de mal à ton grand-frère.
Il se garde de me rétorquer que c'est pour moi qu'il s'en fait car une part de lui doit savoir que je l'ai percé à jour. Malgré leurs attitudes et leurs dires, je sens que Cal tient au moins un tout petit peu à son frère.
VOUS LISEZ
J'avais oublié ce que c'était que d'être aimée (TERMINÉ)
Literatura FemininaJe suis plutôt du genre à être au mauvais endroit au mauvais moment. La preuve en est je suis passée de Lili à Olivia. De l'ado rebelle et révoltée à témoin sous surveillance, solitaire et déjantée. Aujourd'hui je vis - que dis-je ? - je tiens la ch...