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Bug Wattpad, certains d'entre vous n'ont pas eu la notification, mais il y a un chapitre sept que je vous conseille de lire avant celui-ci.
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Il fait beau et chaud dehors, et avec un pull, on a vite fait d'avoir chaud. Autant dire que, si je ne m'en plains absolument pas, Damien remarque mon problème et ne se prive pas de me faire remarquer qu'il avait raison. Je ne réponds rien, mais j'en ai envie. De lui dire que je sais qu'il avait raison. Que je le savais quand j'ai dit que je préférerais les pulls aux t-shirts.

Je soupire quand il me nargue à nouveau en me disant qu'il fait chaud.

-Damien...

Il rit puis remarque ma tête qui ne rit pas du tout.

-Éh faut pas faire la gueule Toto, je te taquine, c'est tout !

-Je sais.

Je replace mon sac en bandoulière sur mon épaule. Il est vide, évidemment, j'ai beau avoir des vêtements en plus par rapport aux premiers jours, il est inutile que je les prenne avec moi dès que je sors. Et si je prends un sac vide à chaque sortie, c'est juste parce je l'aime beaucoup. En plus, Damien dit que ça me donne un air d'étudiant hyper occupé, puisque j'ai tendance à marcher vite et à avoir un air blasé à partir du moment où je suis perdu dans mes pensées.

Le bleu s'arrête et pose notre sac de course à ses pieds, puis il s'accroupit et cherche dedans.

-Qu'est-ce que tu fais ?

Il sourit légèrement sans me regarder. Puis il sort un paquet de fraises Tagada qu'il a acheté un peu plus tôt, l'ouvre avant de me le tendre.

-Tiens, c'est pour toi.

Je le prends sans rien dire, je ne peux retenir un léger sourire.

-En quel honneur ?

-Depuis qu'on est sorti du magasin, t'as pas l'air de bonne humeur. Il paraît que le sucre, ça aide à rendre heureux.

-Sérieux ?

Il hausse les épaules.

-Ça dépend des gens. Mais à mon avis, ça ira pour toi.

Il se relève, puis étire un peu ses bras. Moi je commence à manger les sucreries, comme si je découvrais un autre monde. C'est vrai que depuis que je suis là, je n'ai pas encore mangé ce genre de chose, puisque je me contente de deux repas par jour.

-Tu veux pas qu'on rentre maintenant ? Ça fait un moment qu'on traîne par ici...

Je fronce les sourcils et regarde autour de moi. Je n'ai pas de souvenir récent de ce quartier, pourtant il me dit quelque chose.

-Quoi... ?

-Thomas, t'es sûr que ça va ? Ça fait une heure qu'on marche dans le coin. Je sais que tu aimes te promener ces temps-ci, je voulais pas te demander de rentrer trop vite.

Mes bras me démangent, un frisson remonte ma colonne vertébrale. Ma tête tourne un peu. Je ne réponds rien, je ne comprends pas comment j'ai fait pour nous mener ici.

Pourquoi cette rue ? Pourquoi ce souvenir ? Pourquoi lui ? Pourquoi moi ? Pourquoi elle ?

Une porte qui claque, mes pas qui s'éloignent et sa voix qui me poursuit.

Je déglutis, Damien tire ma manche.

-Éh. Viens, on rentre.

Ses coups qui me mettent à genoux, ses insultes qui m'achèvent ; mon amour pour elle, devenu illusion, disparaît le temps d'un instant. Lucide, je fuis.

J'ai fui.

Mon cerveau se braque, mes membres ne répondent plus, j'entends Damien sans le voir. Ma vie fuse et disparaît, je me mélange avec le passé que je ne demandais pas et le présent auquel j'ai toujours aspiré.

-Viens...

Je sens sa main, chaude et rassurante, glisser sur la mienne. Lui, ce n'est pas elle, et il ne l'a jamais été. Alors même si je suis effrayé, ça n'a rien avoir avec lui. Je le laisse donc m'emmener chez lui, chez moi.

Je veux oublier, que mes souvenirs s'effondrent à nouveau pour que je puisse continuer à me sentir léger.

Mes yeux sont fixés sur la main de Damien qui sert la mienne. Il me fait presque mal, pourtant je suis un peu rassuré. Il ne me laissera pas ici. Il ne me gardera pas de force.

Je lui ai fait confiance dès le premier jour à ce grand soûlard bleu. Assez confiance pour lui laisser ma vie d'avant à son insu, assez confiance pour remplir le vide de son appartement. Je ne vois pas pourquoi ça changerait aujourd'hui, pourquoi ça devrait changer.

Je suis perdu dans mes pensées plus longtemps que je ne le crois, le paquet de bonbons, toujours dans ma main, est complètement compressé. Je reprends un peu mes esprits quand le brun me pousse sur son canapé.

Il lâche ma main, puis prend l'autre pour essayer de déplier mes doigts de sur le paquet, je le regarde faire sans rien dire, comme si j'étais autre part. Je pense plus à lui qu'à ce qu'il fait dans l'immédiat.

Il a l'air de savoir ce qu'il fait, et en faisant un petit effort, je l'entends me répéter de bien respirer, je l'entends me donner l'exemple. Il est si calme...

Je comprends que je ne le suis pas.

Respire Thomas.

-Respire. Voilà, comme ça c'est déjà un peu mieux, continue.

Il déplie enfin mes doigts et pose le sachet plastique un peu plus loin. Ensuite, il s'assied à côté de moi et me rapproche de lui un maximum. Ma tête se retrouve sur son épaule, mon front contre son cou. Mes bras sont contre mon torse, mes genoux sont presque sûr ses jambes, et il continue de respirer fort, lentement.

Pour me donner l'exemple... ?

Ainsi installé contre lui, un peu comme un bébé, je sens mon souffle se calmer. Je sens mes larmes finir de couler, je sens que j'ai tremblé et donné plus d'énergie que ce que je croyais.

Je ferme les yeux un court instant. C'est ça la vie. Avec Damien ou non. C'est sentir le contrôle qui meurt et revient dès qu'il le décide, c'est sentir la souffrance qui bouffe l'esprit de temps à autres et sentir que le bonheur ça rend heureux. C'est la légèreté de la fatigue. La vie, c'est de se sentir vivant.

J'étais mort avec elle, j'ai survécu à cette mort dès que la lucidité m'a frappé. Je suis devenu vivant quand Damien m'a ouvert sa porte.

Avec ça, je peux me dire que les souvenirs, c'est juste optionnel. Je veux bien oublier, me souvenir un jour sur deux, tant que je suis vivant.

Vivant avec lui ?

Le temps passe, et il ne dit rien. J'attends un peu de sentir l'énergie me revenir, puis je m'écarte un peu afin de le pousser. Je le pousse à s'allonger, et ne dis rien face à son incompréhension.

Je m'assieds sur ses cuisses et le regarde droit dans les yeux. Ma main se pose sur sa poitrine et, la bouche entrouverte, je ferme encore les yeux.

C'est bizarre comme situation, pour lui, pour moi, pour n'importe qui, pourtant c'est si simple. C'est de l'amour silencieux, de la fatigue commune.

C'est lui, c'est moi. Juste son cœur qui bat et mon âme qui cogite.

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Je suis vraiment satisfait de celui-ci. J'espère qu'il vous plaît à vous aussi !

«Y'a des moments de vie un peu con qui marquent les esprits. Qui sont tout et rien en même temps. Avec certaines personnes, y'a que des moments comme ça.»

Traces d'encreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant