Je me réveille en douceur, dans un lit. C'est si confortable. Je m'étire tout doucement, un bras après l'autre, une jambe après l'autre. La lumière rentre à peine dans la pièce, et dès lors que j'inspire par le nez et que je sens l'odeur des draps, je comprends que je ne suis pas chez moi.
Je me redresse lentement, je n'ai pas changé de vêtements pour dormir, j'ai toujours ce vieux jeans délavé et un pull affreux et trop grand pour moi qui tient à peine chaud tant le temps l'a usé.
Je me souviens rapidement de la veille, moi qui pensais un peu l'avoir rêvé, non. L'inconnu bleu est juste à côté de moi, assis en tailleur à m'observer. Je commence à trembler, je ne sais pas ce que c'est, la peur ? Lui semble à peine comprendre.
-On a baisé ? m'interroge-t-il.
Pourquoi toujours ce sujet ? Pourquoi il pense ça ? Ça se voit sur mon visage que mon corps n'est respecté par pas grand monde ? Alors à nouveau, je me tais, parce que non. La veille, je l'ai vu s'échouer dans les escaliers plusieurs fois d'affilée sans prendre la peine de l'aider. La veille, nous sommes rentrés et il m'a laissé faire comme chez moi en silence. Je me suis allongé dans son lit double et l'ai entendu dégueuler dans une pièce voisine. Puis après un long moment il est arrivé et s'est entièrement déshabillé avant de s'effondrer sur le matelas.
Je ne sais même pas son prénom, lui ne sait pas le mien non plus. Quand j'y pense, je ne suis pas sûr de me souvenir de comment je m'appelle. Alors j'espère, je croise les doigts pour qu'il ne me pose pas cette question, qu'il ne cherche pas à savoir qui je suis et pourquoi j'ai l'air d'un ado qui vient de fuguer.
-J'en déduis que non. Pourquoi t'es là alors ?
-Parce que je t'ai demandé pour venir.
Il a beau être sobre maintenant, il n'est toujours pas capable de me regarder droit dans les yeux, moi non plus, je le fais juste quand il a les yeux autre part que sur moi.
-Évidemment.
Un silence s'installe, je me sens mal à l'aise, et un rire, d'abord léger, naît du fond de mes entrailles, grandit. Le bleu me regarde, étonné de mon fou rire inexpliqué. Et plus je rigole, moins il y comprend quelque chose. Je pleure de rire et je me tiens les côtes, comme si j'allais les perdre en me marrant si fort.
L'ambiance change d'un coup, je vois au travers de mes larmes que quelque chose se débloque chez lui. Je le vois sourire, et quand je m'essuie les yeux pour voir, je vois les siens. Nos regards se rencontrent et je vois que quelque chose était éteint, que ce quelque chose est allumé maintenant qu'il sourit et qu'il contient son rire.
-Ok, dit-il en riant un peu. Dès que tu seras calmé, tu voudras un truc à bouffer ?
Il n'obtient pas de réponse, pourtant je le vois s'en aller en gloussant légèrement.
Je me dis qu'il doit être au moins tout aussi taré que moi pour ne pas trouver ma présence vraiment étrange. Après tout, j'ai un fou rire incroyable, juste parce que je me sens gêné. Puis je me dis qu'il doit se trouver tout aussi dingue que je l'imagine.
Au bout d'un moment, je me lève. Il fait chaud dans cette petite chambre et j'ai besoin d'air. Jolie chambre d'ailleurs. Le lit prend pratiquement toute la place, les murs sont blancs et il y a des photos accrochées au mur. La deuxième chose qui prend le plus de place est un bureau. Une table recouverte de feuilles et d'objet semblant destinés à prendre simplement de la place. Il y a un ordinateur au beau milieu de tout ce bordel. Quand j'y pense, sa chambre est un énorme bordel, elle aussi. Amusant.
Je sors de la pièce, je me rends compte rapidement que je ne fais aucun bruit, vieille habitude. Je me mets donc à en faire, peut-être bien trop. Je tape des pieds en avançant dans le couloir et m'arrête dès que je vois le brun aux yeux bleus.
-Pourquoi tu fais du bruit comme ça ?
Je hausse les épaules.
-J'ai soif.
Il me regarde en penchant la tête très légèrement. C'est imperceptible et je trouve ça charmant. Mais je comprends que son intrigue est due au fait que j'ai répondu à côté de la plaque.
-Désolé, j'ai presque rien. De l'eau ça te va ?
Silence, il répond à sa question lui-même en se tournant pour me servir un verre.
-Je t'ai dit que tu me disais un truc hier.
Il pose le récipient sur la table qui nous sépare. Je souris sans comprendre. Je me souviens de notre première conversation mieux que lui après tout, je ne vois pas ce qu'il veut m'apprendre.
-Pendant que tu dormais j'ai eu le temps de me demander qui t'étais et ce que tu foutais là.
-J'ai dormis longtemps ?
-On est en plein milieu de l'après-midi, alors ouais. Mais c'est pas ça le sujet.
Elle ne me laissait jamais vraiment dormir. Je me reposais dès qu'elle s'écroulait dans le lit, après qu'on ait baisé ou après qu'elle ait bu un bon coup. Je frissonne.
Ferme-la, ne te souviens pas.
-Tu dois absolument pas te souvenir de moi. On était vaguement pote il y a longtemps... dans une autre vie.
Je me dis qu'il est étrange lui aussi, une vie moi j'en ai qu'une seule.
-Je... je sais pas. Si tu le dis.
J'aime bien cet inconnu, j'aime bien son appartement lumineux. Mais je ne comprends rien. Il ne voit pas mon désarroi, évidemment je dois arborer une autre expression. Tant pis.
Il rit quand le silence reprend place, et après un instant, il dit :
-Toi, t'as l'air encore plus paumé que moi dans la vie.
-Bah c'est pas faux, je sais même pas où j'suis.
-Du tout ?
-Du tout.
-Tu parle juste de mon appart' rassure-moi ?
Je me penche légèrement en avant en m'appuyant sur la table. Puis je souris.
-J'ai oublié pas mal de chose.
Ça me rend un peu triste. Beaucoup. Mais c'est pas si grave au fond, parce que je n'ai plus de chez moi et que ça signifie que je n'ai plus de "chez elle".
Son regard me sonde à nouveau et je rive les yeux vers le sol puis il soupire et je redresse la tête. Je le vois se passer une main dans les cheveux. Puis il prend le verre qui m'était destiné et le boit d'une traite. Je comprends qu'il me croit.
-Eh bah putain, lâche-t-il finalement.
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Je ne crois pas que la musique ai un réel rapport, mais elle me plaît.
«Je m'accorde l'audace de penser de temps à autre à un monde différent, un monde plus réel, ou moins censé. C'est en petite partie de ça que mon bonheur vit.»
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Traces d'encre
Любовные романы«Je pense qu'une histoire n'est jamais trop courte, Parce qu'entre la fin de la guerre et le début de l'amour, Entre la mort et la vie, Entre les mots et les lettres, Il y a l'infini.» Cette histoire est une fanfiction de type Terraink, bisous aux h...