10 | c'était un méli-mélo

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Je n'arrive pas à dormir bordel. Tous les événements de la journée se ressassent dans ma tête, et je ne peux empêcher un sentiment inconfortable de se loger dans mon ventre. Je repense à Salsa. Notre relation est pourtant suffisamment forte...enfin je le pensais. C'est comme si elle m'avait poignardé dans le dos, elle était si douce, si protectrice, son sourire enjoliveur me l'a bien mis à l'envers. Des larmes viennent se loger aux creux de mes yeux, et ma bouche se tord sans que je ne puisse contrôler quoi que ce soit.

Je déteste les relations humaines. Les gens sont toujours là à vous faire des coups foireux, à profiter de vous, et la seule fois où l'on accorde sa confiance à quelqu'un (c'est-à-dire lors du mariage) tout n'est basé que sur du superficiel. Je comprends à présent ce que peuvent ressentir mes parents, ou même toutes les personnes qui se disent amis.
Les amis n'existent pas, ce n'est qu'un statut idiot pour se réconforter dans l'idée que l'on n'est pas seul. Sauf que bordel, nous sommes tout sauf accompagnés ! L'homme est fait pour vivre seul, et la communauté ou même la société ne sont que des idéalisations pour nous rassembler. Ce qu'il se passe en ce moment n'est là que pour me réconforter dans ma situation.

Mes parents ne veulent qu'une descendance digne, un enfant qui frôle la perfection, poli, bon élève, sans problème, qui ne touche pas à l'alcool et, pour qu'il soit fort et viril, qu'il fasse du sport. Salsa ne m'a utilisé qu'en tant que réconfort pour panser sa vie pourrie, et pour Barnabé je ne suis qu'un moyen de garder sa fille et ramener de bons classements au club.

J'en ai marre. Je suis lessivé. Je veux partir de tout ce merdier.

Je regarde mon téléphone : cela fait trois heures que Noah m'a envoyé le message qui précise ce que je suis supposé faire pour avoir les infos.

From : Source d'infos
To : Me
"Deviens mon petit ami."

J'avoue que sur le coup j'ai tiqué. Noah est gay ? Il y a pourtant pas mal de belles filles qui sont sur lui. Il m'a encore plus perdu avec son message, il me fait penser à un stalker. Je ne suis pourtant pas une pute, mais j'ai toujours pas répondu. Tout se mélange tellement que je sais plus quoi faire. C'est dans ces moments là que j'aurais besoin de l'aide de Salsa...Qu'est-ce que je raconte ?! Je suis tellement troublé que mes pensées ne sont plus cohérentes, il serait temps pour moi de dormir.

()()()

Me connaissant parfaitement, je savais que n'allais pas réussir à dormir.

Je n'ai pas dormi.

Mon magnifique visage est à présent moins attrayant, des cernes entourent mes yeux bridés - alors que je ne suis même pas asiatique, allez comprendre le délire de mes gènes. Je soupire, je sens déjà la mauvaise journée venir. En même temps après ce qui s'est passé, même Voldemort pourrait sentir que je baigne dans un merdier bien profond.

Alors que je verse mes Muesli dans mon bol, je me fais interpeller par Luce, ma mère :

"Calum tu es tout cerné et tu as les yeux rouges ! Tu n'as pas dormi ?!
- Qu'est-ce que ça peut te faire...je marmonne en mâchant mon met préféré.
- Qu'as-tu dit ?" s'énerve-t-elle avec un ton plus aiguë que d'habitude.

D'un coup, je perds le contrôle.

"Je t'ai demandé ce que ça pouvait te faire putain !
- Calum, je refuse que tu me parles ainsi !
- Ah oui ? Sinon quoi ?"

Je n'ai pas le temps d'en dire plus que je sens une grosse main me gifler. Cette manière peu délicate, ça ne peut être que mon père.

"Ah, bizarrement tu n'es jamais là pour t'occuper de moi mais pour me gifler ça y va !
- Ferme ta gueule, lâche mon paternel en s'asseyant à la table comme si de rien n'était.
- Arthur ! s'offusque ma mère. Pourquoi tu l'as frappé ?!
- Tu veux la même chose ?" il demande avec dédain.

Mon père m'énerve. Ma mère aussi. Ils ont perdu mon respect depuis bien longtemps, si vous saviez.

"Arrêtez !"

Il lève son nez de sa tasse de café brûlant pour me regarder.

"J'en ai marre de vous !"

Elle fronce les sourcils de façon peu élégante.

"Tu te moques de nous ?" demande ma génitrice.

J'envoie valser mon bol à l'autre bout de la cuisine avec un air de défi.

"Tu es bourré ?" questionne mon paternel.

Je ris à sa question stupide. Si il me connaissait il saurait que boire est bien loin de mes occupations. Mais si ça peut rendre furieux mes parents, que j'aille me prendre une cuite dans un bar !

"A partir d'aujourd'hui, je vais faire tout ce que vous détestez. Tout.
- Arrête ça tout de suite ! tente de me raisonner ma mère avant que mon père ne se serve de ses poings pour me faire taire.
- Au fait papa, je suis gay. J'ai un petit ami, et il s'appelle Noah."

Aussitôt mes mots sortis, je suis frustré de balancer des bobards, mais voir le visage de mon géniteur se décomposer est la plus belle chose du monde. Il lève les yeux au ralenti, la mine choqué et n'ose plus rien dire.
Ma mère fait une syncope :

"Chéri c'est...c'est une blague hein ?"

Mes parents sont assez fermés sur le sujet, surtout Arthur, l'homme que je considérais jusqu'à présent comme la pièce maîtresse de la figure parentale.
Il ne peut pas voir en peinture les homosexuels ce con, suppôt de Satan tel il aime les appeler. Il est abject de jouer le rôle du bon catho, ça en devient même dérisoire quand on sait ce qui se passe derrière les murs.

Je suis d'un coup fier de le rendre furieux, bien qu'en réalité je n'aie jamais été attiré par qui que ce soit dans ma vie. Je ne déteste pas un genre en particulier, mais les humains. Je ne vais pas me mettre dans une case "aromantique" ou "pansexuel" pour être reconnu socialement par une certaine communauté et trouver des gens comme moi.

Ma mère crie d'effroi en voyant mon père se lever, et je ne manque pas de paraître sans expression, imposant un énorme mur de glace entre nous.
Mon géniteur a sa force, et moi mon indifférence.

Il détache sa ceinture mais je suis heureux : j'utilise Noah, me prouvant que les relations humaines ne servent qu'à utiliser l'autre pour parvenir à ses fins.

fleur rouge ✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant