****Partie 3****
**Maréme Diatta**
Je me dépêche de partir. Mes deux filles sont seules dans la chambre que j'ai prise en location. Certes elles ont l'habitude de rester seules mais aujourd'hui Daba la dernière qui vient d'avoir dix ans est malade. Depuis quelques temps, elle a le corps chaud et elle délire la nuit. Ma meilleure copine qui est comme moi dans le trottoir m'a recommandée un grand marabout très réputé dans les villages environnants de Fatick. Ces tarifs sont chers raisons pour laquelle je patiente un peu le temps de rassembler une certaine somme.
Je m'appelle Maréme et j'ai trente deux ans. Je suis mère célibataire et je vis à Saly avec mes deux filles. L'ainée a treize ans et l'autre dix ans. Elles sont de pères inconnus. Je suis une prostituée et j'assume mes choix. J'ai quitté ma Casamance lointaine pour venir ici où je peux faire ma vie ce dont je veux sans rendre de compte à personne. Mon père est un pur traditionnaliste et pour lui, une fille, dés qu'elle a quinze ans doit se marier et je me suis retrouvée marier la veille de mes seize ans avec le riche commerçant du quartier contre mon gré. J'étais la troisième femme de mon mari et au début du mariage, j'étais sa préférée, il me passait tous mes caprices et mes parents étaient désormais considérés comme des notables dans le village. Mes coépouses qui avaient des enfants plus âgés que moi, ne pouvaient plus supporter une pareille situation. Alors elles ont commencé à chercher des marabouts pour nous séparer et ce qui devait arriver arrivât. Notre mari prit une quatrième épouse et me délaissa. Il pouvait faire des semaines sans visiter ma chambre et s'il le faisait, il passait la nuit à me battre pour n'importe quel prétexte. J'ai commencé à me taper son neveu qui vivait à la maison, ensuite quand son fils ainé nous surprit un jour, lui aussi je me le tapais pour qu'il ne me dénonce pas. Ce petit jeu entre le neveu et le fils ainé a continué un bon temps jusqu'au jour où, à l'improviste, mon mari a ouvert la porte de la chambre en plein milieu de la nuit et m'a trouvé avec les deux sur le lit conjugal. Pour éviter de me faire lyncher, j'ai pris le peu de bagages que j'ai pu et une importe somme d'argent dans son coffre et j'ai quitté la maison. J'ai d'abord fréquenté les auberges touristiques un bon bout de temps de la zone et j'ai pris le gout de l'argent facile et j'ai atterri comme ça dans le plus vieux métier du monde. J'ai quitté la localité pour venir à Saly avec un blanc qui m'a hébergée pendant des mois. Le seul hic, il avait oublié de me dire qu'il est marié et un beau matin, sa femme est arrivée à la maison et m'a trouvée dans son lit et m'a donnée la correction de ma vie. Avec l'aide des deux vigiles qui ne m'appréciaient pas, elle m'a tellement frappé que j'ai du fuir presque nue la maison. Ce sont les femmes qui allaient au marché qui m'ont sauvé et m'ont donné des habits décents pour m'habiller. Depuis ce jour, je vis dans le village et j'ai eu mes deux filles. En un certain moment, j'ai pensé arrêter mais que vais-je faire pour nourrir mes filles. J'étais très belle mais la dépigmentation a transformé mon visage et je ne ressemble plus à rien du tout maintenant. Avant, en une nuit, je pouvais rentrer à la maison avec tellement d'argent que je n'en savais plus quoi faire mais maintenant, si j'ai deux mille francs, je suis heureuse tant mes clients se font rares. Il m'arrive de rentrer sans rien du tout et de regarder mes filles allaient manger chez les voisins. Elles sont scolarisées dans l'école publique du quartier et la cadette est très intelligente pour son âge même si elle est très maladive. L'ainée par contre n'a plus la tête aux études. Depuis qu'une copine de classe, en pleine dispute, lui a jetée à la faire que je suis une prostituée, elle fait l'école buissonnière et ses notes chutent de manière inquiétante. Le proviseur allait d'ailleurs l'expulser mais quand je suis allée sur place, il s'est trouvé que c'est un de mes clients donc il ferme les yeux maintenant.
**Sylvie**
Je ne savais pas que la vie pouvait être aussi dure. Depuis mon mariage, j'ai plus des nouvelles de mes parents. J'appelle souvent mais dés que papa me salue, il raccroche le téléphone et maman, elle, ne me répond même pas. Trois ans que je suis mariée et je dois dire que je suis passée par beaucoup d'épreuves. La plus terrible est que jusqu'à présent, je n'ai pas pu avoir d'enfant. Chez nous africain, on oublie que l'enfant est un bonus dans le mariage et non un cadeau qu'on se donne soi-même. Si je pouvais me le donner, je l'aurais fait depuis longtemps. Mon mari ne me met pas la pression, au contraire il me soutient et va en consultation de même que moi. Ma belle-famille est un autre problème. Je n'arrête pas d'essuyer leurs paroles blessantes à longueur de journée. Ma belle-mère est la pire de tous. Mon beau-père lui refuse maintenant de manger ma cuisine sous prétexte que je ne suis pas musulmane comme le reste de la famille. Si je venais souvent en week-end, maintenant je me fais rare de plus en plus. Mes deux belles-sœurs qui sont encore à la maison se sont mises dans la danse et je respire de moins en moins d'air quand je viens les voir. De ce fait, je reste à Kaolack où je travaille et c'est Lamine, qui a maintenant une affectation au lycée Coumba Ndofféne Diouf de Fatick qui fait souvent le déplacement. Je souffre de cette situation mais est ce de ma faute si je tarde à enfanter. J'ai fait le tour des gynécologues et des marabouts de la contrée mais on me dit de mon coté comme du coté de mon mari, il n'y a aucun problème donc je dois juste patienter en attendant dieu.