Chapitre 8

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Mardi 13 juillet – Ean


Etait-il réellement nécessaire de préciser qui était la personne qui m'appelait ? Je frémis à l'entente de tout cela, complètement désemparé. Je ne m'attendais à rien de ce genre. Les rappels n'étaient pas tellement ce que j'appréciais par-dessus tout. Je fermai lentement les yeux avant de me tourner vers Aiden qui me fixait avec inquiétude, lui intimant de ne rien dire, parce que je craignais que le moindre mot de sa part pourrait empirer sa situation. Il hocha lentement la tête et s'assit tranquillement sur son siège, les couleurs de son visage disparues. Je détestais le voir aussi démuni. Mes lèvres se pincèrent, et j'hésitai longtemps entre raccrocher et répondre. Sauf que j'avais peur qu'il tuât mon frère si je n'accédais pas à sa parole. Donc je me contentai simplement de lui répondre sur le ton le moins sec possible, pour paraître plus calme que je ne l'étais réellement. Je ne voulais pas lui donner ce plaisir de sembler fébrile sous sa menace.

-C'est difficile d'oublier quelqu'un dont l'ombre plane sur sa famille.

-C'est bien, Ean. C'est très bien. Tu ne dois surtout pas m'oublier. Car je suis la personne qui détient la vie de ton frère entre ses mains, et surtout, je suis le seul à même de décider qui sera le prochain sur ma liste. Ce pourrait être ce très cher Aiden ? Ou ta très bonne maman. Ou peut-être l'une de tes sœurs ? Lauren ou Lexy ? Laquelle tu préfèrerais voir partir en premier, Ean ?

-Je t'interdis de toucher au moindre cheveu d'une de mes sœurs. Je ne te donnerai que cet avertissement. Mais comme je sais que tu ne voudras pas en faire usage, je vais faire comme si je ne te l'avais pas donné et faire en sorte de te buter avant que tu ne puisses même essayer de tendre la main vers une mèche de Lauren, Lexy ou Lorelei.

Pour toutes réponse, j'eus droit à un rire qui me glaça les veines, qui me détruit les tympans et ne me rassura guère. Earl se mit à hurler mon prénom en arrière-plan, et je ne savais pas ce qu'ils lui faisaient, mais ses cris s'estompaient et devinrent aussitôt que des souffles. Enfin, je ne savais même pas si « souffle » était vraiment la meilleure chose pour qualifier ce silence. Parce que je ne savais pas, encore une fois, ce qu'ils faisaient subir à mon petit frère. Mes dents se serrèrent et grincèrent, ce qui, pour une fois, ne m'irrita même pas. J'étais bien trop préoccupé par mon esprit qui me torturait d'images violentes et qui me paraissaient même irréelles pour faire quoi que ce soit ou penser autre chose.

-Je sais que ta famille est à Denver, Ean. Tu ne me berneras pas ainsi. Si tu crois que c'est en l'éloignant de moi qu'elle sera inatteignable, tu peux me croire, ce n'est pas le cas. J'ai des yeux partout, j'ai des oreilles partout, et tu serais surpris de savoir que j'ai toute une armée derrière moi pour me protéger et qui travaillent pour moi. J'ai eu tellement de temps pour me remettre de ma blessure et pour mettre en place ce temps que rien ni personne ne pourra plus m'arrêter, désormais. Tu ne trouveras jamais où je suis, tu ne sauras jamais ce que je fais, tu ne sauras rien.

Alors qu'il parlait, j'étais allé dans le couloir en tendant le fil au maximum et fis signe à Willhem de localiser l'appel, ce qui eut don de le faire blêmir et bouger pour aller trouver une personne qui pourrait le faire. La première fois, il n'avait pas réussi à le faire parce qu'il n'en avait pas les compétences et parce qu'il avait été seul, mais ce jour-là, la salle de réunion était déjà presque pleine et il y avait quelques experts en informatique qui pourraient me rendre ce service. Encore fallait-il qu'ils fussent assez rapides et qu'ils ne dissent rien sur mon plan de localisation puisque sinon, tout tomberait à l'eau. Je revins à ma place et Aiden releva les yeux vers moi. Ses doigts se pliaient, se dépliaient, se trituraient, s'emmêlaient... Je n'avais jamais vu autant de signes d'anxiété sur son visage. Il me fixait comme si j'étais en train de me faire menacer d'une arme, et je pouvais lire l'hésitation noyer ses beaux yeux foncés. Celle d'intervenir et celle de rester à sa place et patienter, ce qu'il fit finalement et qui m'arrangea tout autant.

II. Aliénation [Boy x Boy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant