Comme bon nombre de ses concitoyens, Elisabetta fut surprise à la fin du mois d'août 1942 en apprenant que les troupes anglaises et canadiennes avaient tenté de débarquer sur les côtés françaises à Dieppe.
A Corti, les conversations sur une nouvelle tentative des Alliés étaient nombreuses : beaucoup se demandaient si la Corse n'allait pas voir apparaître des troupes anglaises sur son sol afin de tenter une nouvelle opération.
Mais ce furent les uniformes italiens qui, un jour de novembre 1942, apparurent au loin sur la route en provenance de Bastia.
Leandru et Elisabetta, qui s'étaient retrouvés clandestinement en haut de la citadelle de la ville, virent arriver des unités motocyclistes, des patrouilles cyclistes, des chars légers, des autos blindées et des soldats à pied. Terrifiés, les deux jeunes gens se dépêchèrent de rentrer chez eux et, avant de quitter la jeune fille, Leandru lui adressa quelques recommandations :
- Soit prudente. Demande à Matteu de ne pas se lancer dans des activités illégales comme il le faisait avant. Oui Lisa je suis au courant. Je ne veux pas qu'il soit arrêté et qu'il te laisse seule chez toi. Ces hommes...ils vont réquisitionner des maisons, ils vont...s'installer partout. Fait attention à toi Lisa, s'il te plait.
Elisabetta acquiesça et elle embrassa tendrement son compagnon. Puis lorsqu'elle vit sa silhouette disparaitre dans les petites ruelles de la ville haute, la jeune fille frissonna. Non seulement, elle n'allait plus du tout être libre de circuler où bon lui semblait mais en outre, les moments qu'elle passait avec Leandru et qui étaient déjà très rares allaient sans doutes être réduits à presque rien.
Elisabetta rentra tout essoufflée chez elle : elle trouva son frère, Caterina et sa fille attablés dans la cuisine et sans prendre le temps de vraiment reprendre sa respiration elle dit :
- Les....Italiens...les soldats...ils...sont ici...à Corti.
Matteu dévisagea sa sœur horrifié :
- Mais...mais ils ne peuvent pas ! Nous sommes en zone libre, ils...
- Et bien il faut croire qu'elle n'existe plus. Ils sont si nombreux...Mon dieu j'espère qu'ils ne vont pas réquisitionner notre maison.
Elisabetta se tourna vers son frère mais ce dernier afficha un regard sombre :
- Nous sommes des commerçants Lisa. Ils vont avoir besoin de se nourrir. Je suis certain que nous serons parmi les premiers à devoir les assister.
Matteu aurait aimé se tromper mais malheureusement en début de soirée, trois hommes frappèrent à la porte de leur maison et, comme Elisabetta et son frère s'y attendaient, ils indiquèrent qu'ils réquisitionnaient deux chambres. La demeure possédait quatre chambres : Elisabetta fut donc contrainte de déménager et d'aller s'installer avec Caterina et sa fille Isabella.
Très vite dans les jours qui suivirent l'installation des trois soldats, la jeune fille fut sur ses gardes. Elle avait repéré les regards intéressés que lui lançait régulièrement l'un des italiens et elle regretta de ne pas pouvoir aller se réfugier chez Leandru. Elle n'eut pas à avertir Matteu de ses observations car lui aussi avait remarqué qu'un des soldats regardait sa petite sœur avec trop d'insistance à son goût.
A partir de cet instant, Elisabetta ne resta plus une seule seconde seule à la maison, Matteu ayant trouvé quelqu'un pour s'occuper de ses affaires à l'extérieur de la ville.
L'arrivée des troupes italiennes eut un effet néfaste sur le commerce : les gens ne sortaient plus de chez eux qu'en cas d'extrême nécessité et comme les soldats avaient réquisitionné une grande partie des vivres, Matteu et Elisabetta n'avaient eux-mêmes presque plus de quoi fournir leurs clients.
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Cum' un cantu di liberta
Historical FictionLes Casaleccia et les Venazzi sont deux importantes familles du village de Merusaglia en Corse.Depuis plus de deux siècles, la vendetta fait partie de leur quotidien et les membres des deux clans se vouent une haine féroce. Depuis leur plus jeune â...