Demonic Game [Tome 1]

Chapitre 9 :

Partout où Catherina posait son regard, elle ne voyait que l'obscurité menaçante de la nuit. L'air était froid, et même la lune semblait s'être éteinte dans le ciel. L'atmosphère était pesante. La jeune fille peinait à calmer sa respiration et les deux globes rouges écarlates qui la fixaient n'arrangeait rien. Mais le pire, c'était l'odeur. L'odeur rance de la mort. Catherina tenta de faire un pas mais ses jambes refusaient obstinément de lui obéir, la maintenant prisonnière. Les yeux rouges s'approchèrent d'elle et elle distingua une silhouette. Dans son dos, des ailes visiblement cassées essayaient en vain de se déployer dans des craquements horrifiants. De lourdes chaînes rouillées enserraient ses chevilles et ses poignets. Derrière lui, des centaines de paires d'yeux s'allumaient dans le noir, la guettant, l'épiant. Une main la frôla : elle chercha à hurler, mais la peur l'empêcha de proférer le moindre son. La silhouette était là, lui faisant face, si proche d'elle. Et d'une voix rocailleuse, elle prit la parole.

-Si tu veux lui échapper, il faut me libérer. Moi seul peut te guider efficacement. La mort est là, elle t'attend, toi et tous les autres. La partie a commencé, Katalina, et tu es loin de l'avoir remporté. Libère-moi, et nous guideront vers ta survie.

-Qui est-tu ? parvint à demander la jeune fille.

-Au fond de toi, tu le sais déjà. On se connait depuis longtemps Katalina. Cherche le désert. J'y serais.

-Le désert ? Mais quel désert ? Et je ne m'appelle pas Katalina, pourquoi m'appeler comme ça ?

La silhouette se mit à sourire et déposa dans la main de son interlocutrice quelque chose, avant de disparaître brutalement. Catherina baissa les yeux et observa le creux de sa main : une plume noire. Tout se mit à trembler, le cadre obscur vacilla et elle fut prise d'un mal de tête atroce. Elle hurla pour s'en débarrasser, en même temps que tout le reste s'effaça.

.☣.

Catherina se réveilla en sursaut. Tout son corps tremblait, sa respiration était saccadée, des gouttes de sueur perlaient sur son front, ses mains étaient moites et collantes. Elle jeta un coup d'œil à Jesse, qui dormait paisiblement. Sa poitrine se soulevait à un rythme régulier, son visage semblait serein. Catherina se redressa, appuyant ses mains contre ses oreilles dans l'espoir que les paroles du monstre de son cauchemar cessent de résonner en elle. Elle finit par se lever avec précaution, espérant ne pas réveiller son camarade. Elle enfila le sweat épais de Rwan, glissa ses pieds dans ses baskets et sortit prudemment.

Il devait être aux alentours de 2h du matin, à en juger par le calme qui régnait. L'obscurité n'était troublée que par la lumière blanche des lampadaires et celle plus pâle du croissant de lune qui luisait dans le ciel. L'air était frais et humide, et les flaques qui jonchaient le sol témoignaient d'une averse récente. Un frisson lui parcourut l'échine, l'obligeant à enfoncer ses mains dans les poches du sweat pour se protéger du froid mordant. Au loin, elle entendit les éclats de rires d'un groupe de filles, sans doute un peu éméchées, qui devaient allaient s'amuser en boîte de nuit. A droite, le feulement agressif d'un chat. De l'autre côté du pont, sur l'autre quai, une bouteille en verre se brisant avec fracas en rencontrant le sol, et le soupir agacé de son propriétaire maladroit.

En se concentrant, le calme apparent de Paris n'était qu'un leurre.

En se concentrant, Catherina parvenait à entendre tout ça.

Pendant qu'elle longeait tranquillement le quai, Catherina ressassait son cauchemar pour le moins étrange. Sans pouvoir se l'expliquer, elle avait la désagréable impression de connaître la silhouette qui lui avait parlé, toutefois sans parvenir à se souvenir de son nom. C'était frustrant et, pour le coup, relativement inquiétant. Elle shoota négligemment dans un caillou, qui termina son vol dans les eaux noires de la Seine. Elle s'approcha du bord et finit par s'asseoir, laissant ses jambes se balancer dans le vide. Le léger bruit des vagues la détendait, et elle ferma les yeux pour mieux en profiter.