Chapitre 13

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L'abandon.

Le corps et l'âme qui lâchent prise.

L'esprit qui se résout à échouer.

« Il te reste quarante-huit heures. »

Seulement deux jours - et malgré la notion du temps quasi absente, dans ces cellules intemporelles, c'était une durée infime. Bien trop courte pour réussir à vivre.

« Avoue par toi-même et tu auras le droit à une mort rapide et quasi indolore. Reste muette, et nous te livrerons à la colère du peuple des Autres. »

Opale n'avait pas réagit davantage. Elle était restée prostrée durant plusieurs minutes, puis s'était trainée contre le mur plein, avant de s'enrouler dans la couverture. Depuis elle avait cessé de se mouvoir : à quoi cela servait-il, de toutes manières ?

Dans la tête de l'Autre, les souvenirs étaient d'une limpidité parfaite. Elle revoyait sans cesse l'horreur dans les yeux de l'adolescente, lorsqu'elle l'avait menacée. Elle se remémorait son émerveillement face à la structure transparente destinée à remplacer son pied. Elle se souvenait de son air grave, après avoir appris la vérité. Elle se rappelait son rire, sa voix, ses rares larmes, ses fossettes, son espoir, qui brillait au-dessus de sa tête comme un astre bienveillant.

Opale se recroquevilla davantage sur elle-même, sans savoir ce qui l'affectait le plus : le sort de son amie, ou sa propre mort, courant vers elle. Elle se sentait égoïste de se poser la question : évidemment, Bel passait en priorité ! Néanmoins ... Après avoir tout fait pour s'accrocher à la vie, elle allait la perdre d'une manière si ... stupide !

- Mais qu'est-ce qui m'a pris ?! cria-t-elle en tirant de toutes ses forces sur ses cheveux bouclés.

- Ça ne sert à rien de t'énerver, releva Asiho.

L'Autre se retourna vers l'elfe, tremblante de tristesse, mais aussi de colère.

- Toi, la ferme ! éructa-t-elle. Tu ne vaux pas mieux que ceux que tu sembles tant haïr !

L'elfe hausse un sourcil amusé, mais d'un regard, Caiyo la dissuada de répliquer. Mais cela ne suffit pas à Amano.

- Mais cesse d'être si stupide et prétentieuse ! Ce n'est pas car tu es une Autre que tu vaux mieux que nous ! Non, en fait, tu n'arrives pas à la cheville du plus piètre elfe qui soit ! Tu es tellement faible, tellement ... pathétique ! T'as aucune véritable raison de souffrir, alors respecte au moins celles qui le font en ce moment.

Opale se releva brutalement, et avança jusqu'au barreau, la mâchoire contractée.

- Tu ne sais rien de moi ! Comme je ne sais rien de toi ; tant mieux ! Je ne veux pas connaître de personnes si haineuses !

- C'est drôle que tu dises ça ... Pourtant, je jurerais qu'il y a à peine quelques heures, tu hurlais sur cet Autre avec hargne, fit remarquer Asiho.

Elle haussa un sourcil amusé, ses lèvres dessinant un sourire victorieux. Opale mordit les siennes, et leur tourna le dos, après un dernier regard assassin.

- Vous êtes d'une bêtise affligeante ...

Trois paires d'yeux se tournèrent vers Caiyo. Celle-ci releva ses prunelles bleues, un air énervé et triste sur le visage.

- On est toutes les quatre dans le même alliage métallique, pourtant, vous vous battez pour en arracher le pilote. On n'est pas ennemies, aucune de nous n'a directement fait de mal à une autre, si ? Allez-y, donnez-moi n'importe quel exemple !

- Elle a insulté Asiho, asséna Amano.

- Qui l'avait pleinement provoquée.

Les quatre prisonnières se dévisagèrent, les yeux pleins de doute. Opale commença à prononcer un mot, quand une cinquième voix sonna dans les cellules sombres.

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