Chapitre 23

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L'espoir.

Le coeur vibrant d'attente.

La force qui soulève des montagnes.

Opale inspira profondément, et jeta un coup d'oeil à ses coéquipières. La nuit avait été courte, et la possibilité d'être suivies, omniprésente. Mais une lueur brillait dans leurs yeux, à toutes : elles étaient redescendues au Sud, atteignant la zone des ruines de la ville. D'après le récit de l'elfe aux cheveux sombres, des elfes avaient établi un camp ici, et creusaient la terre à des dimensions titanesques – sans doute pour retrouver les citoyennes de leur peuple.

Caiyo leur avait expliqué que chaque elfe possédait plusieurs puces internes, permettant leur identification, et facilitant la tâche à la branche Elfe. Celles-ci se rechargeaient grâce aux ondes, perpétuellement émises sur l'archipel. Même si l'elfe ne voulait pas parler de son enlèvement, elle avait expliqué que le système pouvant la localiser avait été vidé de son énergie en peu de temps, empêchant son peuple de la retrouver.

- Opale, tes puces doivent être plus performantes, ça leur a permis de capter le signal depuis les profondeurs souterraines, avait-elle conclu.

Bel n'avait pas tardé à reconnaître l'endroit, attristant son coeur déjà fragilisé. Elle était restée silencieuse, indiquant à mi-voix le chemin.

- Nous devrions entendre quelque chose, non ? fit Caiyo, alors que les cabanes désertes se multipliaient.

- Je n'en sais rien ...

Opale regardait autour d'elle, troublée. Quelque chose clochait. Non pas dans l'absence de sons, mais dans ses souvenirs. Lorsqu'Héra l'avait acculée au tronc, et qu'elle avait fuit ... Elle était incapable de se situer. Ses souvenirs ne collaient avec aucun paysage, aucun habitat, aucun arbre. Tout différait, alors que, selon la direction que le trio avaient prise en fuyant, elle aurait dû se tenir dans les environs.

L'elfe aux cheveux sombres s'arrêta, cherchant nerveusement un appui, un repère, n'importe quoi qui aurait pu rattacher sa mémoire à ces lieux. Le monde tournoyait autour d'elle, et elle se sentait perdue, comme si la réalité était déchirée. Durant une fraction de secondes, elle visualisa Lethos, se retourner vers elle, et lui asséner un coup à la tête ; puis les images de sa fuite s'imposèrent à son esprit, presque avec violence.

- Opale, reprend-toi.

L'elfe aux cheveux sombres sursauta, et la voix de Bel la rattacha au présent. Avec soulagement, elle quitta ce monde obscur du doute, pour sa rallier à l'univers stable de l'action. La concernée regarda les deux fugitives, et comprit, à leurs attitudes, que quelque chose n'allait pas.

Caiyo avait croisé ses bras nus sur sa poitrine, les mains bleutées. Elle se balançait d'avant en arrière, et, comme dans les grottes, ses pupilles changeaient de direction à chaque seconde, comme si elle voulait englober tout le monde dans son regard.

Quant à Bel, ses deux mains avaient quitté ses bras, pendant le long de son buste. Elle grelottait, et tentait de rabattre sur ses épaules la fourrure de sa veste. Une de ses mains avait disparu, alors que l'autre tenait le bras d'Opale avec insistance.

- Que se passe-t-il ? demanda celle-ci.

- Tu ne vois pas ?

L'elfe aux cheveux sombres perçut le désespoir dans la voix de sa congénère ; elle comprit. Pendant qu'elle plongeait dans ses souvenirs, les coéquipières avaient continué à avancer. Les yeux d'Opale cherchèrent entre les branches, trouvant un gouffre terreux, dont les pentes étaient aléatoirement vêtues d'un manteau blanc. La femme se pencha, regardant de l'autre côté de celui-ci : plus rien. Aucun alliage métallique, aucun elfe : le silence régnait en maitre dans un désert de glace.

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