La culpabilité.
Le poids pesant sur l'âme.
Le sentiment d'avoir pris une décision personnelle.
Opale poussa un cri horrifié, alors que la vague s'abattait sur elles.
L'eau l'écrasa de tout son poids, et l'elfe lâcha prise. Une bulle se matérialisa autour d'elle, et Opale fut projetée contre les parois, plongeant et émergeant de l'eau salée, avant de se stabiliser. Il n'y avait qu'une mince couche d'air, mais suffisante pour respirer. L'elfe, trempée, frigorifiée, regarda à travers la surface, cherchant ses coéquipières. Il faisait nuit, les rayons argentés perçaient les flots agités, lui permettant de distinguer le fond.
Pendant une fraction de secondes, elle fut saisie par la beauté des sols. D'immenses feuilles se balançaient au gré des courant, fines comme des cils, ondoyant sous la surface. Elles étaient globalement violacées, mais tout autour, plusieurs autres algues poussaient, tantôt minuscules et constellant le sable, tantôt brandissant des épines colorées. Des dizaines de poissons nageaient autour, or ou vermeilles.
L'eau clapotant de sa bulle l'arracha à cette vision onirique. Le froid la paralysait, et elle avait de plus en plus de mal à maintenir sa protection. La pression sifflait douloureusement à ses oreilles.
Opale se sentit paralysée, alors que la sphère s'enfonçait de plus en plus dans les eaux obscures. L'air était trop faible pour la faire remonter, et la paroi, trop lourde. Sa respiration s'emballa, alors que le fond qui lui paraissait si beau se rapprochait dangereusement. Elle savait qu'elle devait absolument sortir, mais l'idée d'être à nouveau ballotée par les courants l'immobilisait. Et l'inconnu Toute cette matière, pouvant contenir n'importe quoi Son esprit lui hurlait de fuir tandis que son corps demeurait dans cette prison.
Soudain, son regard accrocha à un reflet de nage. S'évasant autour de son visage blême, ses cheveux ondoyaient doucement contre son dos. Quelques perles d'oxygène la quittant, Caiyo s'enfonçait dans l'océan, dans son tombeau.
Cette idée ramena Opale, et, après une dernière inspiration, elle brisa la protection. Celle-ci se dissipa en bulles d'air, qui remontèrent à la surface, l'abandonnant sous la mer. L'elfe tenta de nager, mais elle n'avait aucune connaissance dans cette discipline, et chaque mouvement maladroit l'affaiblissait un peu plus.
La main de l'espionne se referma sur le poignet de Caiyo, gelée. Opale battit des jambes le plus vite possible, des tâches noires obstruant sa vision. Le sang lui battait aux temps, sa force la fuyait, mais elle le savait : elle parviendrait à la surface.
La peau de l'elfe se tendit soudain, et Opale fut stoppée dans son ascension. Elle se retourna, et découvrit avec horreur du sang se diluer autour du talon de Caiyo. Des ronces violacées avaient surgi des algues en apparence inoffensives. La plante tirait de toutes ses forces pour attirer sa proie à elle, alors que l'elfe tentait à tout prix d'arracher son amie à la prise tranchante.
Opale dut se résoudre à redescendre, posant la main sur le fourreau de son stylet. Ses doigts ne rencontrèrent que le vide, alors que le peu d'air qui lui restait s'évadait de ses poumons.
Sa dernière pensée fut d'enrager face à sa stupidité. Puis la vague noire noya sa vision et ses sens.
*
- Ale !
La femme sentit un picotement, au fond de sa gorge. Soudain, elle s'embrasa alors qu'un liquide brûlant remontait dans son cou et son nez. Opale cracha bruyamment l'eau salée, et prit une inspiration difficile. L'intérieur de ses poumons était irrité, douloureux.
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Sphérianne
Fantasy"Seul le feu éclairera notre aube. Seul le sang épanchera notre soif. Seule la mort nous fermera les yeux." Depuis un millénaire, deux peuples mènent une guerre sans merci à la surface de leur terre, Liyol, pour le contrôle de celle-ci. Les Evara...