Vivre

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Je courais une nouvelle fois pour lui échapper. Son grognement se rapprochait. Je pris de la vitesse, sautais par-dessus les racines, évitais les plaques de verglas. J'aperçus la fin des bois. Les branches me griffaient, le froid mordant me ralentissait et les obstacles me forçaient à garder une course prudente. Mes pas étaient réguliers, contrairement à mon souffle. Les nuages de vapeurs que je laissais s'échapper me brouillaient la vue. Je sortis de la forêt et empruntais la voie sur la neige épaisse. Je n'entendais plus de souffle animal derrière moi. Il n'était plus. Je pris mon élan, et mes pieds se décollèrent du sol. Je volais au-dessus de la congère, et aperçus ma mère, paisible, dans un cercueil de glace. Je ne tendis pas mon bras, et la laissais partir.

J'ouvris les yeux. Pour une fois, je ne me réveille pas paniquée après l'un de ces rêves. Des larmes roulèrent sur mes joues. Je les essuyais du bout des doigts. Une fois le torrent terminé, je me levais pour me préparer à ma journée. Le bal des fondateurs se déroulait le soir, mais je devais passer au commissariat avant, pour identifier le corps.

La voiture se gara devant le bâtiment. Mon père me regarda dans les yeux, demandant silencieusement si j'étais prête à le faire. J'acquiesçais, et nous sortîmes du 4x4. Je croisais le regard de plusieurs policiers. Ils détournaient les yeux assez rapidement, bien que je pouvais en deviner la raison. Ils avaient été doublés dans leur enquête par des civils, et leur honneur en avait pris un coup. Le commissaire que j'avais vu quelques semaines plus tôt nous emmena à la morgue.

Il retira le tissu qui masquait le visage du cadavre, et me lança un regard interrogateur. Je serrais la mâchoire. C'était Lui. Je remarquais la blessure infligée par Tersly, sur la tempe, tout comme Il avait tué ma mère. Drôle de coïncidence, mais je pensais que tout arrivait pour une raison.

Nous sortîmes du commissariat après avoir rempli plusieurs papiers, et que mon père eut parlé au commissaire à propos de Tersly. Apparemment il n'était "pas joignable". Autant dire que le conseil le gardait à l'abri, tout en établissant une stratégie juridique.

Techniquement, c'était de la légitime défense, mais étant donné qu'ils n'avaient pas officiellement le droit de perquisitionner, cela pouvait porter préjudice. Nous allâmes chercher Elfi, qui sortit dans la neige (en pyjama) et se jeta dans nos bras lorsqu'elle nous aperçut. Gunner la porta jusqu'à que nous soyons à l'intérieur, pour éviter qu'elle eut à marcher sur la neige pieds nus, et nous fûmes invités à boire un thé avec Brigit. Celle-ci m'offrit une grande boîte fermée grâce à un ruban.

"Qu'est-ce que c'est ? Demanda mon père.

- Un cadeau de Noël en avance, me dit-elle avec un clin d'œil."

Nous prîmes congé quelques temps plus tard, ayant encore des préparatifs à faire, et je promis de passer la voir. Après tout, elle avait encore plein de choses à m'apprendre !J'échangeais des messages sur le trajet retour avec les jumelles et Léo, toutes très excitées à l'idée du bal. Tessa et Nahsa avaient des robes assorties, les motifs de l'une étant en miroir par rapport aux motifs de l'autre, tandis que Léo avait opté pour un classique, néanmoins très classe, costard noir avec la cravate qui allait avec. Elle posta un selfie sur instagram d'elle-même dans sa tenue, en tirant sa cravate d'une main et tirant la langue sur le côté. Je souris : elle n'avait pas fini de faire tourner des têtes, celle-là. Léo était quelqu'un qui paraissait réservée, studieuse, et posée vu de l'extérieur, mais elle était tellement plus que ça, et tendait à s'épanouir avec les années. Les gens commençaient à comprendre qui elle était vraiment, et ça faisait plaisir. J'explorais les commentaires, et je ne fus pas déçue : elle commençait à avoir un fan club apparemment. Je fis une capture d'écran des meilleurs commentaires et lui envoyais en snap, avec la mention "quelqu'un a de la concurrence 😏".

24 jours en enferOù les histoires vivent. Découvrez maintenant