Chapitre 2. Camille

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Du haut des escarpins à talons qu'on m'a pratiquement forcé à enfiler, je traîne du pied en rechignant, tirée par Clémentine et Marion qui m'ont également forcé à aller à l'anniversaire d'une fille de mon cours de langues que je connais à peine. Soi-disant que de me laisser passer la soirée le nez dans mes cours un samedi soir, ce n'était même pas une option envisageable pour elles.

-T'as pas bientôt fini de bouder, ricane Clem en remarquant la moue que j'exagère tout juste. Ça va te faire du bien de sortir un peu Cam. Tu ne mets jamais un pied dehors, tu vas finir vieille fille.

-Je prépare mes partiels, excusez-moi d'avoir d'autres priorités, me défendais-je en tapant du pied comme une gamine.

Bon Dieu, ces talons me cisaillent les orteils. Je les avais achetées sur un coup de tête parce qu'elles étaient soldées mais malheureusement, elles étaient aussi une demie pointure en-dessous de la mienne. Ce pourquoi je ne les avais jamais mises avant que mes deux bourreaux de meilleures amies m'y oblige.

-Nous aussi on prépare nos examens mon chou, ce n'est pas une raison pour ne pas décompresser de temps en temps, réplique Marion, sans que je ne trouve autre chose à dire pour plaider ma cause.

Clem me tire contre elle en gloussant, déjà bien éméchée grâce au mélange de vodka/jus de pomme qu'elles avaient ramenés chez moi. Elles se l'on vidé pendant que je me préparais sous leur commandement quasi militaire, tandis que je me suis abstenue d'y boire malgré leurs soupirs et leur insistance.

-Je suis sûre que tu vas t'amuser, enchaîne Clem d'une voix enjouée. Il va y avoir tous les joueurs de l'équipe rugby.

-Youpi, ironisais-je.

Je force un sourire peu convaincant, sans cacher mon peu d'intérêt à leur égard. Les joueurs sont loin d'être fréquentables, même pas l'instant d'une soirée selon moi. Ils passent leurs week-ends à picoler, fumer, et essayer de se faire le plus de filles possibles comme si c'était un concours. Sûrement même dans le seul but de se faire mousser par leurs coéquipiers. A croire qu'en tant que sportifs, s'envoyer constamment tout ce qui bouge est une obligation si l'on veut honorer la tradition. Enfin bref, pas vraiment le genre de personne avec qui j'aime passer mes soirées.

Quoi que si je m'écoutais, seul Baudelaire me serait de bonne compagnie.

-En parlant des joueurs de l'équipe de Rugby, regardez qui voilà... s'enquille Clem en relâchant enfin mon bras.

On s'arrête devant l'allée d'une jolie maison de banlieue où Kylian Etienne, le stéréotype même qui reflète mes réflexions silencieuses à la perfection et Kévin Thavaut, son acolyte de toujours que tout le monde surnomme Rabbit pour des raisons que je préfère ignorer, semblent se vouer à une lute acharnée l'un contre l'autre.

Même sous le faible éclairage des lampadaires qui longent les trottoirs du lotissement, on peut facilement voir que le regard de Kylian est plus enragé que jamais. Et pourtant, il a déjà l'air constamment fou de rage sans raison.

-Depuis quand vous vous battez tous les deux ? leur lance Clem sans cacher son amusement face à leur comportement puéril. Vous n'êtes pas censés être comme les deux doigts de la main, genre BFF à la vie à la mort ?

Sa moquerie fait ricaner Marion à mes côtés, tandis que je me retiens de lever les yeux au ciel et de supplier mes amies pour qu'on se fasse plutôt une soirée télé.

-Occupe-toi te ton cul Clémentine ! la remballe Kylian en se relevant, tenant son épaule dans sa main, le visage tordu par la douleur.

-Toujours aussi aimable à ce que je vois, lui renvoi celle-ci, avec son plus beau sourire de peste.

BrokenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant