– Tu veux faire de Flocon le numéro deux ?
Driss en avait redressé la tête d'étonnement.
Allongé à plat ventre sur un gros pouf brodé d'or, l'efrit suçotait une glace à l'eau parfumée à la fraise. À ses côtés, Inari était avachi sur le dos, jambes et bras croisés de telle sorte que son kimono baillait dans tous les sens. La chaleur ne les dérangeait pas. L'un venait du désert, où le sable et le soleil étaient son seul quotidien, l'autre avait connu les étés lourds et humides de l'orient. Ils étaient peut-être les deux seuls pensionaires ravis par la soudaine canicule qui s'abattait sur la maison.
– Ça serait avec plaisir, ronronna Inari sans même ouvrir les yeux.
Elendil avait dû faire un effort surhumain pour quitter la douce fraicheur de sa chambre et s'aventurer dehors. Il avait coiffé ses cheveux plus haut que jamais sur sa nuque, et retroussé légèrement ses manches, signe de laisser-aller qui le faisait intérieurement se lamenter.
À l'ombre des grands arbres, les pensionnaires qui n'avaient pas de rendez-vous tentaient comme ils pouvaient d'oublier la chaleur.
– Mais est-ce que Mordigann sera d'accord pour que ce soit... « toi » qui le prennes en charge ?
Elendil tenta de ne pas s'offusquer du sous-entendu. Ils pensaient qu'il n'était pas capable de prendre une petite fée sous son aile pour la transformer en hôte vénéneux ? Qu'est-ce -qu'ils croyaient ? Qu'il ne faisait ça que pour son intérêt personnel et qu'il allait aspirer l'âme de Flocon jusqu'à la moelle ?
Ils le connaissaient bien. Mais Elendil n'était pas motivé que par l'intérêt. Il y avait aussi un tout petit peu d'altruisme dans sa démarche, si bien qu'il croisa les bras, vexé.
– Mordigann n'a rien à dire. Tant qu'on lui rapporte de l'argent, on se moque de savoir qui en gagne le plus.
Driss le dévisagea longuement, de ses yeux charbonneux. Elendil songea qu'il devait mourir de chaud sous son turban, et se demandait pourquoi il ne ruisselait pas de sueur comme les autres pensionnaires avachis pas très loin. À cause de sa peau mate ? Driss était un esprit des flammes, un efrit capturé dans le désert, que Mordigann avait sauvé du marché aux esclaves. Il était là depuis longtemps, l'un des plus anciens pensionnaires. Lui et Inari étaient arrivés juste après Elendil. Ils n'étaient pas au courant pour le contrat particulier qu'avait passé Mordigann, mais depuis le temps, l'elfe les savait digne de confiance. Ils ne payaient pas de mine, l'un comme l'autre, l'efrit et le démon renard. Mais ils étaient les deux hôtes qui avaient le plus de succès après le roi Elendil. Charme et professionnalisme, discrétion et séduction.
C'était avec eux qu'il fallait monter les plans fumeux.
– Alors pourquoi tu veux faire de Flocon ton petit faire valoir ? T'as pas besoin de ça. En plus, il vient juste d'arriver. Laisse-le faire son trou.
Elendil se retint de grimacer. Debout devant eux, il les toisait de toute sa hauteur mais avait plutôt l'impression que c'étaient eux qui se moquaient de lui. Il avait besoin d'eux pour mettre ses plans à exécution. Ils occupaient la seconde place des hôtes les plus populaires. Les en déloger sans leur propre consentement serait purement impossible. Affalés sur énorme coussin moelleux, tous les deux étendus comme des limaces pour suçoter des sorbets, Driss et Inari pouvaient pourtant se révéler d'une sensualité irrésistible. Et ils avaient bien plus d'expérience que Flocon.
– C'est juste que... Mordigann est bizarre, en ce moment, avoua Elendil avec une petite grimace agacée. On dirait qu'il regrette d'avoir racheté Flocon. Je voudrais lui donner tort.
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Fancy Candies
Fantasía(MM, fantasy, contenu adulte) Libéré du marché noir, Flocon, fée des neiges à l'allure androgyne, est forcé d'intégrer la maison Fancy Candies, un établissement réputé dans tout le monde magique. Pour rembourser sa dette, il se joint aux autres pens...