Fancy Candies

Treizième bonbon - 1/3

Les jambes croisées, Nox se calla dans le confortable fauteuil en face du bureau du patron. Une plaque gravée trainait dans un coin, au nom de «Orcus Mordigann».

–Tu as l'air surpris de me voir. Tu n'as pas reçu ma dernière lettre?

Orcus s'assit en retenant une grimace, irrité par son air ingénu et son ton candide.

–Si, mais tu as oublié de préciser une date exacte. «Je suis en chemin», c'est très vague.

–Quel étourdi, s'amusa Nox de toute la largeur de ses dents pointues. Je peux?

Il avait désigné de la main l'un des gros dossiers sur une étagère de Orcus. Ce dernier acquiesça d'un signe de tête, confiant assiette et fourchette qui trainaient encore à un domestique fantôme. Ce dernier s'évapora en emportant avec lui les restes de son repas.

–Ce sont tes pensionnaires?

Nox fit tourner les pages en s'attardant sur les portraits de chacune des créatures de la maison. Il s'arrêta pourtant avant de les avoir tous vus et reposa le dossier sur le bord du bureau.

–Je pensais que tu voudrais plutôt voir le livre de compte, rétorqua Mordigann en tapotant du bout des doigts l'accoudoir de son fauteuil.

–Pas vraiment, non. Si c'étaient les bénéfices qui m'intéressaient, je n'aurais pas passé ce genre de contrat avec toi.

Orcus fronça les sourcils, mais Elendil choisit cet instant pour ouvrir la porte et leur amener du thé. Nox se retourna sur son siège avec un air ravi.

–Faren! Toujours aussi délicieux.

L'elfe déposa devant lui une tasse de porcelaine, imperturbable.

–Bonjour Nox. Mais je ne m'appelle plus comme ça.

–Ah oui, c'est vrai, c'est «Elendil», maintenant. Tu payes des droits d'auteur, au moins?

Elendil l'ignora superbement et après lui avoir versé du thé, parti s'asseoir à l'angle du bureau, auprès de Orcus. Nox croisa les jambes et se laissa aller en arrière, les toisant avec un sourire goguenard. Ils étaient tellement mignons qu'il en avait la nausée. Il se rappelait, maintenant, pourquoi il avait tant tardé à revenir ici réclamer sa part du contrat.

– J'espère que je n'ai pas fait trop peur à tes petits pensionnaires. Tu ne leur avais rien dit, pas vrai?

Un ténébreux tentacule s'étira depuis l'ombre de Nox, en dessous de sa chaise. Il prit consistance à mesure qu'il s'élevait et s'enroula autour de l'anse de la tasse pour la porter jusqu'à lui. Le croque-mitaine la recueillit entre ses doigts pour souffla sur le thé fumant.

–Il y a des choses qu'ils n'ont pas besoin de savoir, répondit sobrement Orcus. Je les aurais avertis en temps voulu. Si tu avais prévenu.

Nox ricana, un rire de gorge qui fit ostensiblement frémir Elendil. Ou bien c'était à cause des dents pointues que dévoilait son sourire torve?

–Pourquoi je l'aurai fait? Pour que tu puisses terminer tes petites combines? Je pense que je t'ai laissé suffisamment de temps pour essayer de m'escroquer.

Il reposa la tasse de thé, tout sourire envolé.

–Je ne te demandai pas grand-chose, pourtant. Vu ce que tu as fait de notre héritage, j'aurais pu demander beaucoup plus. Et tu as quand même essayé de m'arnaquer?

–Je ne vois pas de quoi tu parles, répondit Orcus d'un ton glacial.

Nox retrouva son dangereux sourire et croisa ses longues jambes.