Ils se précipitèrent tous les deux vers l'entrée de la chambre, se relevant d'un bond pour glisser en bas de la dune de sable doré. La porte s'ouvrit à la volée et Inari fonça en avant, dégainant un sabre clair sorti des froissements de son kimono de soie. Driss s'enveloppa d'un nuage de fumée noire, dont il retira d'un geste ample deux cimeterres, se précipitant à la suite de son camarade.
Ils firent un tel vacarme dans le couloir lambrissé qu'ils attirèrent l'attention des autres pensionnaires, interloqués par les grognements furieux de Purr dans la maison. Le lycanthrope avait de très loin le meilleur odorat et suivait la piste comme un chien furieux, défonçant presque la porte qui conduisait à l'escalier pour le dévaler quatre à quatre.
Il allait trouver l'intrus le premier. Fort heureusement pour ce dernier, la pleine lune était encore loin.
Driss et Inari suivirent sa trace dans l'escalier jusqu'à un petit pallier entre deux étages, où ils trouvèrent Purr en train de grogner et de feuler tout ce qu'il pouvait devant un placard obscur. Laè était derrière lui, glaive à la main et cheveux en pagaille. Il leur jeta un regard qui en disait long sur sa perplexité.
Un jeune homme gisait sous l'ampoule vacillante du placard, à moitié sonné au milieu de tout le fatras qu'il avait fait tomber dans sa chute. L'inconnu ouvrit péniblement les paupières, et loucha sur les pointes des deux sabres qui menaçaient son visage. Puis décida qu'il valait mieux pour lui de perdre connaissance.
Inari feula, ses trois queues de renard fouettant l'air à gestes nerveux.
– Comment un intrus a pu réussir à entrer jusqu'ici ?
– On devrait prévenir Mordigann, conclut Laè en rengainant son sabre.
Driss s'était déjà agenouillé devant leur captif pour l'examiner. Il releva la frange rouge du jeune homme, inspecta son visage aux traits droits et au teint mat. Sans se soucier du hoquet surpris de ses camarades, il défit la tunique croisée du téméraire inconscient pour observer ses pectoraux et les muscles affirmés de son torse. Driss suivit du doigt les tatouages sombres peint sur la peau ferme.
– Pas la peine, dit-il en se redressant. C'est un golem. Il est venu pour moi.
Laè le fixa d'un œil méfiant. Il ignorait, contrairement à Driss, que le patron était de toute façon beaucoup trop occupé avec Elendil, à cet instant même.
– Pour toi ?
Driss agita la main et une fumée noire souleva leur captif, le ligotant avec soin pour le soulever dans les airs, comme perché sur un nuage de brume épaisse.
– C'est un protecteur du peuple du désert. Ils sont envoyés pour sauver les djinns emprisonnés par les mortels. Les efrits retenus contre leur gré, ou réduits en esclavage.
Les trois autres le jaugèrent du regard, si longtemps que n'importe qui d'autre à sa place aurait croulé sous le poids de leurs reproches silencieux.
– Quoi ? Moi aussi, j'ai été sauvé du marché noir. Comme vous deux.
Il semblait tellement à sa place au sein de la maison que les autres avaient tendance à oublier comment il y était arrivé.
Purr rentra la tête dans les épaules, coupable, mais Inari croisa les bras avec une moue blasée.
– J'y croirais le jour où je rencontrerai le type qui a été assez fou pour oser te capturer.
Driss ne répondit pas, un sourire mystérieux flottant sur les lèvres.
– Je vais ramener ce golem avec moi. Il ne devrait plus poser de problème. Il est fait d'argile, c'est pour ça qu'il a pu entrer dans la maison.
– Tu m'as presque fait peur avec tes histoires de croque-mitaine, soupira Inari.
Derrière eux, Purr glapit d'une façon qui n'avait rien de virile.
– Un croque-mitaine ? Dans la maison ?
Il était devenu blanc comme un linge et Laè leva les yeux au ciel, l'attirant dans ses bras pour le gratouiller derrière les oreilles. Cela calma aussitôt le lycan, mais Inari répondit quand même à ses interrogations. Au grand désespoir de l'efrit, qui n'avait aucune envie que les autres soient au courant.
– Un client de Driss dit qu'il y en a un qui traine dans les parages.
Laè redoubla de vigueur pour gratouiller les oreilles de Purr.
– Pas de raison d'avoir peur, dit-il au lycan. Les croque-mitaines ne sont pas plus dangereux pour nous que les chasseurs de créature, et ceux-là, tu leur as déjà survécu.
Purr baissa le nez, dans les bras du Selkie. Celui-ci lui embrassa l'arrière du crâne, comme pour chasser ses mauvais souvenirs.
Driss referma la porte du placard qui avait quelque peu souffert de leur irruption violente. Un fantôme passa à travers la porte, en leur jetant un regard dédaigneux. Ils entendirent bientôt le bruit des balais que l'on remettait à leurs places. Au-dessus de leur tête, le golem flottait toujours sur son nuage de fumée noire, inconscient.
– De toute façon, on ne risque rien, ici, répéta Laè en tournant les talons. Mordigann ne laisserait jamais un croquemitaine entrer dans la maison.
Les deux autres acquiescèrent et le suivirent pour quitter la cage d'escalier mal éclairée. Driss ferma la marche, sans perdre son énigmatique sourire, guidant du bout des doigts le nuage qui supportait son captif.
– Non, c'est sûr, chantonna-t-il à voix basse. Mordy ne le permettrait jamais...
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Fancy Candies
Fantasy(MM, fantasy, contenu adulte) Libéré du marché noir, Flocon, fée des neiges à l'allure androgyne, est forcé d'intégrer la maison Fancy Candies, un établissement réputé dans tout le monde magique. Pour rembourser sa dette, il se joint aux autres pens...