Chapitre 24

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Point de vue de Keelie

Chaz me regarde avec son air méprisant habituel. Encore une fois, je me sens ridicule. Il m'a prise en flagrant délit et ça fait près de cinq minutes qu'on se regarde dans le blanc des yeux dans rien dire.

-Tu comptais t'en aller alors que je ne t'en avais pas donné l'autorisation ?

Sa question me surprend et je lui répond d'un air ironique.

- Non non, je comptais aller cueillir des marguerites et te les offrir à mon retour, étant donné qu'on s'entend terriblement bien.

- Bravo pour ta finesse, me dit-il d'un sourire sans joie.

Au contraire, je jubile de pouvoir le taquiner un peu. Et oui mon petit Chaz, tu viens de découvrir Keelie dans toute sa splendeur. Je vais me faire un plaisir de me moquer de lui dès que j'en aurai l'occasion. Même si celle-ci n'était pas très optimale. Je suis dans le pétrin et je trouve la merveilleuse idée de le provoquer.

-Outre ton agréable réflexion, tu comptes te rendre à Diantis par quel moyen ?

-Avec ceci, je lui lance en sortant la carte de ma poche. C'est plus pratique, tu ne trouves pas ?

-Tu sais, c'est pas à côté, tu en aurais pour des jours de marche, Keelie.

Son air supérieur me dégoûte, mais malheureusement je crois bien qu'il a raison. Je n'avais pas pensé au temps que ce voyage prendrait, sans compter que je n'avais rien prévu à manger, ni à boire. Je baisse la tête, honteuse d'avoir complètement raté mon plan.

Chaz relève mon menton d'une main et mon regard croise le sien. Il sourit ?

-On dirait que tu as vraiment envie d'y aller. Dommage que tu ne sois pas très futée, ajoute-t-il un grand sourire aux lèvres.

Aïe, j'appelle ça le karma. Il a eu sa vengeance, je l'avoue.

-Si tu le souhaites vraiment je peux t'accompagner, renchérit-il en reprenant son sérieux. Ma soeur ne dira rien à mes parents et je saurai garder le secret, puisque tu y tiens tant.

Immédiatement, je me mets sur la défensive. C'est beaucoup trop beau pour être vrai, ce serait trop facile. Depuis que je suis arrivée chez les Meridador, rien n'est facile, alors pourquoi le serai-ce maintenant ?

-Pourquoi ferais-tu ça ? Je demande, méfiante. C'est vrai, tu n'as rien à y gagner.

-Parce que je connais tes motivations, et j'ai très envie de revoir Lysandre. De plus, je suppose qu'un peu de reconnaissance de ta part ne fait pas de mal. Tu me seras redevable, et j'adore ça, ajoute-t-il avec une lueur étrange dans le regard.

Un frisson me parcourt l'échine. Si il croit qu'il va avoir le droit à une tornade de remerciements en plus de services en échange, il se met le doigt dans l'oeil.

Cependant, une partie de son discours retient mon attention. Comment sait-il que je vais voir Lysandre ? Je ne lui ai pas parlé de cette partie de mon projet.

Je ne soulève pas et enchaîne d'une voix qui se veut assurée, passant ma main dans mes cheveux pour paraître décontractée. Or, je ne le suis pas le moins du monde. Au moindre faux pas, je ne verrai pas Lysandre. Je dois faire attention à ce que je dis pour essayer de convaincre Chaz.

- Admettons que tu souhaites m'accompagner. A quoi pourrais-tu me servir ? C'est vrai, ce n'est pas à côté, j'en aurai pour des jours de marche.

Un rictus naît sur son visage.

- Tu n'arrêtes jamais de me taquiner, hein ? Tu oublies que j'habite ici, et que je connais des gens. Ces gens peuvent te conduire à Diantis, peut-être grâce à une voiture ? C'est plus pratique, non ? Et je serai là pour te protéger au cas où, puisque tu n'as toujours pas réussi à faire resurgir ton don qui, de plus, ne peut pas te défendre.

Je ne sais pas si sa dernière phrase est une pique ou simplement une constatation, mais je choisis de ne pas relever. Je n'ai pas envie de commencer une nouvelle dispute.
Je hoche simplement la tête en signe de compréhension.

- Tu veux qu'on parte quand ? Enchaîne-t-il.

- Le plus tôt possible : nous avons rendez-vous à 14 heures.

J'en profite pour regarder ma montre : 10 heures 32. Il nous reste trois heures et demie.

Finalement, heureusement que Chaz m'aide. Je ne serais jamais arrivée à temps, et largement. Je n'ai aucune notion des distances, mon plan aurait tourné à la catastrophe si Chaz ne m'avait pas retenue.

Celui-ci arbore un sourire très confiant et sûr de lui. Ça a le don de m'énerver au plus haut point. Il commence à se retourner avant de me lancer, dos à moi :

- Alors on se retrouve ici à 11 heures. Je dois terminer une mission que Père m'a confiée, et je te rejoins juste après.

Il retourne à l'intérieur du manoir sans se retourner, et je profite de cette demi-heure de tranquillité pour visiter les jardins. Lydia me les avait déjà montrés, mais je me sens bien lorsque je m'y balade. Ils sont très apaisants. La chant des oiseaux me fait oublier tous mes soucis. Ça me fait terriblement penser à chez moi.
Dans mon ancienne maison à Silver, nous passions nos journées dans les rues, jouant à des jeux de notre invention. Les garçons s'amusaient entre eux et montraient de quoi ils étaient capables tandis que les filles établissaient des classements pour déterminer lequel était le plus beau.
Nous étions pauvres, mais heureux. J'ai l'impression que c'est tout l'inverse ici. Ils ne manquent de rien, mais des milliards de soucis viennent frapper à leur porte chaque jour. Je ne les ai pas vus une seule fois détendus. Ils ont toujours quelque chose à gérer, à organiser. Finalement, la richesse n'apporte que des problèmes.

La voix de Lydia me sort de mes pensées.

-Alors, vous comptez partir quand, avec mon frère ?

Je tourne la tête et la voit assise sur le même banc que tout à l'heure, en train de jouer avec une branche d'arbre. Elle arbore toujours ce sourire mystérieux. Je ne l'avais même pas remarquée, obnubilée par mes souvenirs.

Encore une fois, sa question me surprend. Elle sait que je pars avec Chaz. Nous aurait-elle espionnés ?

- Je vous ai vu parler avec mon frère, m'explique-t-elle. Je ne voulais pas vous entendre, mais vous parliez tellement fort que j'ai compris qu'il allait partir avec toi.

Je ne relève pas : il faut que je m'habitue à ses manières de fonctionner, même si elles ne sont pas communes.
Elle continue de me fixer, guettant ma réponse, que je lui donne immédiatement. Elle ne paraît pas surprise par notre départ imminent, tout comme notre destination.

Tout naturellement, elle prend congé de moi en recommençant à jouer avec sa branche.

La demi-heure qui suit passe à la vitesse de l'éclair, entre la lecture des lettres de mon grand-père et les finitions du "voyage" avec Chaz.

Nous nous retrouvons près de la porte à l'heure du rendez-vous et il semble totalement détendu. Moi, au contraire, je sens le stresse naître au creux de mon ventre, pour une raison qui m'est inconnue. Je remarque que son regard est dirigé vers une grosse voiture noire garée au loin. Sûrement notre conducteur.

Le trajet se passe sans encombre et dans le silence le plus complet. Ni Chaz ni moi ne ressentons l'envie de parler, et pourtant je ne suis pas mal à l'aise. J'arrive même à me détendre un peu avec le ronronnement du moteur.

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/!\ Je suis à la recherche d'un bêta-lecteur ! Si vous êtes intéressé(e), n'hésitez pas à me prévenir pas message privé.

Blanche [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant