I

14 2 0
                                    

Vendredi. Greta parcours le chemin vers la gare avec la fille de la gare, Julie. Elle lui parle de son nouveau petit ami et de la fêté de ce week-end.
  - T'as été invitée ? demande-t'elle.
  Bien-sûr que Greta a été invitée. C'est une des premières d'ailleurs à qui on a demandé de venir. Parce que Magareta c'est la bonne amie qui parle avec tout le monde. En soirée, quand tout le monde te lâche pour une beer-pong ou pour bécoter quelqu'un, et bien il reste toujours Greta. Peut-être avec quelques grammes d'alcool dans le sang, mais elle est là. Elle trouve des sujets de discussion. Tout le monde est susceptible de se retrouver seul en soirée, il faut bien quelqu'un pour rester près de ces gens.
  - Oui, on m'a invitée. Mais je ne sais pas si j'ai envie d'y aller.
  Julie pense que Greta ment. Que personne ne l'a invitée. Julie, elle, a été une des dernières invitées.
  - Ah bon. Viens, ça peut être drôle.
  Greta hausse les épaules alors qu'elles atteignent le quais. Greta aperçoit Amon qui discute avec un groupe de personne. Celui-ci tourne alors la tête et sourit à Greta.
  - Si tu viens à la fêté de ce week-end...tu penses que ta mère pourrait me ramener ? demande Julie en pianotant sur son téléphone.
  - Euh, j'en sais rien. Sans doute qu'elle ne voudra même pas m'y conduire.
  Amon s'approche.
  - On peut passer te prendre samedi soir, ça nous dérange pas.
  Greta n'avait pas la moindre idée de à quoi ressemblaient les parents de Julie mais d'après la façon dont parlait Julie d'eux, c'était comme si Greta faisait partie de la famille ou était une amie de celle-ci.
  - Ouais peut-être, répond Margareta.
  Julie s'écarte des côtés de Greta pour rejoindre son groupe d'amis alors que Amon arrive à la hauteur de celle-ci. Margareta n'avait pas encore écrit dans son carnet et elle se sent maintenant mal à l'aise. Elle avait l'impression de tout rater. Rater son imagination, rater ses questions et réponses. Les idées se bousculent et elle supplie un moment de solitude pour écrire tout ce qu'elle n'a pas encore oublié.
  Amon voit pour la première fois Greta avec ses cheveux attachés en un chignon bas où quelques mèches se sont égarées sur le visage de Margareta. Alors qu'il veut lui parler elle l'interrompt :
  - Je reviens ! Je vais aux toilettes.
  Elle revient sur ses pas et presse le pas vers les toilettes qui sentent la beuh et la merde. Elle arrache de la gueule de son sac son carnet et écrit :
  J'ai parfois l'impression que quelqu'un est à mes trousses. Qu'il y a un malade mental quelque part sur les toits, prêt à me fait un sort à tout moment et c'est la panique. Aurai-je le temps de terminer les poèmes qui se bousculent dans ma tête ?
  Elle se dépêche de tourner la page qui est pleine pour vite noter :
  S'excuser... Que faire désormais sous nos cadavres couverts d'un voile transparent qui cacherait notre dernière image imprimée sur notre pupille avant notre mort. Voile qui restera jusqu'à ce qu'on retrouve dans nos yeux comme sur le bois de notre tombe des griffures que seul un animal aurait eu la possibilité de faire. Sale bête. Et je suis l'innocence même d'un destructeur.
  Elle essaie alors à écrire d'autres pensées qu'elle a eu durant la journée mais rien n'est comme avant. Les mots ne s'accordent plus. Et cette puanteur l'empêche de se concentrer sur ses mots. Alors qu'elle claque le pointe de son stylo sur le papier elle entend l'appel qui fuse dans les micro, annonçant l'arrivée de son train. Elle regarde son carnet ouverte sur deux pages, une pratiquement vierge et l'autre complètement blanche. Et ça l'exaspère de ne pas savoir les remplir. Elle aurait su comment le faire si on lui aurait laissé de l'espace ! Elle arrache la page vierge et la lance dans la crasse des toilettes. Elle expire fortement et sort des toilettes en remettant son carnet. Amon le remarque.
  - Tu étudiais encore ?
  Greta ne lui répond pas et monte dans le train suivit de Amon qui se sermonne intérieurement en voyant qu'elle ne réagit pas bien du tout à ses paroles. Il l'a suis jusqu'au fond du train. Elle s'assied à une banquette de deux et Amon se pose à ses côté.
  Greta ne parle pas du trajet alors que Amon essayait tant bien que mal de la détendre. Il a même tenté de lui faire des blagues.
  Alors que Amon insère ses clefs dans porte de chez lui, Greta dit :
  - C'est pas un carnet pour étudier.
  Ils entrent dans la maison et il répond :
  - Je l'avais compris.
  Pourtant Greta le pensait trop bête pour y voir plus loin que ce qu'elle lui avait répondu.
  Ils vont à l'étage et Amon la fait rentrer dans sa chambre.
  Greta découvre une chambre assez grande, plus grande que celle qu'elle possède chez sa maman. Un lit double, elle qui rêve d'avoir un si grand lit. En face d'elle, une grande fenêtre et à sa droite une télévision et son lecteur DVD. Elle remarque aussi, sur le mur gauche, au-dessus du lit, des posters de groupe de musique mais aussi d'avions de guerre.
  - T'es fils unique ? demande-t'elle en s'asseyant sur le lit.
  - Oui. Pas toi ?
  Elle secoue négativement la tête.
  - J'ai des frères.
  - Combien ?
  - Deux. Un petit et un grand frère. Est-ce qu'il est bien ce film ?
  Il s'accroupi devant le lecteur DVD et y insère le CD. Il y chipote encore quelques seconde avant de rejoindre Greta sur le lit.
  - Oui. C'est mon film préféré.
  Voyant que Amon retire ses chaussures, elle fait de même pour après se reculer vers le mur où elle s'adosse en même temps que lui.
  - Tu aimes la cinématographie ? continue-t'elle.
  - J'adore ça. Je peux passer des jours à chercher de nouveaux films, les regarder et donner mon avis. D'ailleurs, je suis plutôt difficile en matière de film. Il y en a beaucoup que j'ai détesté et très peu que j'ai adoré.
  - On verra si t'as la même critique que moi, dit-elle.
  - J'espère.

L'entrainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant