L'entrain

J

   - Non. Les pizzas Hawaïenne c'est pour les gens sans goût. Ceux qui sont trop fades. C'est pour ça qu'ils arrivent à aimer le jambon associé à l'ananas.
  - Et puis l'ananas, seul, est dégueulasse, affirme-t'il en mordant dans sa pizza.
  - Ma mère fait d'excellente pizzas. Pas la tienne ?
  - C'est pas son truc la cuisine.
  - Pourquoi ils sont partis en Allemagne ?
  Amon secoue la tête en haussant les épaules.
  - C'est trop cool de rester chez soi. Seul.
  - Tu peux venir ici encore jusque jeudi si ça te plaît tant, dit-il en la regardant du coin de l'œil pour examiner sa réaction.
  - Qu'est-ce que tu fais demain soir ? enchaîne-t'elle en se tournant vers lui.
  - Rien. Je suppose.
  - Génial. On m'a invitée à une fête samedi soir. Ça ne dérangera personne que je t'invite. Tu viens, pas vrai ?
  - Pourquoi pas.
  Ils se sourient mais une voiture qui klaxonne fait sursauter Amon.
- J'y vais en train. Je prend celui de 21:40.
Greta enfile son manteau tandis qu'il hoche la tête. Avant de sortir de la chambre de Amon, elle sort de son sac "Le Horla" et lui tend. Amon le prend en se forçant de sourire. La lecture c'est pas son truc.
Greta sort de chez lui pour trop vite s'enfermer dans une plus petite espace de la voiture étriquée de sa mère. Elle a droit à des questions banales pendant quelques minutes. Jusqu'à atteindre à la moitié du chemin du retour le silence. Greta se tourne vers la fenêtre à sa droite alors qu'il commence à faire nuit.
- Je veux pas d'un nouveau chien, dit-elle.
Sa mère hausse les sourcils. Toute la famille était d'accord pour acheter ce bouledogue français. Mais pas Greta, comme toujours.
- Pourquoi ? Tu pourras prendre ce chien avec toi lorsque tu vas toute seule en ville, ce n'est pas bien ?
Greta roule des yeux.
- C'est pour ça que j'en ai pas envie. Bon, une des raisons.
- Quelles sont les autres ?
- Ça me rend triste de me dire qu'on va encore délaisser un animal. On sait pas s'occuper d'animaux alors qu'on en a depuis toujours. Et personne ne s'en rend compte.
Sa mère ne répond pas. Greta s'en doutait.
- Tout le monde est d'accord pour avoir un nouveau chien, dis la mère sur un ton neutre.
C'est toujours les autres, se dit Greta. Et c'est ce qu'elle reproche depuis toujours à sa mère. Au début, Margareta disait à sa mère tout ce qui n'allait pas, ce qui l'a rendait triste. Elle le lui a même crié. Elle donnait son avis. Mais rien ne changeait. Alors Greta a laissé tomber. Passe toute ses journée dans sa chambre pour ne pas continuer à entendre ce qui ne lui plaît pas sans pouvoir y donner son avis. C'est ce qui l'énerve aussi.