Amon adore le pull rouge que Greta porte et qui se colle à sa peau par le vent constant des côtes belges. Elle est à quelques mètres devant lui, occupée à discuter avec la seule autre fille que Quentin avait invité, c'était sa meilleure amie. Il n'imaginait pas partir sans elle.
Ils étaient arrivés à Ostende il y a deux jours. Greta, malgré la présence de Amon, s'ennuyait. Elle participait à tous les sortes de conversation et les amis de Amon l'appréciaient mais Margareta trouvait la maison de Quentin endormie tandis que les murs tremblaient dès le matin par des musiques qu'ils aimaient écouter. Et puis, elle s'est dit qu'elle aime sans doute moins Amon lorsqu'elle le voit trop souvent. Amon l'aime encore plus quand il peut voir ses cheveux d'ébène tous les matins et avant de s'endormir, comme bercé par la douceur d'une mèche et par son odeur même s'il ne les touche que par accident.
Greta, elle, se sent oppressée parfois par la présence de Amon. Elle déteste avoir les gens à sa portée, sans arrêt.
- Tu plais à Amon, dit Laura alors qu'une brise fouette leur visage.
Greta savait. Et c'est une phrase qu'elle s'attendait à recevoir. On croit tous que c'est cette phrase, cette information qui changera tout dans la relation entre deux êtres.
- Ah.
Mais elle ne voulait pas écouter cette affirmation. Elle déteste le fait que tout se passe comme on le veut. Cela l'ennuie encore plus, se demandant pourquoi il faudrait le dire. Ne peut-on pas s'en douter ?
- Pas toi ?
Les épaules de Greta s'abaissent. Que sait-elle vraiment de ce qui lui plaît ? Même ce qu'on lui a appris à aimer, elle le déteste. Sait-elle aimer ? Puis, est-ce qu'on doit aimer ? Elle est là, dans la maison du meilleur ami du garçon qui l'aime. Elle est tentée de dire qu'elle ne lui trouve rien d'intéressant, qu'il est comme celui qu'elle n'a jamais rencontré et c'est ce qui le rend banale. Parce qu'elle s'est déjà trop fait d'aprioris sur la personne qui l'écouterai d'une autre façon que les autres. Elle sait presque déjà ce qui va se passer.
Mais dans le regard de Laura, il y a l'appréhension de tout répéter à Amon qui n'attend que ça. Sans doute. Alors Greta fait ce qu'elle déteste encore plus que ce qu'elle aime : elle hausse les épaules.
Laura se pose alors des questions. Peut-être n'est-elle pas assez proche de Greta pour qu'elle lui avoue ses sentiments pour Amon.
Ils rentrent enfin chez Quentin et, alors que Greta monte à l'étage se doucher, elle écrit :
J'aimerai te dire tout. Sauf que l'amour et son monde seraient aussi mystérieux que le dévoilement. Tellement simple qu'il me tue à grands mots. Je ne sais pas dire les choses simplement. Comment l'amour peut être dit ? Comment faire si je n'arrive pas à parler de toi sans mon intermédiaire. La peur que tu m'oublies dans les mots doux ou gênants dans ton esprit si à fleur de peau. Je ne sais pas trop à quoi mes mots correspondent. Rien ne tourne en rond dans ma tête, je suis comme fixé, toutes les secondes sur autre image, un autre mot, un autre bonheur. J'ai comme muté avec tes yeux. Mon esprit vit de ta pupille dilatée, de ton clignement d'yeux qui me font comparer tes cils aux ailes d'un papillon. Encore un clignement... Encore mon coeur qui me lâche.
- Qu'est-ce qu'elle a dit ? demande Quentin en buvant une gorgée de bière.
- Rien, répond Laura.
Le coeur de Amon s'entaille. C'est ce qu'elle ressent ? Rien ?
- Comment ça ? continue-t'il en fronçant les sourcils.
- Elle ne m'a rien dit. Juste hausser les épaules.
Quentin regarde Amon qui se demande si c'est vraiment à Greta qu'elle a parlé, le fille qui n'aime pas voir des épaules se hausser ni entendre des réponses trop brèves, ne pas recevoir de réponse parce que pour elle, un haussement d'épaules n'est rien, pas une réponse. Il se demande s'il y est pour quelque chose.
Amon monte dans sa chambre où il peut entendre les jets d'eau de la douche, imaginant comment Greta serait sous cette eau. S'il est ces gouttes d'eau qui l'effleurent et finissent toujours à ses pieds.
Laura et Quentin se disent qu'il déprime et rejoignent Alex qui joue à un jeux vidéo. Greta les rejoint après.
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L'entrain
Teen FictionJe ne vois plus que tes épines, je te vois toi. (Ce que écrit Margareta dans son carnet sont des phrases qui ont été écrites par @opprobre)