Correspondance à un revenant

XIII

Quand Elliot gare la voiture devant l'appartement, Constance ne se sent pas la force d'en sortir. Le choix de retourner à l'université semble avoir pompé la totalité de ses forces. Elle se figure d'ores et déjà les oeillades insistantes remplies de pitié se focaliser dans sa direction. C'est un fait qu'elle ne peut pas assumer. Elliot effleure le dos de sa main de ses longs doigts fins et, l'espace d'une seconde, elle est avec Théo. Constance oriente ses iris émeraude vers son ami, un sentiment obsédant et sauvage s'imprègne de son estomac. Les souvenirs de leur baiser sous la douche s'imposent à son esprit et, elle ressent le besoin de ranimer ces sensations. Elliot se cramponne encore au volant de la vieille Cabriolet. Quand les mains au contact glacial de Constance encadrent son visage et que ses lèvres au doux parfum de vanille se moulent aux siennes; il défaille. 

Il n'est plus question de faire abstraction du souvenir de Théo. Il est seulement impératif que les émotions ressurgissent du plus profond de son être. Elliot se remet rapidement du choc pour approfondir l'échange affectif. Il glisse une main experte dans la chevelure brune de Constance et presse avec hardeur ses lèvres contre les siennes. Le bras du jeune homme tente de se frayer un chemin jusqu'à la taille de son amie mais son coude rencontre le klaxon. Le bruit perçant coupe la férocité de leur contact. Et, alors que les joues de Constance se teintent de rose et, que sa bulle se referme de nouveau, Elliot cherche à conserver leur lien visuel. 

- Décris-moi tes émotions, maintenant, quémande-t-il à bout de souffle.

- Passion, peur, envie, besoin.

Il quitte l'habitacle du véhicule en hâte sous l'étonnement de Constance. Lorsqu'il réapparait, il ouvre la portière de son amie et l'aide à sortir. Elliot la plaque gentiment contre la tole de la vieille Cabriolet. Il exerce une légère pression sur ses hanches.

- Est-ce qu'il t'a déjà fait ressentir ces émotions, de cette façon ?, lui souffle-t-il à l'oreille.

Les mots manquent à Constance qui ne parvient pas à mesurer les conséquences d'un pareil rapprochement. Elle secoue négativement la tête, captivée par le mouvement des lèvres de son meilleur ami. 

- Je te demande de te focaliser sur la nouveauté, plonge-toi dans la profondeur de ces nouvelles sensations pour oublier les anciennes. 

Pantelante, Constance empoigne avec ferveur la chemise d'Elliot alors qu'il dépose une miriade de baisers dans sa gorge, suivant les lignes de sa mâchoire. Théo ne faisait pas dans la profondeur; pour quoi que ce soit. Théo ne se préoccupait pas des émotions en elle-même, il se contentait de les véhiculer. Elliot desserre lentement son emprise sur la taille de son amie et fait s'effleurer le bout de leurs deux nez. Constance reprend contenance et lâche peu à peu la chemise du châtain pour se contenter du contact le plus simple. 

- La vie a encore tellement de choses à te faire découvrir... Ne te fixe pas de telles limites, lâche prise, Constance, laisse-moi te guider, soupire Elliot.

Il exerce une dernière pression des lèvres au sommet du front de Constance puis, la guide jusqu'à l'entrée de l'appartement.