14-Morbide phobie

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Le corps secoué de soubresauts, je me penchai une énième fois par-dessus la cuvette des toilettes pour déverser ce qui devait rester de mon petit déjeuner. Essoufflée, je ne tentais même plus à ce rythme de reculer la tête pour éviter de me recevoir quelques éclaboussures de ma vomissure. Juste de fermer les paupières pour m’épargner au moins les yeux. Les pauvres étaient déjà bien assez rouges comme ça de mes larmes pour en rajouter. Je ne savais pas depuis combien de temps j’étais là, mais j’étais certaine qu’entre temps le cours de photographie devait être terminé depuis longtemps. Il n’était censé durer qu’une heure après tout. Et j’étais censée m’en être enfuie cinq minutes à peine être entrée après être arrivée avec quinze minutes de retard.


Oui…il devait être terminé.


Alors pourquoi est-ce que ces cinq petites minutes passées à l’intérieur me hantaient-elles encore ?

Pourquoi est-ce que ma petite tête n’arrivait pas à comprendre que leurs regards et leurs appareils photos n’étaient plus braqués sur moi ?

Pourquoi mon corps n’arrivait pas à comprendre qu’il n’était plus censé riposter ?

Il n’y avait plus de dangers…

Plus de regards…

Plus de flash…

Plus que moi, entre les quatre murs d’une pitoyable cabine de toilette de lycée.

Pourquoi ?

POURQUOI ?!

Pourquoi il avait fallu que ça se passe comme ça ?
Encore ? Toujours ? Pourquoi ?

Malgré mes efforts…malgré que j’avais essayé encore. Je n’avais pas pu.
Ça n’avait pas suffi…que je ferme les yeux.
J’avais cru…que si je ne les voyais pas tout irait bien.

Mais il a fallu que ces voix reviennent, ces satanées voix !

Encore…et encore…et encore…
Et que les larmes perlent, que les frissons suivent et que je n’aie d’autres recours que m’enfuir pour ne pas qu’ils me voient tous m’écrouler et supplier des entités imaginaires de sortir de ma tête.


Ça aurait été la Cerise sur le gâteau…


Mais même sans la cerise j’étais certaine que le gâteau avait été un désastre de taille. Les ragots avaient déjà certainement dû commencer à circuler.


La nouvelle a encore fait des siennes…
C’est sûr qu’elle doit être folle…
Qui pleure pour de simples photos…


De simples photos…


Ah…
Si seulement c’était aussi simple que ça…
Si seulement…



!?:Une petite voix m’a dit que je te trouverais là…je crois que j’ai bien fait de l’écouter…


Souffla une voix de l’autre côté de la porte. Une voix masculine qui, plutôt que m’intriguer, me procura un soulagement sans précédent. Je me redressai sans y réfléchir à deux fois et appuyai la chasse d’eau avant de me retourner pour ouvrir la porte. Je le trouvai effectivement adossé au mur, l’œil gauche tristement fixé sur moi - la paupière droite étant encore un peu tuméfiée.
Sans réfléchir, je me jetai dans ses bras, me souciant comme d’une guigne de peut-être sentir le vomi et il sembla ne pas s’en soucier non plus puisqu’il referma ses bras sur moi pour m’étreindre. Pas trop pour ne pas être gênant mais assez pour être réconfortant. Le juste milieu et je lui en fus reconnaissante.



Dale : Tout va bien…Je suis là.



Se contenta-t’il de murmurer en me caressant légèrement les cheveux. Ses mots si simples me délestèrent en une fraction de seconde de toute la tension et la tristesse qui m’enflaient et je ressentis une paix si intense que j’eus envie de pleurer encore. Dale dut le sentir car il ajouta.

2RHS ZONE (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant