Yoongi

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Yoongi P.O.V :

J'ouvris les yeux et regardai le train passer à toute vitesse devant moi. Je ne devrai pas être là, à quelques mètres des rails, debout et en pleine forme. Je devrai être sous les roues de ce train, mort et découpé en morceaux...
Je soupirai et m'éloignai pour rejoindre la route : c'était toujours comme ça, peu importe à quel point j'essayais.
Se pendre dans une forêt ? Je n'avais même pas le temps de sentir la corde se serrer que je me retrouvais en bas de l'arbre à regarder le bout de chancre pendouiller de la branche.
Médicament ? À part me faire vomir pendant une bonne semaine, le cyanure ne fonctionnait que modérément.
Lames ? J'avais testé le rasoir et le couteau de cuisine mais à part beaucoup de douleur et de fatigue, ce n'était pas efficace. La falaise et la noyade avaient donné un résultat similaire au train, malgré mes tentatives pour ne pas me téléporter, et je n'avais jamais essayé d'armes à feu pour la simple et bonne raison que c'était bien trop cher (pour un résultat probablement peu concluant).
A défaut de pouvoir mourir tranquillement, je retournai dans mon studio, ignorai les messages inquiets de ma mère, et me remis à la composition. Ecrire et rapper étaient les deux seules choses positives que comptait cette terre, du moins c'était mon avis : peu importe ce qui se passait dans ma vie, la musique restait présente, inchangée, et ne jugeait pas, elle était mon échappatoire à cette merde appelée « réalité ». Je vendais mes chansons à ceux qui les voulaient bien, j'étais payé peu voir pas et je me produisai là où je pouvais, souvent dans les quartiers assez mal famés. Question d'adaptation, j'avais appris à me battre ; j'en avais bavé au début mais j'avais fini par gagner ma petite réputation, surtout que ça me défoulait et que j'avais besoin de ça quand j'avais soif. Je me rappelle très bien que ma première fois était arrivé juste après une de mes tentatives de suicides : j'avais essayé de multiples fois, sollicitant donc mes capacités davantage, et outre l'échec absolu, je m'étais vite retrouvé au milieu d'un groupe de personnes inconscientes et l'impression d'être rassasié pour au moins trois semaines. Après ça je m'étais contenté d'une tentative par technique, histoire de ne pas faire exploser l'indice de criminalité de la ville, même si ça ne me dispensait pas d'aller boire de temps en temps (souvent en même moment que les bagarres, pour faire d'une pierre deux coups).

Je saluai l'homme devant l'entrée de la boîte et entrai dans la pièce enfumée. Je préférai ne pas m'y attarder vu que je n'avais de toute façon pas suffisamment d'argent pour le gâcher en boissons alcoolisées ou en tabac et je me dirigeai vers l'arrière, là où une scène déjà occupée et des coulisses m'attendaient. L'ordre de passage n'était pas vraiment défini, c'était à celui qui s'imposait le mieux et donc souvent à celui qui tapait le mieux, mais je me débrouillais. Deux trois autres rappeurs que je connaissais vinrent me voir pour qu'on performe ensemble et on monta sur scène dès que les autres en descendirent. Il n'était pas difficile de faire bouger une salle pleine de mecs bourrés, tant que le rythme était correcte et qu'on lançait quelques vulgarités, et la plupart des rappeurs étaient donc acclamés.
Je sortis deux heures plus tard et rentrai chez moi satisfait. J'arrivai toujours à gagner un peu d'argent dans ce genre de soirée mais c'était loin d'être suffisant et j'accumulai les petits jobs à côté pour pouvoir payer le loyer. Mes parents avaient voulu me donner un peu d'argent mais j'avais refusé : ils ne roulaient pas sur l'or non plus et je ne voulais pas me reposer sur eux, déjà qu'ils se faisaient un sang d'encre à cause de mes tentatives de suicide et des rendez-vous catastrophiques chez le psy, ils n'avaient pas besoin d'un poids financier en plus...
J'avais pris très jeune la décision de ne plus aller chez ce pseudo médecin : si je voulais parler je pouvais le faire sans payer vingt balles l'heure... Je n'étais de toute façon pas en dépression, enfin pas vraiment, j'avais juste l'habitude d'être cynique et de ne pas m'intéresser à mon environnement. Tout était plus simple comme ça : je restreignais mes contacts sociales et ils ne pouvaient donc pas me faire de mal.
Des gens m'aimaient et voulaient mon bien ? Tant mieux.
Des gens me haïssaient ? Je m'en foutais.
On ne me comprenait pas ? Alors qu'on ne me juge pas.
Ils pensent me connaître ? Ils n'ont aucune idée...
Qu'est ce que ça pouvait faire si les gens ne m'aimaient pas ? Je n'étais né pour leur bon plaisir, qu'ils aillent chercher une autre distraction. C'était beaucoup plus simple de ne croire en personne que de donner sa confiance et être trahi...

Je répondis rapidement à ma mère pour qu'elle arrête de me spamer et ouvris mon ordinateur. Alors que je consultais mes mails je remarquai une annonce d'une petite compagnie : une audition pour former un groupe hip hop. Je n'aimais pas les idoles mais le hip hop ça allait, et j'avais besoin d'argent donc ça ne pouvait être que bénéfique...
Je cliquai sur le lien pour voir de plus prêt les informations : je n'avais plus qu'à être sélectionné...

NormauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant