7.2 Dans le coffre

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Elles commencèrent à ouvrir un à un les paquets. La plupart des objets étaient endommagés. Elles les jetèrent dans le désert. Talitre découvrit une caisse de poteries intactes, savamment enveloppées dans du papier-bulle. Elle en extirpa un vase pour mieux l'observer.

- Peint à la main, commenta-t-elle. Art chinois. IIIème siècle.

Dubitatif, Akhenaton lui prit l'objet des mains et regarda dessous. Quelques mots y étaient incrustés.

- Made in China, lut-il à voix haute.

- Parfaitement ce que je viens de dire.

Il éclata de rire. Cependant ils conservèrent la caisse : tout ce qui provenait de Terre avait de la valeur marchande.

Une demie-heure plus tard, il ne restait plus qu'un grand carton, entravé par des sangles. Ils l'ouvrirent prudemment et contemplèrent une chaise en bois à l'assise trouée.

- Elle est cassée, se morfondit Akhenaton. Personne n'en voudra jamais.

- Elle est simplement percée, lui expliqua Écho. Elle servait de toilettes je te rappelle. Le trou était nécessaire. Ne t'en fais pas, elle est parfaite. Mais il manque le pot qu'on plaçait en dessous.

- Il est là !

Talitre tenait fièrement le pot de chambre. Elle le remballa dans du papier-bulle et le rangea dans un carton. Akhenaton et Écho portèrent la chaise dans le corbillard et la fixèrent à l'aide des sangles.

- Il ne reste plus qu'à maquiller la scène du crime, soupira Écho en se massant la jambe.

- Talitre s'en est déjà bien chargée, constata Akhenaton. Pourquoi as-tu renversé la camionnette ?

- Elle m'a fait peur ! se défendit la jeune fille. Elle a tué Junior pendant que je conduisais.

- Je l'ai simplement assommé, déclara froidement sa sœur aînée. Je savais pertinemment ce que je faisais. Par contre, tu as failli nous tuer.

Talitre s'empourpra. Elle serra ses poings à s'en faire blanchir les articulations.

- Alors c'est de ma faute ? cria-t-elle. Et puis qui t'a appris à faire ça ?

- Papa.

Les deux syllabes avaient claqué dans le vent. Un silence de mort s'abattit sur le groupe. Soudainement furieuse, Talitre s'empara du pied de biche. Il fallait qu'elle tape dans quelque chose et le pare-brise lui faisait manifestement de l'œil. Alors elle frappa un grand coup et la glace s'émietta en milliers de copeaux de verres.

- Ah ! Ça fait du bien ! On peut y aller.

Elle tendit la barre en fer à Akhenaton et jeta sa veste aux couleurs de Trans-Désert. Elle s'installa côté passager, les bras croisés. La jeune fille ne pipa plus un mot.

Écho vérifia une dernière fois que le pauvre Junior était toujours vivant. Il n'avait pas bougé de son siège. Quelques débris de verre lui avaient griffé le visage, mais les coupures n'étaient que superficielles. Il respirait profondément. Alors elle rejoignit le corbillard et constata qu'il manquait un siège.

- Je vais à l'arrière, je présume ?

- Tu as un trône rien que pour toi, se moqua Akhenaton. Louis XIV t'en a fait cadeau.

Elle l'ignora et se trouva une place dans le coffre, au milieu de leur butin. Une fois prête, elle tapa sur la carrosserie. Le corbillard démarra en pétaradant. Il s'élança parmi les dunes, accompagné d'un nuage noir.

Profitant de leur relative intimité, Akhenaton se décida à interroger Talitre.

- Tu m'expliques ton accès de colère ?

- Je ne vois pas de quoi tu parles. Je pratique le yoga : je suis une personne très zen. Mon humeur est toujours égale.

- Donc c'est avec calme et sang-froid que tu as pulvérisé un pare-brise ? tenta-t-il.

- Assurément, marmonna-t-elle.

Le jeune homme n'insista pas. Il se concentra sur la conduite chaotique de la voiture funéraire.

Pour un grain de sableOù les histoires vivent. Découvrez maintenant