CHAPITRE 11: Cassandre

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CHAPITRE 11: CASSANDRE

Je n'ai pas dormi de la nuit.

Je n'ai pas cessé de penser à Laurène et à ses larmes dévalant ses joues samedi après-midi. Je n'ai pas réussi à la faire arrêter de pleurer malgré toutes mes tentatives pour la faire sourire. Et ça me fait me sentir tout bizarre. J'aurais aimé qu'elle me fasse un sourire même s'il n'était pas sincère juste pour que je parvienne à dormir au moins une nuit ce week-end. Mais ce matin, je dois traîner mon corps fatigué hors de mon lit pour aller au lycée, et comment expliquer que la seule chose que je veux faire c'est dormir. Ou bien aller voir Laurène.

Finalement, Laurène est ma motivation pour me lever ce matin parce que si je ne vais pas en cours, je ne la verrais pas. Et j'ai très envie de la voir. Et même de l'embrasser. Quand je ferme les yeux, je la vois samedi, le visage baigné de larmes. Et je vois ses lèvres, ses jolies lèvres rosées, tremblantes, qui retiennent depuis si longtemps tout ce que Laurène a à dire.

— Hey mec! lance Gaëtan alors que j'entre dans l'enceinte du lycée. T'étais où ce week-end? Pourquoi t'as répondu à aucun messages?

— J'étais malade, soupiré-je. J'ai dormi tout le week-end.

— Les boules, réagit mon ami en passant ses deux mains dans ses cheveux pour les ramener en arrière. T'as raté la soirée du siècle chez Aurél'!

— Grave, commente Jules qui pianote sur l'écran de son téléphone depuis que je suis arrivé. Mathis a dansé sur la table de la salle à manger avec une meuf super canon qu'il avait ramené, Aurél' a fait le tour du jardin en caleçon... Et Gaëtan a pécho Cassandre!

Gaëtan éclate de rire:

— On a juste couché ensemble frère, pas de quoi en faire tout un plat!

Je secoue la tête:

— Attends, quoi?! Tu t'es tapé Cassandre, Cassandre? La Cassandre qui est en L?

Mon pote hoche la tête et j'hallucine. Cassandre est la fille la plus inaccessible du lycée, quand on est arrivés au lycée, c'était la fille en couple depuis au moins un an et jusqu'à il y a deux minutes, j'étais persuadé qu'elle était encore avec son mec du collège. Quoi qu'il en soit, tous les mecs du lycée ont toujours rêvé de la pécho en sachant pertinemment qu'elle n'était pas ce genre de fille à coucher comme ça. Apparemment, Cassandre est ce genre de fille.

— Hé Tim, ça va?

Je tourne la tête vers Jules qui me fixe avec insistance, et je secoue la tête de haut en bas.

— T'as une sale tête mon pote, poursuit-il en posant sa main sur mon épaule. T'es sûr que tout va bien?

Je meurs d'envie de lui répondre que non, que la seule chose dont j'ai envie c'est d'aller voir Laurène et de lui répéter inlassablement qu'elle est importante et qu'elle ne doit pas se laisser abattre. J'ai aussi envie de lui dire que je ferais bien une sieste avant de commencer la journée tellement je suis fatigué, mais je n'y arrive pas.

— J'ai... J'ai rien, répondis-je avant de monter en cours.

⦁⦁⦁

J'ai passé la journée à lutter pour ne pas m'endormir. J'ai tout essayé: dessiner des cubes parfaits sur mes feuilles de cours, tailler tous mes crayons de couleurs en géo, boire de l'eau dès que l'envie de piquer du nez me prenait... J'ai même essayé de me tenir les paupières ouvertes avec mes doigts mais j'ai abandonné quand j'ai vu le prof me regarder avec un drôle d'air. Mais maintenant que la journée est finie, dormir n'est plus ma priorité. Non, d'abord je dois aller au parc voir Laurène pour lui prouver que ce que je lui ai dit l'autre jour n'étaient pas des paroles en l'air. 

Lorsque j'arrive et que j'aperçois sa queue de cheval rousse au loin, mon coeur se réchauffe. J'avance vers elle et constate avec étonnement qu'elle n'est pas assise sur l'herbe sous le chêne, mais sur un banc. Mon banc.

— Hey! la salué-je.

Laurène détourne son regard de son carnet et me lance un sourire timide, comme pour me dire qu'elle est contente de me voir. Et bon sang ce que j'aime la voir sourire. Je jette un coup d'oeil à son dessin par-dessus son épaule. Elle est en train de peaufiner le dessin d'un oeil. Et je suis fasciné par sa capacité à en capter les détails aussi petits soient-ils. En fait, je suis fasciné par elle tout court parce qu'elle est une personne inattendue, et qu'il me reste un tas de mystères à percer sur elle.

— Tu es belle aujourd'hui, je lui fais remarquer.

Et c'est vrai, elle est belle. Elle est belle tout le temps, mais aujourd'hui plus que d'habitude. Parce que les larmes ont disparu de son visage, parce qu'elle s'est confiée à moi, parce que ses yeux ont tant de choses à dire aujourd'hui. Et moi aussi j'ai envie de lui dire quelque chose aujourd'hui: je veux lui dire que j'ai envie de l'embrasser. Mais je ne veux pas la brusquer.

— J'ai beaucoup pensé à toi ce week-end. Tu sais, je pense chacun des mots que je t'ai dit, tu es importante et tu ne dois jamais laisser personne te dire le contraire. Et si quelqu'un te le dit, rappelle-toi que tu est importante pour moi.

Laurène hoche timidement la tête avant de me regarder à nouveau:

— Merci.

Je lui souris avant de fouiller dans mon sac à dos pour en sortir un paquet de Pim's à la framboise - parce que c'est pas tout mais j'ai faim - et je lui tends:

— T'en veux? 

Elle secoue la tête pour refuser.

— Tant pis pour toi alors, dis-je en enfournant un gâteau dans ma bouche.

Pendant qu'elle dessine, j'observe son profil avec attention, son petit nez en trompette moucheté de taches de rousseur, ses longs cils, ses joues rondes et les mèches rousses qui s'échappent de sa coiffure et qui cachent certaines zones de son visage. Elle est vraiment très mignonne. Et mon dieu ce que j'ai envie de l'embrasser.

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