Chapitre XVIII

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- Rima, c'est de la folie, tu ne peux pas y aller !

Cela faisait une demie-heure que l'on était rentré, Gwenaëlle était restée silencieuse tout le long du trajet mais maintenant elle essayait de me résonner  en passant par plusieurs moyens : supplications, menaces, chantage mais je ne lui ai pas cédé. Je voulais y aller donc j'y suis allée, elle pouvait ce qu'elle voulait, moi, je veux changer notre monde ! 

- Gwen, je comprends ton inquiétude mais tu ne peux pas changer ma décision. Arrête de gaspiller ta salive, j'irai c'est tout. 

- Très bien, me répondit-elle d'une voix cassante, vas-y mais ne revient jamais ici ! Non, tu sais quoi, c'est moi qui part !

Elle prit sa veste et sortit en claquant la porte, des larmes de tristesse et de colère me montèrent aux yeux, je frappais dans le mur le plus proche encore et encore. Mes phalanges étaient ensanglantées, je ne m'arrêtais que quand je ne sentis plus la douleur. Mes yeux étaient secs, je n'avais plus de larmes. Je me laissais glisser le long du mur et me recroquevillais sur moi. 

J'avais dû m'endormir car les rayons du soleil passaient à travers la fenêtre, Gwen n'était pas revenue hier. Je me levais, mes muscles étaient douloureux, particulièrement mes bras, je m'étirais longuement et vérifiai l'heure. Il était dix heures et demie, dans une heure vingt, il faut que je sois à la Grande Place. J'allais à la salle de bain, je fis couler l'eau de la douche qui était longue à chauffer. Je me déshabillai puis cherchais des bandages dans le petit meuble. En me relevant, je vis mon reflet dans le miroir, mes yeux étaient rouges et bouffis, j'avais de grosses cernes et mes cheveux étaient en batailles, je faisais clairement peur à voir. Je soupirai et rentrai dans la douche. Quand j'avais fini, je fis mes bandages puis allai prendre des vêtements dans la petite commode, j'en sortis un jogging noir ainsi qu'un pull à capuche large que j'enfilais rapidement. L'horloge indiquait onze heures trente-cinq, je ne pensais pas que j'étais restée aussi longtemps sous la douche, je mis mes baskets et sortis. 

Une fine pluie tombait, le temps était lourd et étouffant, mon cœur battait à tout rompre tandis que mon cerveau m'envoyait des signaux d'alerte en continue, me prévenant que cette journée ne se passera pas comme prévue mais je relativisais, c'était sûrement l'angoisse de la situation. Je mis la capuche et accélérais mon allure, je pouvais y être en dix minutes en empruntant les petites ruelles au lieu de la rue principale. Je tournais encore et encore dans ce dédale de pavé et enfin, j'y arrivais. La Place était déjà envahie de monde pourtant cela ne commençait que dans dix minutes. Je me frayais difficilement un chemin dans la foule mais j'avais réussi tant bien que mal à arriver pratiquement devant l'estrade. 

J'attendis patiemment au milieu de tous ces gens qui discutent et débattent de tout ça et malgré le fait que la majorité des choses que j'entendis était pour l'exécution de ces filles, quelques voix étant contre me parvenaient jusqu'aux oreilles. Au loin, des bruits de moteur s'étaient fait entendre, je ne bougeais pas, je restais calme, attentive au cas où si l'on avait besoin de moi, je me tenais prête, il ne fallait pas échouer. Après tout, n'avais-je pas perdu Gwen à cause de tout ceci ? 

Les fourgons se placèrent à côte de la scène, alignés côte à côte, les gardes descendirent et commencèrent à discuter ensemble puis deux des quatre hommes ouvrirent les portes du véhicule le plus près de la scène et sortirent cinq filles, je n'en reconnaissais une ou deux vaguement, sans plus. Soudain, un cinquième fourgon, celui semblait être encore plus blindé que les quatre autres. Le cinquième soldat ouvrit les portes, trois hommes bien vêtus en sortirent et deux soldats, je reconnus Jacob. Quand ses trois hommes montèrent sur scène, mes poings se serrèrent automatiquement en voyant  visage du Premier Ministre, ses traits fins, son petit sourire narquois, ses yeux vous dévisageant avec toujours ce petit air supérieur de merde, son nez tout fin en trompette, il n'y avait aucune grâce dans ce mélange. 

Le second était très connu dans l'Empire, c'était Pierre LeLandre, c'était un écrivain politique qui se considérait comme un philosophe moderne et respectueux de tous mais dans ces écrits vous pouviez y lire que les pauvres étaient des sous-races, que la femme était une source de problème qui ferait mieux de rester chez elle mais bien sûr, tout cela n'est visible que dans le sens caché de ces livres la majeure partie du temps, personne ne voyait ce sens-ci, ses lecteurs ne se focalisaient que ce qu'il leur était mieux sous le nez et rien d'autre. 

Enfin, je vis cet homme, élégant et élancé, des cheveux châtains en bataille, un uniforme impériale rouge et blanc, des gants cachant ses mains et des chaussures en cuir bien cirées. Il devait avoir la vingtaine tout au plus, ses yeux noisettes passaient et repassaient sur la foule, il la scrutait comme s'il cherchait quelqu'un. Quand il était apparu sur la scène, tout le monde s'est mis à parler, commentait, c'était la première fois que l'on voyait l'Empereur.  Je l'imaginais...plus vieux, j'étais un peu déconcertée mais je me concentrais de nouveau. 

L'adrénaline couru dans mes veines quand je vis nos chefs politiques s'asseoir sur deux hautes chaises tandis que LeLandre s'approcha du micro. Il se racla la gorge puis commença à parler :

- Bonjour Mesdames et Messieurs, aujourd'hui nous sommes ici pour l'exécution de quarante filles ayant assassiné Gregory Lorcht à L'aide d'un revolver 22lr. Voici l'énumération des différents faits : prostitution,...

Pendant une seconde, un point rouge apparu sur son front puis le corps s'écroula au sol. Il y eu un moment de silence d'une demie seconde puis les gens se mirent à crier, à courir. Je vis deux gardes tombaient au sol. J'étais balancée de tous les côtés par les gens, j'essayais de garder le contact visuel avec l'estrade et les fourgons. Je vis le corps de l'Empereur tomber au sol, du sang maculait les vêtements de Jacob et au même moment j'entendis trois coups de feu. Le deuxième garde de la scène prit le bras du Premier Ministre et le fit descendre et le conduisit jusqu'à son fourgon, il démarra en trombe direction le château, impossible de le rattraper. 

Je vis la chevelure blonde de Kate arrivait près des camions ainsi que celles de Simon et John. Jacob était déjà à côté des véhicules, il tendit la main pour ouvrir la portière, il saisit la poignée et un clic retentit. Le temps sembla s'écouler au ralentit, les quatre véhicules explosèrent tour à tour, le corps de Jacob fut propulser à côté de moi, je n'avais pas remarqué que j'étais la dernière personne sur la Grande Place. Je ne pouvais pas bouger, j'étais paralysée, je n'étais pas consciente de ce qui se passer autour de moi comme si ce n'était pas moi qui vivait ça. 

Kate, John et Simon arrivèrent en courant, la blonde posa sa tête sur sa poitrine en regardant sa montre, mon meilleure ami sortit son téléphone et appela ce qui semblait être Alexandra. Le photographe observait les alentours

- Alex arrive. Quel est son état ?

- Il respire difficilement, son rythme cardiaque est faible, il souffre de graves brûlures, second ou troisième degrés, sur une grande surface de son corps et sûrement d'autres choses qui dépasse mes connaissances médicales. 

Une ambulance arriva, Amaury en sortit précipitamment avec Alexandra, ils prirent à l'arrière une civière, avec l'aide de John et Simon, ils mirent le blessé dessus et le mirent dedans, Amaury alla à l'arrière avec Alexandra et Kate tandis que je montai devant avec les deux autres. John conduisait, il démarra en trombe et fila à travers les rues à vitesse folle mais avec une précision remarquable. Je regardais le paysage à travers la vitre passager, en jetant de temps à autre un cou d'œil au rétro qui donnait sur la grille qui nous séparait avec l'arrière, je les voyais s'affairer auprès de Jacob, j'espérais sincèrement au fond de moi qui aillait s'en sortir.

Je ne savais pas depuis combien de temps nous étions dans ce véhicule, je ne savais non plus au nous allions. Derrière, il avait réussi à stabiliser l'état de Jacob, il était sous un respirateur transportable, ils avaient désinfecté ses brûlures mais sa vie n'était pas garantit, à deux fois, ils ont dû le réanimer. Où nous allions, la chef nous avait dit qu'il y avait le matériel médical nécessaire pour le guérir. 

J'étais fatiguée mais quand je fermais les yeux, je revoyais Gwenaëlle partir, LeLandre tombait au sol, les gardes tombait sous les flèches puis sous les balles, La lame de Jacob sous le cou de l'Empereur, les fourgons explosaient, le corps du brun atterrir à côté de moi dans un bruit sourd. Je ne comprenais pas comment nous avions pu en arriver là, normalement nous aurions dû être avec quarante filles, tous sain et sauf sans même une égratignure.

Aujourd'hui, nous étions censé réussir. Aujourd'hui nous avions échoué . 

Le Nouvel Ordre tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant