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J'ai toujours aimé être dans le noir. Dans mon ancienne maison, mes volets étaient toujours fermés. C'était très rare que je les ouvre et il fallait que mes parents me forcent pour qu'il y ai un peu de lumière dans ma chambre. Je préférais avoir pour seule lumière celle de ma table de chevet ou encore mes guirlandes.

Mais en vivant dans le Centre je me suis rendue compte que je ne supportais plus le noir. Il me rappelait la solitude et me faisait peur.

Quand j'étais chez moi, j'avais la possibilité de voir la lumière et je la voyais chaque fois que je sortais. Je profitais de la lumière et du noir, du jour et de la nuit.

Ici, je n'avais pas cette liberté et le noir m'oppressait.

Aucune fenêtre dans aucun bâtiment et encore moins dans les chambres. Je manquais de cette lumière. Je voulais juste qu'un rayon de soleil frappe ma peau et illumine mes yeux mais je ne pouvais pas. Et je ne pouvais pas me permettre de réveiller Marc encore une fois alors même la lumière artificielle m'était inaccessible.

Il n'y avait même pas ce petit rayon de lumière qui provient du couloir sous la porte, tant les portes étaient imposantes.

Je m'étais levée doucement, faisant attention à chacun de mes mouvements et je m'étais dirigée vers la salle de bain. J'avais fermé la porte et j'avais appuyé sur l'interrupteur.

De la lumière.

Artificielle néanmoins.

Ma tête était toujours aussi laide, si ce n'est plus. J'étais blanche et de longs cernes noirs s'étaient accrochés à mes yeux. Même mes cicatrices n'étaient pas aussi voyantes.

Je m'étais passée un coup d'eau sur le visage et j'avais enfilé ma combinaison.

Mes cheveux étaient encore mouillés mais je les avais quand même brossés avec un peigne qu'ils avaient fourni.

Une fois pratiquement prête, j'étais retournée dans la chambre et la lueur de la salle de bain avait reflété sur le visage de Marc.

Il était adorable. Sa main soutenait l'oreiller et sa joue était posée dessus. J'étais restée immobile pendant de longues secondes puis j'avais éteint la lumière de la salle de bain.

J'avais pris ma clé et j'étais sortie de la chambre.

Je ne savais même pas quelle heure il était mais les couloirs étaient déserts. J'avais descendu tous les escaliers et j'étais arrivée dans le hall.

- Lève-tôt.

J'avais tourné la tête directement vers cette voix et j'avais aperçu un homme. Il avait traversé le hall et avait croisé mon regard. Il portait une tenue noire et était en train d'enfiler des gants.

Le tatoueur.

- J'ai pas dormi de la nuit.

- Le stresse ?

- Crise d'angoisse.

- Il faudrait le dire à Supra. Il réglera le problème pour les futures générations.

- Crois-moi il ne peut rien faire pour ça. Enfin si, la seule chose qu'il peut faire c'est nous laisser chez nous.

Il avait émis un léger rire et j'avais souri.

- Tu es le tatoueur, je ne me trompe pas.

- Tu as vu d'autres personnes porter des tenues noires, ici ?

- Pas faux. Mais comment ça se fait que tu sois levé si tôt ?

- Je travaille, moi.

- Il y a des personnes qui ne sont pas encore tatouées ?

- Parmi vous tout le monde est tatoué mais aujourd'hui il y a Les Particuliers qui ont eu quinze ans cette semaine qui viennent.

- Ah.

J'avais baissé la tête, pensant à tous ces gens que je ne verrais plus jamais.

- Et les autres jours tu travailles ? Avais-je demandé pour penser à autre chose.

- Parfois oui, quand il y a des imprévus, sinon je participe aux réunions ou autres.

- Tu as un métier tranquille.

- Plus ou moins.

Il avait paru gêné, comme si ma question l'avait embarrassé.

- Et comme on risque de se recroiser, je m'appelle Léo. Comme ça tu m'appelleras autrement que " le tatoueur ".

- Moi c'est Aria, au cas où tu aurais oublié.

- Aria ? C'est toi la fille qui a pété les plombs hier ?

Mon coeur avait fait un bond. " La fille qui a pété un plomb ", c'est comme ça que les gens me voyaient désormais ? J'ai simplement pris peur, j'ai paniqué, je n'ai pas " pété les plombs ".

- C'est comme ça qu'on me définit maintenant ?

- Disons qu'on m'a parlé de toi comme ça et je n'avais pas réalisé que c'était toi.

J'avais lâché un rire jaune.

- C'était une amie à toi ?

- " Amie " c'est un bien grand mot. Je ne la connaissais que depuis hier matin, mais j'avais discuté avec elle, elle m'a dit qu'elle allait mal, elle m'a raconté comment les gardes la traitaient etc. j'ai voulu l'aider, j'ai essayé de la rassurer mais apparemment ça n'a pas suffi.

- Je comprends. Mais tu découvres autant le Centre que tous les autres, je travaille ici depuis quelques temps alors je peux te conseiller, mais toi tu n'es qu'une adolescente perdue alors pense à toi et à rien d'autre.

- C'est pas dans ma nature.

- La nature n'existe plus ici. C'est triste à dire et ne déprime pas encore plus, mais sache le. Ici ce sont les règles qui comptent, c'est entrer dans le rang, c'est tout.

Mon regard s'était perdu. Il avait fallu de longues secondes pour que son discours arrive jusqu'à mon cerveau.

- Merde il est déjà sept heures ! Il faut que j'y aille, si tu as besoin hésite pas.

Il m'avait coupée dans mes pensées. J'avais relevé la tête et je l'avais regardé. Quand il était parti j'avais cru apercevoir qu'il m'avait fait un clin d'oeil.

- Attends !

Il s'était retourné rapidement et m'avait fixée.

- Est-ce que tu sais où c'est le jardin ?

- La porte derrière toi.

Il était parti en trottinant et je m'étais retournée.

En face de moi il y avait une grande porte aussi imposante que celle par laquelle on entre dans le Centre. J'avais poussé la porte doucement et l'avait refermée derrière moi.

La sensation avait été immédiate: l'air frais du matin m'avait fouetté le visage et j'avais fermé les yeux.

Le vent s'était englouti dans mes cheveux et le soleil avait tapé sur ma joue. Ce que j'avais attendu depuis ce que j'avais l'impression être une éternité. Je m'étais sentie bien l'espace d'un instant, j'avais l'impression de revivre.

Puis j'avais ouvert mes yeux. Le jardin était immense.

Une grande zone de pelouse où on pouvait courir sans s'arrêter, des buissons et des fleurs sur les côtés.

J'avais avancé de quelques pas et j'avais découvert plusieurs zones cachées de la où j'étais.

Je m'étais faufilée entre les plantes et j'avais retrouvé une part de moi.

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