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- Marc, regarde. Lui avais-je dit en pointant la jeune fille du doigt.

Il avait regardé dans la direction et était resté à observer pendant quelques secondes.

- C'est la fille dont tu me parlais ?

- Oui, et elle a l'air d'avoir des ennuis.

- Reste en dehors de ça.

- Quoi ? Non !

- Si tu y vas c'est toi qui va avoir des ennuis.

- Si c'était moi en train de me faire embêter, tu aurais fait quoi ?

Il avait réfléchi un instant et son regard m'avait fait comprendre qu'il connaissait la réponse mais qu'il ne voulait pas l'avouer.

- Bon d'accord vas-y. Mais je reste pas loin, on sait jamais.

Il avait avoué.

Je m'étais avancée doucement pour pouvoir écouter sans me faire voir.

- Si je vous dis que je n'ai pas faim !

- Et nous on t'oblige à manger.

- Pourquoi ?! Je suis sûre que je ne suis pas la seule à ne pas manger !

- Nos collègues s'en chargent.

- J'y crois pas ! Comme si vous vous inquiétez de la santé des gens ici !

Les deux hommes avaient commencé à s'approcher dangereusement d'elle et ils lui avaient attrapé les deux bras de force en la tirant vers eux.

- Lâchez-moi !

- Crois-moi que ton petit manège ne va pas durer bien longtemps avec nous.

Je m'étais approchée rapidement d'elle et innocemment je l'avais appelée.

- Jade ? Tu viens on t'attend pour manger. Avais-je menti en montrant Marc au loin qui regardait ailleurs.

Elle m'avait fixée sans comprendre ce que je faisais. Voyant mon regard elle avait fini par acquiescer.

- J'arrive.

Elle avait retiré ses bras des deux hommes qui, à leur tour, l'avaient fixée sans comprendre.

Elle s'était approchée de moi et nous nous étions éloignées pour nous mettre dans un coin plus discret.

- T'étais pas obligée, tu aurais pu avoir des problèmes.

- Je sais, mais je pouvais pas te laisser comme ça.

- Merci.

- C'est normal. Tu es sûre que tu veux pas venir avec nous ?

- Oui, certaine. J'y arriverai pas.

- A rester avec nous ? Pourquoi ?

- Parce que je vous comprends pas.

- Comment ça ?

- Tu m'as dit que tu étais comme moi: que tu aimais tes parents et que sans eux tu n'étais rien.

- Oui.

- Alors pourquoi tu es venue ici ?

- Parce que j'avais pas le choix. C'est la loi. Tu es bien venue toi aussi.

Elle avait baissé la tête.

- Je sais que c'est difficile et peut-être que des gens se rebelleront dans les générations futures, mais pour l'instant on est les premiers ici, on a été appelés et on est venus parce qu'on ne sait pas à quoi s'attendre sinon. La loi est faite, on expérimente et on voit ensuite. Comme des espèces de cobayes.

- Triste vie.

- Je sais. Peut-être qu'à quelques années près on aurait pu vivre autrement. Mais maintenant je suis ici et je veux juste penser à ma vie ici et à comment on envisage le futur.

Une larme avait coulé sur ma joue. J'avais voulu être discrète parce que si j'avais pleuré devant elle j'aurais montré ma faiblesse et ma tristesse et c'est bien la dernière chose à montrer quand on veut rassurer quelqu'un.

- Fais comme moi. Ne pense pas à ta vie qui va rapidement devenir du passé, mais pense au futur et à ce que ta vie pourrait être.

- Décidément je ne te comprends pas.

- Je vais être honnête avec toi, quand j'ai appris la nouvelle je n'ai fait que pleurer. Jour et nuit, quand je regardais mes parents, mes amis, ma chambre et même ma cuisine je pleurais. Quand je lisais la lettre, je pleurais. Et quand en m'endormant j'entendais mes parents pleurer, je pleurais aussi. Ce matin aussi j'ai lâché une larme en quittant mes parents et j'ai même failli m'écrouler, mais j'étais aussi tellement stressée et poussée par ce système que j'ai pensé à autre chose. Depuis ce matin je ne fais que ça: essayer de penser à autre chose et je m'en sors pas trop mal, mais je sais que ce soir, quand sûrement tout le monde dormira, moi je pleurerais dans mon lit ou dans la salle de bain en essayant de ne pas réveiller Marc. D'ailleurs, il est d'une grande aide pour moi. Il m'a tout de suite mise en confiance, on a discuté et on a ri ensemble et ça m'a beaucoup aidée. C'est pour ça que je te dis de rester avec nous ou avec ton compagnon, parce qu'on peut t'aider.

J'avais l'impression qu'elle réfléchissait. Comme si elle avait décortiqué chacun de mes mots et qu'elle avait essayé de les assimiler. Mais elle n'avait rien dit, elle s'était contentée de baisser la tête une nouvelle fois.

- Alors ? Tu vas venir avec nous ? Avais-je finalement demandé après un long silence.

- Je ne sais pas. Je crois que je vais vraiment manger quelque chose finalement.

- Tu veux que je vienne avec toi ?

- Non c'est gentil, je vais me débrouiller, merci beaucoup.

- Pas de soucis.

Elle avait commencé à s'éloigner et moi j'étais partie rejoindre Marc.

- Merci de m'avoir attendue, tu nous as été d'une grande aide en plus. Avais-je dit en riant.

- Ah bon, pourquoi ?

- Laisse, je te raconterai peut-être un jour.

Il m'avait regardée d'une manière indescriptible et j'avais encore plus ri.

Nous avions ensuite marché jusqu'au bâtiment loisirs et nous avions rejoint la salle de jeux où Raya et Jules nous attendaient déjà.

- Désolée du retard, Aria devait retirer son costume de super héros. Avait lancé Marc.

Je lui avais donné une petite tape sur le bras et en lui chuchotant un petit " arrête " pas très discret.

- Pourquoi ? Avait demandé Raya dans l'incompréhension.

- Je sais pas elle m'a dit qu'elle me raconterait peut-être un jour.

Raya et Jules n'avaient rien compris de ce que Marc leur avait raconté et lui et moi en avions bien ri.

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