Mon rendez-vous avait été fixé le soir-même. J'avais demandé à retourner dans ma chambre le temps de récupérer un élastique pour m'attacher les cheveux avant d'aller voir le psychologue, Supra avait accepté mais il avait demandé à un garde de m'accompagner.
Nous étions donc montés jusqu'à ma chambre et le garde s'était mis sur le côté pour m'attendre tandis que j'étais rentrée sans me soucier de si j'étais seule ou non.
Marc avait retiré sa tête de ses mains et m'avait fixée à peine une seconde avant de se lever et de s'approcher de moi. J'avais poussé sa main de mon bras et j'étais partie vers la salle de bain sans un mot.
- Tu étais où ? Je t'ai cherchée partout !
- Comme d'habitude.
- Tu t'enfuies tout le temps aussi !
Ça avait été trop.
- Je m'enfuis ? Tu rigoles ? Je n'ai jamais été aussi bien qu'auprès de toi, jamais je ne me suis enfuie ! Enfin si, tu as raison: tout à l'heure je me suis enfuie, parce que je préférais ça que rester près d'un traitre.
- Un traitre, carrément ? Je ne voulais pas te « trahir », avait-il dit en imitant des guillemets avec ses doigts, je voulais simplement nous éviter des ennuis.
- On a deux ans pour les éviter ces ennuis et crois-moi que c'est largement suffisant !
J'avais récupéré mon élastique et j'étais prêt de la porte lorsqu'il m'avait attrapé le bras.
- Tu vas où, là ? On peut pas s'expliquer ?
- Non j'ai pas le temps, j'ai rendez-vous avec un psy, figure-toi ! On se demande à cause de qui.
- Quoi ? Pourquoi ?
- Parce qu'à cause de tous ces problèmes, Supra pense que je veux me suicider, donc il m'oblige à voir un psy. Profite bien de ta soirée. Avais-je conclu avant de claquer la porte et de m'élancer dans le couloir, un garde à mes talons.
Il m'avait accompagnée jusqu'au bureau du psy et m'avait laissée avec une femme habillée de la tenue officielle du Centre.
- Bonjour Aria.
- Bonjour.
Je m'étais assise sur un fauteuil face à la jeune femme et j'avais croisé les jambes.
- Je m'appelle Psiha.
- Enchantée.
Elle m'avait fait un sourire chaleureux et avait commencé à me poser des questions.
- Comment tu te sens ?
- Vous avez tous la même question à la bouche.
- Parce qu'on s'inquiète tous.
- Pas pour moi en tout cas.
- Pour qui penses-tu qu'on s'inquiète ?
- Pour votre Centre.
- Pas moi. Pourquoi je devrais m'inquiéter pour le Centre ? Ce n'est pas moi qui l'ai créé.
- Non mais grâce à lui vous travaillez, vous faites partie de l'Elite, alors vous avez tout interêt à faire en sorte de garder votre travail.
- C'est donc ce que tu penses ?
J'avais légèrement ri et j'avais levé les yeux au ciel.
- Je suis là pour t'aider, tu peux me faire confiance.
- J'ai beaucoup de mal.
- Pourquoi ?
- Peut-être que vous portez un micro ou qu'il y a une caméra dans cette salle. Et vos notes ? Vous pouvez les montrer à n'importe qui, à Supra même peut-être.
- Pourquoi est-ce que tu te méfies autant ?
- Parce que j'ai des raisons d'être méfiante. Je n'ai confiance en personne ici.
- Tu n'as trouvé personne qui aurait pu être digne de ta confiance ?
- Je pourrais vous répondre, mais rien qu'avec ça Supra pourrait me détruire, alors je ne dirais rien.
- Donc tu ne veux pas parler ?
- Non. Je pourrais vous dire beaucoup de choses mais je ne dirais rien.
- Et qu'est-ce que tu pourrais me dire ?
Elle avait essayé de me piéger, je l'avais vite compris. Peut-être que je pouvais vraiment lui faire confiance et qu'elle ne dirait rien à personne, mais j'avais appris à me méfier et sa question avait été parfaite et placée au bon moment. Elle avait pensé que je dirais ce que j'avais sur le cœur, en réalité j'avais une autre idée en tête.
- Je pourrais vous dire que je ne suis plus la jeune fille faible que j'étais au début. Je pourrais vous dire que Supra m'a avoué une des ses faiblesses et que je suis prête à l'utiliser contre lui et contre vous tous. Depuis le début mon compagnon Marc et moi montrons que tout va bien, on se range et on marche un pied après l'autre comme tout le monde ici, on lèche les bottes de chacun. Ça ce n'est que la journée. Je pourrais vous dire que le soir quand on rentre dans notre chambre on met en place des plans, pour s'évader ou pour tous vous renverser. On en fait plusieurs et on choisit lequel est le meilleur et lequel ferait un plan B parfait. Je pourrais vous dire tout un tas de choses, mais je ne dirais rien. Parce que je ne ferais pas la même erreur que Supra et je n'avouerai pas mes faiblesses, moi. Ni celles de Marc, même si j'en ai bien envie.
J'avais décidé de m'arrêter là. J'aurais pu dire beaucoup de choses encore, mais j'avais vu le regard de Psiha. Elle était choquée et j'avais même pu déceler de la peur dans son regard. J'avais réussi.
Maintenant je n'avais plus qu'à attendre sa réaction. Elle avait deux choix qui s'offraient à elle: tout avouer à Supra, pour qu'il remédie à mes problèmes et qu'il me contrôle ou ne rien dire de peur que je ne lui fasse du mal.
Mais peu importe ce qu'elle avait choisi, dans les deux cas j'allais improviser et dans les deux cas j'étais en position de force grâce à une chose: je bluffais.
Il y avait une part de vérité dans cette histoire, mais si j'avais appris quelque chose au fil du temps, c'est que pour qu'un mensonge soit réaliste il fallait mettre une vérité dedans. Et cette technique était la meilleure, la preuve: Psiha était paralysée.
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Gouvernement Dirigé
Science FictionLe monde a terriblement changé. Des lois, un centre, un dirigeant et du changement. La société n'est plus celle qu'elle était. Plus personne ici n'est libre de faire ou de dire ce qu'il veut. « Enfile tes bottes et marche droit ». Cinq générations...