Aliens & Compagnie

Chapitre 11

Je tente de déceler sur le visage de Maya la moindre trace de plaisanterie. Je n'en trouve pas. Maya ne plaisante jamais.

« Vous n'étiez pas censés être trois ? », grince t-elle.

Cindy et moi échangeons un coup d'œil, embarrassés.

« Erika a été, euh... écrasée par l'alien. »

Maya ne semble absolument pas surprise.

« Eh bien, lâche t-elle, j'imagine que la Protection pourra se passer d'elle. Prenez votre camion et suivez moi. »

Nouveau malaise.

« Euh...

- Quoi encore ? », soupire Maya, en montant sur sa moto.

Cindy émet un petit rire gêné. Il désigne du menton la fourgonnette bleue, à quelques mètres de là, qui ressemble d'ailleurs plus à un tas de ferraille informe qu'à une fourgonnette.

« Dites moi que je rêve », marmonne Maya.

Elle passe une main dans ses cheveux hirsutes, jette un coup d'œil à la fourgonnette. Elle a l'air épuisée.

« On va y aller à pied, décrète-t-elle, à contrecœur.

- Quoi ? Mais... Et les aliens ?, balbutie Cindy.

- Tu as une autre solution, peut être ? »

Il se tait instantanément.

Cela semble satisfaire Maya. Tirant sa moto, elle s'engage dans une rue d'un pas décidé.

« Maya ? »

Elle ne me répond pas. Cela ne m'empêche pas de poursuivre :

« Tu as dit qu'il n'y avait plus de Centre ? »

Elle se raidit, sans pour autant s'arrêter de marcher.

« Oui. Les aliens l'ont attaqué juste après votre départ.

- Mais il y a déjà eu...

- Une attaque la nuit dernière, oui. Ils ont récidivé. Ils ont profité de notre vulnérabilité pour revenir.

- Ce n'est pas possible... Je pensais que le Centre ne pouvait pas être détruit...

- Tout le monde le pensait. »

Maya ne me regarde pas. Elle paraît concentrée sur l'itinéraire à prendre, comme si choisir les meilleures routes possibles était sa façon de ne pas se laisser submerger par les émotions. Elle a la voix cassée, les yeux bouffis, les traits tirés, elle a perdu son mentor et son foyer dans la même journée, elle n'a plus rien, hormis ses deux sabres, son revolver et sa moto, et pourtant elle marche. Sa détermination ne paraît pas l'avoir quittée. Et, même si je rechigne à l'avouer, je crois que Jules a raison lorsqu'il décrit Maya comme une personne beaucoup plus forte que lui. Ou que moi.

Cindy nous suit, un peu en retrait. Un coup d'œil en arrière m'indique qu'il est occupé à regarder les étoiles avec un air béat. J'étais en train de me dire qu'il était assez étrange, voire complètement taré, quand Maya reprend :

« Tu sais, les aliens sont peut être effrayants, mais ils ne sont pas intelligents. Dès qu'un d'entre eux s'approchait trop près du Centre, il se faisait tuer. On avait des Protecteurs qui montaient la garde nuit et jour. Sauf que ce soir, ils se sont... Ils se sont organisés. Ils étaient extrêmement nombreux. Ils ont frappé vite, ça a duré... Je ne sais pas. Même pas un quart d'heure. En un quart d'heure, ils ont détruit Euralille et les deux gares. Il n'y a plus rien. »