9 - L'auto-persuasion n'est qu'illusion

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PDV Ginny Weasley, Terrier, 18h53

« - Mais qu'est-ce qu'il t'arrive ? Qu'est-ce qu'il nous arrive, Ginny ? »

La voix de Terry faiblit et il me prit le menton, amenant ainsi mes yeux embués à croiser les siens.
Je fus alors tentée par la facilité, tentée de lui répondre que tout allait bien entre lui et moi et que j'avais hâte de l'épouser.
Mais la facilité n'est que la partie visible de l'iceberg de la réalité.
La réalité, elle, est bien plus tortueuse et complexe.

« - Je ne sais pas. Je suis désolée, je n'en ai aucune idée. »

C'était vrai, c'était même diablement véridique.
Notre relation avait pris un tournant que ni lui ni moi n'avions réussi à gérer.
De terribles questions revenait en boucle dans ma tête, me rendant ainsi proie à une contrariété sans nom.

« - Dans ce cas, peux-tu me dire pour quelle raison je me bats ? Quel but ais-je, à insister pour le mariage et à persister à t'aimer sans être certain que ce sentiment est partagé ? »

La seule réponse que je parvins à lui offrir fut un douloureux regard empli de découragement.

« - Est-ce que tu m'aimes toujours, au moins ? » murmura-t-il avec amertume.

La question fatidique.
Encore une fois, je n'étais pas sûre de la réponse.
Pour la première fois de ma vie, je réalisai pleinement que le destin est ce qu'il est et que penser pouvoir le contourner est se bercer d'illusions.
Depuis le début, cela était écrit.
J'avais beau me démener pour l'empêcher, ce fléau était inscrit au plus profond de mon coeur.

« - Je... »

Ma gorge se noua douloureusement et je ne parvins à achever ma sentence.

« - C'est Potter, n'est-ce pas ? » balbutia-t-il, affligé. « Ça a toujours été lui.
Comment vivre avec son ombre sur le dos ? Comment l'égaler, le surpasser ?
C'est impossible. J'ai essayé, Ginny, putain que j'ai essayé. Mais à quoi bon ?
À quoi bon tenter de te faire m'aimer alors que ton cur appartient depuis des années à un autre ? »

Sa voix s'enroua dans un sanglot devant mon absence de réaction.
J'étais figée par une force invisible qui m'empêchait de penser et de produire le moindre mouvement mais je ne paraissais même pas le remarquer.

Ce ne fut que quand, valise en main, il claqua violemment la porte de ma chambre qu'une vague de conscience me submergea.
Le grincement des escaliers finit à me ramener brusquement à la réalité.

D'une main tremblante, je retirai la bague de mon annulaire droit et le posai sur mon chevet.
Je ramenai ensuite mes genoux contre moi et laissai quelques larmes de regret couler.
Quatre belles années de plénitude et de bonheur venaient de s'achever avec une brusquerie sans nom.

Terry avait tord. Cela faisait un bon bout de temps que je n'étais plus amoureuse de Harry Potter, cette période de ma vie était même révolue depuis une poignée d'années.
Avec la conviction que l'auto-persuasion n'envahissait aucunement mes pensées, je m'endormis le coeur lourd.

*

*

*

PDV Externe, 1h09

Une ombre se dessina dans la nuit.
Agile, elle longeait les longs murs de pierre sur la pointe des pieds et ne cessait de jeter des regards en arrière, par peur d'être suivie ou remarquée.
Ce qu'elle s'apprêtait à faire était illégal et elle était en toute connaissance des peines qu'elle encourait.
Arrivée devant un imposant monument en pierre, elle s'immobilisa et, après s'être une dernière fois assurée de la déserté des environs, sortit de sa manche sa baguette magique et la braqua sur elle.

Petit à petit, la silhouette s'effaça de l'étroite ruelle, purgeant ainsi toute trace de perturbation.
Mais si quelqu'un s'était trouvé là, il aurait pu assurer avec certitude que le profil n'était pas devenu invisible.
Non, étrangement, il semblait qu'il avait pris la couleur de l'environnement de sorte qu'on ne pouvait plus le distinguer.

Une dizaine de minute passèrent dans une taciturnité inégalable jusqu'à ce que de bruyants éclats de voix se firent entendre.

« - Burrows est exécrable. Ma femme va finir par me demander de changer de boulot.
Une heure du matin, merde ! Et demain, ça recommence, réveil à six heures ! Quelle vie, je vous jure... »

Un homme petit et replet lui adressa une tape dans le dos et sourit d'un air jovial.

« - C'est les dures lois de la routine, vieux.
Toi au moins, tu n'as pas passé la journée avec la vieille Kalthy du premier. Elle est insupportable, je suis sûr qu'elle n'a même plus besoin de soins pour son dos. »

Un bref hochement de tête de son collègue avant un craquèlement signèrent leur transplanage.
S'ils avaient pris le temps de s'intéresser au grondement sourd que produisit la lourde porte en se refermant, ils se seraient rendus compte du retard que prit le sortilège de protection à se reformer.

*

*

*

PDV Hermione Granger

Désillusionnée, je parcourais à grandes enjambées les couloirs de l'hôpital.
Je savais pertinemment que je n'avais aucune autorisation de me trouver ici et que j'étais dans l'illégalité la plus totale.
Pénétrer dans la chambre d'un patient lorsqu'on n'était pas guérisseur ou sans disposer de permission était un acte puni par une année à Azkaban.

L'adrénaline n'eut pas le temps de monter jusqu'à mon cerveau que déjà, je baissais le loquet de la porte immatriculée 394.
Pour la première fois, devant le corps inanimé de Fred, j'avais une confiance en moi qui était inébranlable.

D'un geste, je brandissais ma baguette et la pointait droit sur lui. J'allai commencer à réciter l'incantation lorsque j'eus une soudaine prise de conscience.
Et si je trébuchais sur un mot ?
Et si je commettais une erreur irréparable pour son état ?
Ou pire, si je le tuais ?

D'une main tremblante, j'abaissai ma baguette en observant le teint pâle et maladif de Fred.
« Je ne pourrais jamais me le pardonner. » me dis-je alors.

Puis, inexplicablement, le sourire de Fred et ses clins d'ils discrets mais incessants me revinrent en mémoire.
Il m'était impossible de laisser passer cette occasion, impossible d'attendre et de faire attendre sa famille des heures supplémentaires.

Prise alors d'un élan de courage, je me redressai, inspirai et me raclai la gorge.

« - Sanitatem flammae daemonium mortem voluntariam. »

*

*

*

Pensées de Fred Weasley

Je l'entendis sauter dans les bras d'un Harry que je savais couvert de sang.

Cela faisait longtemps que j'avais cessé de croire en mon rétablissement.
Je restais à présent les yeux fermés, laissant échapper à maintes reprises un flot de larmes couler sur mes joues meurtries.

« Qu'on me tue »

J'avais pour seul espoir que l'on m'achève.
Ici, dans le monde où j'étais prisonnier, je pouvais frapper ma tête contre le mur de pierre, ma vie n'en subissait aucun dommage.
Ça me provoquait simplement un mal de chien.

J'avais perdu la notion du temps depuis une durée indéterminée ; j'avais évidemment fini par cesser de compter les boucles incessantes dans lesquelles j'étais enfermé.

Quand alors, mon souffle se coupa brusquement. Je suffoquai et subissait une souffrance réconfortante et appréciable.

Enfin.
Enfin l'on avait mis fin à mes jours.
Enfin cette torture allait prendre fin.

Après un dernier regard à Hermione, je basculai en arrière le sourire aux lèvres.

Puis, les ténèbres. 

Qu'en est-il de nous ? - Fremione [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant