Les mondes se sont croisés

Mycroft /I/

Un phare de voiture de police passa tout près d'eux, mais le véhicule ne stoppa pas. Heureusement. Cela confirmait une énième fois l'efficacité des filtres de perception fabriqués à partir des clés du TARDIS.

Cela faisait trois jours que le Docteur, Martha et Jack étaient en fuite. Le Maître les avait déclarés hors-la-loi, et depuis, toutes les forces de l'ordre du pays étaient à leur recherche.

Comment ce monstre ignoble avait-il pu se faire élire démocratiquement par le peuple anglais ? En vérité, le Docteur avait sa petite idée là-dessous : il avait découvert, en faisant une petite recherche sur Internet, qu'un nouveau système téléphonique avait été mis en place à une date qui coïncidait étrangement avec l'apparition du Maître sur la scène politique. Ce système se nommait Archangel, et désormais, tous l'utilisaient.

Il aurait suffit au Maître créer quelques circuits subluminaux, imperceptibles à la conscience des humains, pour pouvoir discrètement manipuler leurs pensées.

Le Docteur avait fini tellement convaincu de sa théorie qu'à présent, son objectif principal était d'atteindre le quartier général de commandes d'Archangel pour pouvoir désactiver ce signal.

Et c'est pour cela qu'en cette heure tardive de la nuit, lui, Martha et le capitaine Jack Hardness filaient à travers les longues routes de la campagne menant de Londres à Maldon, là d'où provenait le signal d'Archangel.

Mycroft se renversa en arrière dans le fauteuil de son bureau, les muscles tous engourdis de fatigue et d'inaction. Cela faisait pratiquement deux jours qu'il était assis là sans interruption, à donner des instructions ou à régler de la paperasse. Il fallait dire que le nouveau ministre ne se foulait pas pour s'occuper des documents d'état, ça non et dès qu'on avait besoin de sa signature personnelle, il fallait lui courir après un peu partout à travers Londres. On avait alors, depuis quelque temps, le plus de chances de le trouver en compagnie de cet ambassadeur russe, qu'il avait rencontré il y avait trois jours de cela. Cette compagnie avait le don de déplaire au plus haut point à monsieur Holmes.

Mycroft se méfiait de ce Russe, ce Tetchenov : c'était un oiseau beaucoup trop ambitieux et intelligent à son goût. Les Russes n'avaient pas pour habitude d'être ainsi, favorisant plutôt la vodka et les bombes au développement de leur intellect, mais ce type-là était tout différent, et surtout, il semblait indéniablement dangereux, aux yeux de Mycroft. Bien sûr, il l'avait connu plusieurs années auparavant, Tetchenov ayant eu une carrière politique des plus brillantes, mais depuis toujours, il pressentait chez lui quelque chose d'anormal, comme s'il n'était pas un simple mortel. D'ailleurs, même maintenant, il ne semblait pas vieillir, alors qu'il devait avoir plus d'une quarantaine d'années. Pourtant rien, pas un cheveux gris, pas un ride, n'avait altéré son apparence physique depuis tout ce temps.

Et le premier ministre semblait s'être lié d'amitié pour lui. Ce qui ne manquait pas d'inquiéter son plus proche conseiller.

Les soucis que se faisait Mycroft, sans compter une bonne dose de stress à cause des responsabilités qui s'accumulaient sur ses épaules, l'avaient fait maigrir. Encore quelque temps ainsi, pensa-t-il, et il allait finir par devenir aussi mince que son petit frère !

Sherlock... d'ailleurs, en y pensant, il se souvint qu'il n'avait pas eu le temps de se renseigner sur les dernières nouvelles concernant son enquête au Japon. Il avait dû l'amener contre son gré et sans son approbation dans ce pays, et ce d'une manière des plus discutables, puisqu'on l'avait tout de même endormi avec une fléchette ! Pourtant, Mycroft était bien conscient que cela était nécessaire, et que sans cela, Sherlock aurait fortement risqué sa vie.