12. Un monde réduit en cendre.

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Je n'avais jamais été fan de la nature. L'air, l'herbe, les arbres, le chant des oiseaux... J'y trouvais peu d'intérêt. Pourtant, installée dans l'herbe, dos contre un arbre, je dus admettre pour la première fois de ma vie que c'était reposant. Kalidas avait raison. Je n'aimais rien. Aimer ne faisait tout simplement pas parti de mon vocabulaire. Mais qu'est-ce que je pouvais y faire ? Il m'était inconcevable de faire autrement. Cela m'avait toujours convenu. Ne pas aimer permettait de ne pas m'attacher. C'était tout ce qui importait.

Après m'être enfuie de la pièce, Kalidas n'avait pas cherché à me rattraper. Il m'avait laissé partir et je lui en étais reconnaissante. J'avais besoin d'être seule avec moi-même. Cela m'arrivait souvent. La solitude n'était pas seulement ma meilleure amie, elle était aussi un médicament. Elle chassait toutes les sensations nocives qui me fouettaient le corps.
Mes yeux se mirent bien vite à me picoter. Je n'avais pas dormi depuis longtemps. Ma dernière nuit avait été une nuit blanche où j'étais passée à l'action afin de m'enfuir du château. La fatigue se faisait désormais bien ressentir. Me laissant glisser dans l'herbe, je finis par fermer les yeux et m'endormir. 

Lorsque je me réveillai, le soleil pointait à peine le bout de son nez, colorant le ciel sombre d'une pointe rosé. Tout était calme et tranquille dans les environs.
Enfin, c'est ce que je crus en premier lieu. 

En me redressant, je vis que l'autre partie du ciel qui était hors de mon champ de vision semblait sombre. Pas parce qu'il faisait nuit, mais parce qu'il était empli de particules que je n'arrivais pas à déterminer dans la pénombre. 

Je me relevai, me dirigeant vers un endroit où j'aurais une meilleure vue sur ce qui se passait. Mais pour ça, il fallait prendre de la hauteur... 

Le mot dragon vint alors me chatouiller l'esprit. 

Non. 

Je ne pouvais pas faire ça, c'était bien trop dangereux... Puis, qu'est-ce ce que j'en avais à faire de ce qu'il pouvait bien se passer ? Je n'avais jamais été curieuse. Rien n'avait d'importance. Alors pourquoi vouloir voir tout ça de plus près ? Je m'étais peut-être promis de m'intéresser davantage à ce monde pour ne pas être largué, mais là ça allait trop loin. 

Je risquai de mettre ma vie en danger. De tomber du dragon, de me faire attaquer par ce dernier ou encore de me rendre compte que ce qu'il se passait attentait à ma vie. Mais pourtant, après tout ce qu'on m'avait raconté, je voulais comprendre par moi-même et voir de mes propres yeux où j'étais tombée. Après tout, si j'avais bien compris, j'allais sois devoir combattre Evilash, soit la fuir alors qu'elle tenterait de me tuer, soit me cacher dans un coin jusqu'à la fin de ma vie. Autant prendre des risques. Cette dernière pensée me stupéfia. Moi, qui détestais sortir de ma routine, j'étais en train de me mettre dans une situation complètement surréaliste. 

Arrêtant le fil de mes pensées, je finis par me diriger vers l'endroit où Kalidas avait emmené le dragon. On aurait dit une géante écurie. Le dragon aux écailles noires dormait sur un nid de pailles. 

Je m'approchai en prenant un lasso, peu convaincu que ça suffirait à le faire sortir. Lorsque je m'approchai de la bête aux écailles de jais, celle-ci se réveilla dans un grognement. Je fis un mouvement de recul. Comment devais-je me comporter avec un dragon ? C'était plus facile d'en chevaucher un lorsqu'on ne le voyait pas, surtout si nous étions accompagnés. Mais seule, face à la gueule immense de la bête, c'était une autre paire de manche... Mais il était inconcevable que je me dégonfle. Je n'étais pas une trouillarde ! Je n'avais pas le droit de prendre mes jambes à mon cou, c'était trop pathétique, c'était faible. Maintenant que je m'étais lancée, autant aller jusqu'au bout. 

Avançant d'un pas, je guettai la réaction de la bête avec une certaine appréhension. Le dragon me regarda de ses yeux jaunes à la pupille verticale et secoua la tête avant de pousser un soupir, semblant retourner dans le royaume des rêves. 

Obscuras Tome 1 : L'insaisissable.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant