Obscuras Tome 1 : L'insaisissable.

29. Une montagne métamorphique.

D'un geste précipité, Rox m'extirpa hors de la montagne. Dans sa hâte, elle heurta une pierre de son pied et nous perdîmes l'équilibre. Je me sentis tomber et rouler dans une pente. Ma cheville me faisait terriblement mal.

On finit notre chute sur un sol de granit. Le souffle court, je me redressai, retenant une grimace de douleur lorsque ma cheville se mit à me tirer. L'examinant de plus près, je vis qu'elle était brûlée et ensanglantée.

Rox se redressa à son tour et lança un regard vers le haut de la pente où nous venions de chuter. Je remarquai alors que la montagne demeurée introuvable, elle avait disparu. Où était-elle passée ? Avions-nous chuté si loin de la montagne, que cette dernière était trop loin pour que l'on puisse la discerner ?

- Où est la montagne ? finis-je par demander.

- Elle a disparu lorsque nous nous sommes échappées, répondit Rox, comme si tout cela était tout à fait normale.

- Disparue ? répétai-je.

- Cette montagne est maudite et n'apparaît qu'occasionnellement dans le paysage, piégeant ceux osant s'y aventurer, m'expliqua la rouquine. Elle s'alimente de la peur, du désespoir et de toutes les émotions négatives. Autrefois, la montagne était utilisée pour torturer des prisonniers. Certains mourraient une fois à l'intérieur.

- Vous avez des coutumes étranges. Torturer émotionnellement un prisonnier, je trouve cela aussi barbare que réduire un palais et tous ses habitants en cendre.

- Je suis bien d'accord avec toi et fort heureusement, ces coutumes ne se font plus, m'apprit Rox.

- Je suis ravie d'apprendre que vos mentalités ont évolué, lâchai-je en étendant ma jambe devant moi pour que ma cheville me fasse moins souffrir. Rox me regarda changer de position, une grimace franchissant ses lèvres.

- Je ne suis pas sûre qu'évoluer est un terme approprié, disons qu'elle a juste changé de forme. Je regardai la renarde, perplexe.

- Tu veux dire qu'il existe encore des formes de torture ?

La jeune fille entortilla son doigt dans l'une de ses mèches de cheveux, semblant hésiter. Elle finit par acquiescer.

- On aura beau faire pour améliorer le monde, il y aura toujours des personnes avec un mauvais fond, voyant la mort et la torture comme unique solution. C'est difficile de mettre totalement fin à des choses pareilles. Je fronçai les sourcils.

- Vous aussi vous voyez la mort comme solution. Après tout, vous m'avez appelé pour que je tue Evilash et que l'on n'en parle plus, fis-je remarquer. La renarde se pinça les lèvres et détourna le regard.

- C'est vrai. Et nous n'avons pas d'excuse valable, c'est immonde de vouloir la mort d'un autre être vivant, mais on ne sait plus comment l'arrêter. On n'a jamais su.

- Vous n'avez jamais su... comme vous n'avez jamais su non plus quel était mon atout qui ferait pencher la balance avant de m'appeler ici, raillai-je. A croire que vous jouez avec le hasard.

Rox détourna le regard, passant une main entre ses cheveux d'un roux flamboyant. Elle semblait nerveuse.

- Le hasard, peut-être pas... marmonna-t-elle. Sa réaction m'interpella.

- Tu as quelque chose à cacher ? lâchai-je de but en blanc. Le doute vint bien vite s'enrouler dans mes entrailles. Vous savez très bien quel est mon atout, vous ne voulez simplement pas m'en informer ! m'écriai-je, bien que je n'en fusse pas tout à fait convaincu. Mais la renarde effaça rapidement les derniers doutes que je possédais. Elle ne cessait d'entortiller son doigt dans ses cheveux, baissant le regard, comme fautive.