Votre bonté doit avoir quelque tranchant, autrement ce n'est plus de la bonté.

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Votre bonté doit avoir quelque tranchant, autrement ce n'est plus de la bonté.
Ralph Waldo Emerson.


L'homme passa devant la jeune femme et la bouscula à son tour. Un frisson d'interdit glissa sur tout son corps, le soldat savait qu'il n'avait pas à faire ça, mais ce fut bien plus fort que lui. Il se précipita au chevet de la jeune femme malade d'un pas pressé sans un regard pour la faucheuse. Cette dernière fut subjuguée par ses gestes doux. Pendant que l'homme touchait le visage de la malade, Kosilka fit le même geste sur son propre visage. Une toute petite part d'elle s'avouait qu'elle aurait aimé, elle aussi, sentir les doigts rugueux de l'ami glisser sur sa peau.

Une nausée prit d'assaut la gorge de la Faucheuse, elle le désirait tout autant que cela la rebutait. Elle eut du mal à retrouver son calme, tout en s'obligeant de respirer lentement par le nez elle ferma les yeux. Non, il ne lui ferait jamais de mal. L'ami n'était et ne serait jamais le gros. Pourtant ce qu'elle désirait y ressemblait étrangement. Après un énième soupire-t-elle prit son courage à deux mains, Kosilka s'avança prudemment vers le couple tout en essayant d'avaler la bille acide qui encombrait son œsophage. La jeune femme se concentra sur ses respirations pour le moins erratique pour ne pas sombrer, le souvenir de la voix du colosse finit par calmer les battements fous de son cœur à vif.

Elle se doutait que le soldat pourrait s'attaquer à elle, sans vouloir vraiment la blesser. Si cela se produisait, ce serait plus par besoin de protection envers sa douce que par envie de détruire sa Kosilka. La faucheuse, ne comprenait pas vraiment ce besoin, pour elle protéger une personne ne servait à rien. Tout un peuple attendait énormément d'elle, alors elle n'avait pas le droit de se contenter d'un. Mais, si un jour elle devait choisir entre eux et l'ami... Ana en serait incapable, non pas parce que le choix serait trop dur pour la Kosilka, mais parce que son choix était quelque déjà fait.

La jeune femme s'agenouilla à quelques pas d'eux, c'est à peine si elle put voir le visage de la malade ou son corps tant il était emmitouflé sous un tas de peau, pourtant elle grelottait encore. Sans un mot, la jeune femme se releva et fit demie tour, ses cheveux sombres claquèrent contre son dos. Fixant ses pieds pour ne croiser aucun regard, Ana se dirigea à grands pas vers ses sacoches laissées près du feu un peu plus tôt.

Toujours sans un mot, la jeune femme fit demie tour les bras chargés. Les siens la suivirent du regard tout en continuant de manger goulument. Dans son dos, un enfant éternua et une nuée de corbeaux prit possession d'un arbre.

- Archi, le serpent suivit le regard de sa maitresse et alla se régaler de plusieurs oiseaux annonciateurs de morts. Parfois, sous le regard effaré des siens.

Le couple n'avait pas bougé d'un iota. Sans en dire plus, elle alluma un feu en utilisant sa magie et fit chauffer un peu de lait de biche qu'elle venait de ramener. Elle se dit aussi que ce faux feu était bien moins joli que celui qui vivait dehors.

- Du lait de biche et des herbes médicinales bleues. Ça lui fera du bien. Dis la Faucheuse en leur donnant un verre de sa mixture.

Le soldat la fixa étrangement, se demandant s'il devait ou non accepter ce drôle de présent. Une pointe d'agacement fit grincer des dents la kosilka. La patiente n'était toujours l'une de ses vertus.

- Les miens ne sont tués ni pour un regard ni pour un coup et crois-moi, tu ne veux pas que je la force à boire ça ni que je me fâche.

La voix basse de la jeune femme fit trembler les murs en granit, quelque part la pierre bougea dans un grincement sinistre, pour appuyer ses dires elle avala une bonne gorgée de son lait de biche bleutée sans cesser de le fixer du regard.

Vybor Kosilki, le choix de la faucheuse. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant