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Le Soleil se levait à vu d'œil. Bientôt, il recouvra notre Section éclairant ainsi ses moindres petits recoins grâce à ses rayons.
Je marchais. Je me promenais à côté d'une petite rivière qui s'écoulait le long d'une multitude d'arbres. Arbres, qui aidés par le soleil, parsemaient le cour d'eau de multiples pièces d'or. Le bruit de l'eau qui coule faisait parti de mon classement personnel des sons les plus reposants. Je m'étais amusée à le faire un jour, durant l'une de ces promenades.
Mais la musique du ruissellement de l'eau n'a pas réussi à détrôner le vent qui soufflait dans les feuilles de la forêt. Ce matin le ruisseau paraissait encore immobil. Comme s'il était encore trop tôt pour qu'il ne se réveille. Les vagues qui faisaient naviguer quelques feuilles mortes égarées m'ont vite fait changer d'avis. Il était bien réveillé.
Quel bonheur de voir un tel spectacle pourtant si rare depuis la fin de l'Ancien. Avant le commencement de l'Erreur, il était normal de trouver des endroits comme celui-ci. Mais aujourd'hui, c'est une autre histoire.
Notre Système est basé sur l'équilibre de l'humanité, ce qui est forcément accompagné d'un remodelage du paysage selon le caractère de chaque personne. Ainsi, le citoyen peut vivre en parfaite harmonie dans un environnement qui lui convient.
J'avançais, faisant exprès de laisser le plus longtemps possible mes pieds nus en contacte avec l'herbe mouillée par la rosée.
Je fermai les yeux et profitai d'un coup de vent qui poussa mes cheveux vers l'arrière.
Au bout de quelques secondes seulement j'ouvris les yeux, coupée par une impulsion dans le feuillage.
Je me retournai alors pour essayer de comprendre ce qui avait provoqué ce mouvement. Mais je ne vis rien. Juste le vent souffler à travers les feuilles, les faisant virevolter dans tous les sens possibles.
Je me remis donc à marcher doucement, continuant ma promenade. Un sourire se dessina sur mon visage en repensant au sursaut que j'ai eu, causé par un simple coup de vent.
Mais des craquements de branches au fur et à mesure que j'avançais me firent changer d'avis. Je m'arrêtai, et le bruit s'arrêta. Ma respiration accéléra et mon cœur se mit à tambouriner dans ma poitrine. Je fermai les yeux et pris une grande respiration pour me calmer.

Non ce n'est pas possible, je ne fais que halluciner.

Peu convaincue, je fis encore quelques pas, pour me persuader que je rêvais. Mais les bruits recommencèrent. Ce qui signifiait que quelque chose me suivait. C'était certains, une ombre m'épiait et je ne savais pas depuis combien de temps elle était là, à m'observer. Un frisson me parcourut le dos en imaginant cette chose me guetter, tel un animal prêt à sauté sur la proie. Sauf que la proie, c'était moi.
Je me mis alors à courir, courir le plus vite que je le pouvais pour rebrousser chemin. Le seul échappatoire possible était d'atteindre la route. Ici, la Chose ne se risquerait pas à se montrer. Il y avait trop de bruit. En tous cas, je l'espérais.
Je tentai plusieurs reprises de jeter un regard à travers la forêt pour identifier mon poursuivant. Mais le feuillage était si dense que je n'arrivais pas à savoir ce que c'était.
 Ma vitesse augmenta de plus bel. Chacune de mes jambes semblait vouloir disputer une course effrénée contre l'autre.
Le sol défilait sous mes yeux et mes pieds sentaient l'eau de la rosée s'accumuler le long de les chevilles. J'allais de plus en plus vite, redoutant à chaque instant que cette chose surgisse. Les endroits où le chemin devenait étroit, les branches d'arbres me fouettaient le visage. Je manquai à plusieurs reprises de tomber contre des racines ressortis. Je slalomais entre les arbres et mon souffle accélérait. Je savais que je ne pourrais pas tenir ce rythme très longtemps. Je regrettais déjà d'avoir fait un départ aussi brusque. Ça n'avait sûrement pas aidait mes poumons à tenir le choque. Mais l'idée de voir l'animal sauvage me sauter dessus me semblait être un argument assez convaincant pour de redoubler d'efforts et ne pas ralentir.

Au bout de quelques minutes, je n'entendais plus que le bruit de mes pas sur les feuilles mortes. J'en profitai pour ralentir et essayer reprendre un peu mon souffle. Mes oreilles étaient aux aguets, prêtes à percevoir le moindre bruit qui me signalerai de repartir.  Une fois totalement à l'arrêt, des perles de sueur se dessinaient sur mon front et je me sentis devenir rouge, comme si toutes les répercussions de l'effort avaient choisi de resurgir à ce moment précis.
Les mains sur les genoux, j'étais pliée en deux, exténuée par ce soudain effort.

Je n'aurai pas dû faire cette pause. Alors que je me redressai, c'est ce moment précis que choisit la bête pour sortir de son ombre. Une masse me claqua au sol.
Sa manière de me maintenir par terre m'a appris

au moins une chose : ce n'était pas un animal mais bel et bien un Homme.

Je fermais les yeux et me débattais du mieux que je le pouvais. Je donnais des coups à droite, à gauche...  J'espérais atteindre quelque chose, mais mes gestes ne firent que brasser de l'air.
Mon adversaire était clairement plus fort que moi. Il me maintenait les poignées contre le sol et à chaque fois que je tentais quelque chose, il resserrait son emprise, réduisant considérablement mes mouvements.
Je me mis alors à crier, à hurler à m'en décoller les poumons :

— Laissez moi je vous en supplie !

Des larmes se formèrent dans mes yeux qui refusaient toujours de s'ouvrir.

— T'as une sacrée voix ! S'exclama alors mon agresseur.

À cet instant, je compris. J'arrêtai de crier et de me débattre. Cette voix, elle ne m'était pas inconnue, bien au contraire ! Du coup, tout depuis le début de ma course devint plus clair…

Three Thousand OneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant