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Le couloir plongé dans l'obscurité ne semblait pas avoir de fin. Et pourtant, il y en avait forcément une.

Cela devait faire dix bonnes minutes que nous marchions en silence. Seul le bruit régulier de nos pas résonnait. Évidemment, il n'était pas forcément important de le préciser mais celui des lampes était encore là. Il commençait sérieusement à me monter à la tête.
Mes pensées divaguaient d'un sujet à un autre. Le thème qui revint le plus souvent était le résultat du teste. J'avais bien compris, grâce à la crise de maman le matin même que je ne devrais pas, mais j'appréhendais.
De quoi sera composé ma vie plus tard ? Je vivrai peut être loin d'ici. Je ne verrai peut être plus jamais ma mère. Je n'arrivais pas à me décider si elle me manquera ou non. Je ne sais pas ce qu'elle deviendra si nous partons. Je n'en sais rien. Mais elle restera ma mère, et où que je sois je devrai m'en soucier. J'essayais de m'en convaincre mais le ferai-je vraiment ?
Je pensais aussi à Ethan. J'essayais d'imaginer ce qu'il faisait en ce moment. Je ne pensais pas qu'il ne se les même questions que moi. Je ne peux m'empêcher de me dire qu'il a de la chance d'être aussi serein. Il fait confiance au Système. Il a toujours été confiant. Comme lorsqu'il m'a dit qu'on restera toujours ensemble. J'aurai du mal à accepter, si nous étions séparés. Mais si le Système l'a décidé, peut-être que c'est ce qu'il nous faut.

*

Je ne savais pas que c'était possible. Au bout d'un moment, je crû arriver à bout de mes pensées. L'ennui se faisait de plus en plus sentir. Je ne savais plus à quoi je devais encore réfléchir. Je semblait avoir fait le tour de toutes mes préoccupations. Il n'y avait rien. Marcher était notre seule source d'occupation. Mes yeux n'avaient toujours pas réussi à s'habituer à l'obscurité. Il n'y avait pas assez de lumière pour cela. Je ne sais pas quelle distance nous avons parcouru mais je ne voyais toujours pas le bout. Quant au grésillement des lumières, je réussi presque à l'oublier. Je me surpris à réaliser que j'étais habituée à l'entendre maintenant.
"Ça devient vraiment grave d'en arriver là" me dis-je.
Ma nouvelle camarade décida enfin de briser la glace, à mon grand soulagement. J'étais un peu gênée par la tension qui régnait. Mais je n'avais pas envie de commencer la discussion. Je n'étais pas très doué pour ce genre de chose.

 — Comment tu t'appelles ?

 — Louise, et toi ?

 — Amber.

L'atmosphère se détendit. Nous continuâmes comme ça durant ce qui me semblait être une éternité, en nous demandant ce qui nous attendait une fois que nous serions parvenues à destination.

*

Nous marchions, le long de ce couloir sombre et rectiligne, ne sachant toujours pas si nous allions dans la bonne direction. Même si la discussion s'était un peu déliée, elle n'avait pas réussi à chasser totalement l'ennui que j'éprouvais à répéter toujours le même mouvement, sans changer de paysage.
En faisant sa connaissance j'avais appris que Amber était de la deuxième Section elle aussi. Mais visiblement, nous ne nous sommes jamais croisées. On ne devait pas habiter le même coin, sinon je l'aurais reconnue. En parlant, elle me fit part elle aussi des ses interrogations à propos de notre longue marche.
Nous avons plusieurs fois hésité à faire demi-tour, mais nous nous sommes vite résignées. On avait parcouru une trop grande distance pour faire demi-tour.

Soudain, je sentis le bras d'Amber se mettre en barrage à travers mon ventre.

—Regarde, cette porte...

Toutes les portes, sans exception, étaient identiques depuis mon entrée ici. Pas une seule ne se différenciait des autres. Mais celle là n'était pas vierge. Dessus était placardé une plaque avec les inscriptions suivantes :  

"Entrée : Suite Examen"

En lisant ces mots, un soupir de soulagement sortit de ma bouche.
Un sentiment d'excitation m'envahit aussitôt. La porte était notre issue. J'esperai que nous ne nous étions pas trompée.

— Enfin ! M'enthousiasmai-je

Nous traversâmes la porte avec élan de frénésie... qui fut soudainement stoppé par des milliers de jeunes habillés de blanc qui se tenaient face à nous. Ils étaient tous là.
Les candidats étaient tous immobilisé dans une sorte de réfectoire. Contrairement à ce matin, il m'était impossible de reconnaître les Sections dans cette foule. Là aussi, l'organisation était parfaite. Tous prenaient bien soin de laisser une distance entre chaque personne pour être sûr de ne pas entrer en contacte.

Devant eux, une immense estrade qui malgré sa grandeur, faisait pitiée de par les nombreuses fissures qui s'y trouvaient. Sur la scène, une vieille femme devant son micro était en train de parler. Elle était vêtue d'un beau tailleur qui à lui seul, suffisait à rendre impressionnante la personne qui le portait. Quand elle nous remarqua, elle s'interrompit et se tourna vers nous affichant un énorme sourire :

— Voilà enfin nos petites retardataires !

Three Thousand OneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant