•21•

15 3 0
                                    


J'en avais maintenant la conviction. Notre Gouvernante venait de totalement craquer. Les tests étaient finis. Ou presque. En fait, je n'en sais rien. Tous les candidats attendaient en ce moment d'être classés. Elle ne pouvait pas ignorer le résultat ne serait-ce que d'un seul d'entre eux juste pour satisfaire sa propre curiosité.

Je restais pantoise face à ce tissus d'absurdité. Elle continuait de tisser son discours douteux sous mes yeux perturbés. Quelques fois, elle s'exclamait, ce qui me faisait sursauter. Et d'autres fois, elle faisait des pauses pour que je confirme ce qu'elle disait. Mais je restais muette, incapable de comprendre ce qu'il était en train de lui passer par la tête.

Je n'étais pas vraiment sereine. Et plus elle parlait, plus ma perplexité se renforçait.

Je n'arrivais pas à coller les deux bouts de son discours. Paniquée, mes mains moites tripoter le tissu blanc de mon pantalon.

Je me demandai ce que faisait Ethan en ce moment. Lui et son équipe avaient sûrement réussi l'épreuve. Peut-être qu'ils étaient les seuls, mais ils avaient réussi.
Le contraire m'étonnerait vraiment. La capacité qu'il avait à trouver une solution à chaque problème m'avait toujours impressionnée. De plus, être accompagné de premières Section n'avait pas dû être un ralentissement.
S'il s'était retrouvé à ma place, subissant le même discours douteux de la Gouvernante, je crois qu'il se serait levé depuis déjà dix bonnes minutes pour quitter la pièce pendant que la Gouvernante parlait. Sans un mot ni un regard. Oui, j'imagine bien l'air de stupéfaction avec lequel la vieille l'aurait regardé. Elle ne devait pas avoir l'habitude que quelqu'un lui manque autant de respect. Et Ethan aurait était fier, trop fier d'avoir réussi à lui clouer le bec.

Une envie de sourire me vint suite à cette réflexion. Mais je n'en eu pas le temps. La Gouvernante avait été plus rapide :

- Bon, devant votre manque flagrant de perspicacité, je vais devoir arrêter de tourner autour du pot. C'est vous qui avez été choisie.

- Choisie pour faire quoi exactement ? Demandai-je alors que je cherchais à récupérer le fil.

- Mais réfléchissez bon sang !

Là, j'en ai pas trop envie...

- Louise, le Directoire a décidé de vous changer d'environnement. L'algorithme a déclaré qu'il y avait une harmonie parfaite, au petit détails près, entre vous et la vie que vous meniez déjà jusqu'à présent. Évidemment dans quelques années, nous vous devrons vous attribuer un propre logement familiale. Cependant, fasse à un résultat aussi précis, nous avons décidé que vous étiez la candidate parfaite. Vous intégrerez la dernière Section.

Elle attendit que je réagisse. Mais je n'ai pas réagit. Je la laissé parler en acquiesçant, comme je le fais avec ma mère lors de ses crises. De toutes évidences, la Gouvernante aussi débloquait. Je me demandais comment on pouvait dire une chose aussi absurde et paraître totalement lucide à la fois. Impossible. D'un côté j'étais soulagée. L'algorithme avait déclaré que je devait rester dans mon petit quartier, sans changer d'environnement, avec les mêmes fréquentations. Le problème de l'adaptation dans un nouveau milieu était résolu.

Devant mon manque de réaction, la Gouvernante déclara :

- Très bien, je vois que vous n'êtes pas trop perturbée. Si tout est réglé, ne perdais pas de temps à attendre la remise des résultats. Un véhicule viendra directement vous chercher dans quelques minutes.

Elle conclut debout en me tendant la main. Mais je ne lui rendit pas sa poigne :

- Attendez, vous savez très bien que je dois retrouver mon logement. C'est ce que l'algorithme a déclaré.

Elle se rassit :

- Je me disais bien que ça ne pouvait pas être aussi simple. Écoutais, je veux bien croire qu'un environnement complètement différent du votre vous provoquera un choc...

- Mais madame, je dois retourner dans mon logement familiale.

- Laisse moi finir. Si au bout de quelques années, nous ne remarquons rien d'alarmant à propos de votre erreur de classement, nous pourrions envisager de vous laisser le retourner là où l'algorithme vous destinait. Nous vous laisserons le choix.

- Mon choix est déjà fait. Pas besoin d'attendre quelques années.

La Gouvernante soupira devant mon refus d'obtempérer. Et moi je soupirais devant sa bêtise. Elle allait forcément se rendre compte que ce qu'elle disait manqué cruellement de sens.
Plus j'y réfléchissais, plus je me disais que ce rendez-vous ressemblait en fait à une autre épreuve. Peut-être me mettait t'elle dans cette situation pour évaluer mes réactions. Dans ce cas, j'étais convaincue que ça allait bientôt finir. J'estimais qu'ils devaient détenir maintenant assez d'éléments pour me classer.

- Écoutez mademoiselle, s'énerva la Gouvernante soudainement. Ce que je vous raconte n'a rien d'un jeu.

J'imaginai une dizaine de réponses sarcastiques quand soudain, l'immense porte de son bureau s'ouvrit. Pol, son fils, entra. Il était accompagné de... d'Ethan ?

- J'ai une proposition à vous faire, commenta la Gouvernante.

La venue de mon frère me redonna de l'assurance. J'étais confiante et rassurée par sa présence. Enfin du soutien.

- Pour que ce choc soit moins violent, je vous propose d'intégrer la troisième Section, accompagné de votre frère, dit-elle.

Je fus la première surprise par ma réaction. Je me rendis compte seulement quelques secondes plus tard que j'étais en train de rire à gorge déployée. D'habitude, je ne me permettais jamais d'être explicite comme ça devant une personne aussi importante, surtout si cela pouvait passer pour de l'irrespect. Mais cette scène devenait de plus en plus ridicule et improbable. Mais apparemment, j'étais la seule de cette avis. Ethan vint poser une mains sur mon épaule pour me signaler d'arrêter.
Je lui ai donc expliqué ce qu'on m'avait dit et à quel point cette situation manquait de sens - oubliant presque que Pol et la Gouvernante étaient là, à m'écouter. Mais alors que je pensais avoir le soutiens d'Ethan pour redorer mon image que j'avais abaissée maladroitement, il me répondit froidement :

- Je suis au courant de tout ça. Écoute, je ne pense vraiment pas que ce soit une autre épreuve. Les autres candidats sont déjà rassemblés pour la remise des résultats. Louise, ce que t'a dit la Gouvernante, c'est du sérieux.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Jul 29, 2019 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Three Thousand OneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant