Chapitre 8

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                       Il n'était jamais revenu. Chaque jour j'étais venue au point de rendez-vous , mais je ne l'avais plus revue. Les fils de madame Antoine m'ont aidé à le rechercher , mais on tournait en boucle. La déception se lisait sur le visage de ma mère. Je me souviens encore , lorsqu'elle m'avait interrogé sur le fait que je n'allais plus travailler , et que sans pouvoir me retenir je lui avais tout avouer. Ce jour elle me regardait horrifier . Et depuis ce jour là , elle ne m'a plus adressé la parole , sauf si le sujet a attrait a Kervens. 

                Aujourd'hui était une journée comme les autres .Dépourvue de joie , le vent me chuchotant que tout ira toujours mal pour moi , que je n'aurai jamais de bonheur , seulement les gens riches ont ce genre de choses .Assise dehors sur une chaise , sur le trottoir devant la maison, je regardais les motocyclistes passés , certaines boutiques *   essayant de gagner le plus d'argent possible. Et moi j'étais là , sans âme qui vive. Dire que ces enfants en face de moi qui jouaient la marelle , ou encore les osselets devant moi s'amusait beaucoup plus que moi. Je devrais peut-être attendre une voiture ou encore mieux un camion qui passe pour me projeter dans la rue , comme ça j'irais dans un endroit meilleur qu'ici. Qui aura de la joie et pour les pauvres et pour les riches. Ma mère n'a pas besoin de moi , je ne lui rapporte que des problèmes , mon fils encore moins. Qu'est ce que je fais donc toujours en vie. Je baissai mon regard sur mon ventre qui commencait deja à paraitre à travers mes habits. Pauvre enfant , tu n'as rien fait pour mériter ca , mais pourtant on te force à vivre cette vie misérable , si je pouvais je transporterais les montagnes pour toi , mais je ne suis ni Dieu , ni le diable , ni un ange. Je m'excuse. 

           Soudainement  ,l'un des fils de madame Antoine , Robinson , vint pressement a ma rencontre. Surprise  , je me mis sur mes pieds alerté par son expression de visage.  

-Nou jwenn vakabon an , men Makenson kenbe'l nan kafou an ap pale avel.

(Nous avons trouvé le connard , Mackenson le retient , lui parlant au carrefour)

         A ces mots je m'accours , sans même penser à mes sandales , ou le sol qui me brûle la plante des pieds  dû à son réchauffement par le soleil , au carrefour. En retenant ma robe par les pointes , m'empêchant de marcher dessus , je courais . Je ne savais pas à quoi je m'attendais , mais je voulais juste voir son visage l'expression qui en dégage. Je m'arrêtai tout d'un coup , le souffle toujours haletant , et je me mis exactement à côté de Mackenson. Enfin je le voyais  , là , debout , voulant prendre ses jambes à son cou , ses yeux vaguant de partout comme s'il avait peur qu'on le prenne en flagrant délit  . 

-Ou rekonet tifi sa ? lui demanda Mackenson qui me  pointait du doigt .

( Reconnais-tu cette personne?)

          Il hocha la tête en signe d'approbation sans toutefois me jeter un regard. 

-Mwen pa gen anpil tan fom ale. Dit-il rapidement en regardant sa montre sans vraiment prêter attention à l'heure.

(Je n'ai pas beaucoup de temps , je dois partir.)

        Je m'offusquai brusquement , moi qui était dépourvu de mots tout à l'heure , est prêté à lui balancer toute ma frustration.

-Sa wap fe avem? poukisa ou pa janm vini , hen? sa wap fe a sak nan vant mwen an?! Criai-je presque 

(Qu'est ce que tu vas faire de moi? pourquoi ne m'as tu jamais donné signe de vie ? Et ce bébé dans tout ça hein?!)

           Il osa enfin me regarder , mais sévèrement.

-Siw te ka fel avem , ou te fel a lot tou , donk mpa kwe e pou mwen. lacha-t-il.

Valeurs HaïtiennesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant