III - 1

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L'avion des garçons a décollé, une partie de moi s'est envolée avec eux. Le temps est passé trop vite. Mes amis, mes chers amis, vous me manquez déjà.
Morose, à travers la vitre du SUV, je vois les rues qui défilent sans y prêter une quelconque attention. Bien que Raffaele reste silencieux, sa présence me fait du bien.
Sur le pallier, je grimace en le voyant se diriger vers la porte de son appartement, pour le coup, je suis vraiment seule maintenant.

_ Adèle ?
_ Hum ?
_ Ça te dit de commander ?
Oh ! Dépitée, j'étais prête à fondre en larmes dès ma porte passée, mais maintenant, c'est un soupir de soulagement que je laisse s'échapper.
_ Avec plaisir.

C'est la première fois que j'entre dans son appartement et une chose me remue de suite les entrailles, les parfums de mes amis flottent dans la pièce. Sur mes gardes, je m'attends à les voir surgir d'un moment à l'autre, c'est totalement idiot mais ça n'en reste pas moins frustrant.

_ Ça te dérange si on mange chez moi ?
_ Non, pas particulièrement. Un problème ?
_ Aucun, j'aimerais juste prendre ma douche et me mettre en décontracte.
_ Ok, on passe commande et je te rejoins dans une demie heure, ça te va ?
_ Parfait.

Les cheveux légèrement humides, je m'affale sur le canapé en attendant Raffaele. Je tire sur mon plaid et attrape mon téléphone, j'envoie ma playlist japanime sur le home cinéma. Les vibrations des percussions de la bande officielle de Ghost In The Shell m'hérissent les poils. La tête renversée en arrière, je ferme les yeux et me laisse couler vers un monde d'une tout autre réalité...

Une chaude odeur d'épices m'éveille les narines et me pousse à ouvrir les yeux.

_ Où étais-tu partie ? me demande Raffaele.
_ Loin.
_ Ça, je me doute, tu ne m'as même pas entendu entrer.
_ Non mais mon nez ne m'a pas fait défaut.
Il sourit et dispose les plats sur la table basse.
Dès la première cuillère de mon pho, c'est une explosion gustative, mes papilles frétillent sous la douce brûlure de cette soupe chargée de succulents arômes. Le bouillon longtemps mijotée, les légumes ajoutés à feu doux et les diverses morceaux de viande, c'est un régal.

Nous ne parlons pas, pas besoin de parler pour ne rien dire. C'est même plus que ça,  comme si Raffaele me comprenait au-delà du silence, c'est réconfortant. Seuls Paul et une partie de mes amis me connaissent à ce point. Je me sens bien, ma peine évaporée, seul reste la joie des moments passés et l'enthousiasme de ceux à venir.
Réchauffée aussi bien par le pho bienfaiteur que par mon bien-être actuel, je me sens partir dans un état de demi sommeil. Sans pouvoir rien faire, ni rien dire, je sombre sous les notes japonisantes.

Hou la la ! Mais quelle barbe cette réunion ! Des chiffres par-ci, des stats par-là, un petit peu de courbes, le tout sous un immonde jargon commercial, en essayant de faire bonne impression au fils du boss, beurk.
Oups' en parlant du loup, il vient légèrement de tourner la tête vers moi.
A-t'il remarqué que cette fin de journée me tapait sur système ?
Peut-être est-ce l'ardeur que je mets à taper mon rapport qui lui a mis la puce à l'oreille ?
Effectivement, ma tablette n'a pas besoin que mes doigts s'écrasent sur l'écran pour fonctionner correctement. Bref, tout ça pour dire qu'aujourd'hui est une journée sans.

Zouip ! Le rapport terminé est envoyé par mail à Raffaele avant de le rejoindre pour savoir si je peux enfin m'échapper.

_ Oui ?
_ Tu veux que j'épluche les rapports des collaborateurs ?
_ Non, c'est bon j'y jetterai moi-même un œil plus tard. On va boire un verre ?

Hein ?!
En quatre mois c'est la première fois qu'il lance l'invitation. Au risque de passer pour une ivrogne, habituellement c'est toujours moi qui propose, ça fait plaisir !

Tant qu'il fait danser mon cœur Où les histoires vivent. Découvrez maintenant